A Gênes, une "Luisa Miller" de qualité

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Le Teatro Carlo Felice de Gênes ouvre sa saison avec ‘Luisa Miller’ dans une mise en scène du baryton Leo Nucci conçue pour le Teatro Municipale de Piacenza et reprise pour Gênes par Salvo Piro. Les décors de Rinaldo Rinaldi ne consistent qu’en quelques panneaux de tulle où sont projetés une campagne idyllique et un intérieur de château avec éléments picturaux émanant du Caravage. Les costumes d’Alberto Spiazzi ont un caractère XIXème avec crinolines et redingotes pour le milieu noble et tenues villageoises avec chapeau de paille pour le peuple. La direction d’acteurs se contente de rendre l’action intelligible, en respectant scrupuleusement les intentions du compositeur, ce dont se targue Leo Nucci.   Dans la fosse d’orchestre, un jeune chef de vingt-sept ans, Andrea Battistoni, dirige l’importante formation chorale préparée remarquablement par Pablo Assante et l’Orchestre du Carlo Felice avec une indomptable énergie qui attise continuellement l’intérêt dans cette longue partition. Sur scène, l’on découvre la jeune Napolitaine Anna Pirozzi qui a les véritables moyens du ‘lirico drammatico’ en mesure de négocier la ‘coloratura leggera’, sans toutefois éviter la dureté de certains aigus ; mais la crédibilité du personnage est indéniable. Tout aussi convaincant s’avère le baryton coréen Mansoo Kim qui, passée la scène d’entrée, impose un Miller à la diction finement travaillée et qui réussit à susciter l’émotion. Giuseppe Gipali confère à Rodolfo la couleur du ‘spinto’ qu’il innerve de tension jusqu’à un dernier acte bouleversant. En retrait, la Federica de Daniela Innamorati et le Comte Walter de Carlo Colombara en méforme mais qui possède la morgue hautaine d’un père trahi. Par contre, Giovanni Battista Parodi est l’image même du machiavélisme retors. Donc une ouverture de saison réussie pour un théâtre qui, depuis des années, tente d’assainir sa situation financière.
Paul-André Demierre
Gênes, Teatro Carlo Felice, le 23 novembre 2014

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