A Toulouse, Venise invite à la fête...

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Jonathan McGovern (Alamir / Damire / Borée), Rachel Redmond (Irène / Léontine / Flore)
© Patrice Nin

Après Paris et avant New York le théâtre du Capitole de Toulouse présente « Les Fêtes Vénitiennes » un opéra-ballet de André Campra créé le 17 juin 1710 au Théâtre du Palais-Royal. Représentée pendant un demi-siècle et souvent remaniée la partition a été adaptée par le chef d’orchestre William Christie et le metteur en scène Robert Carsen qui ont établi une version « qui correspond aux habitudes d’écoute des spectateurs d’aujourd’hui. » Ils ont gardé un prologue « Le Triomphe de la Folie sur la Raison dans le temps du Carnaval » et trois « Entrées » : « Le Bal », « Les Sérénades et les Joueurs » et « L’Opéra »  qui auront comme thèmes : les jeux de l’amour, la séduction, la jalousie et le dépit en bien sur le déguisement. En guise d’Epilogue, la Raison viendra finalement reprendre ses droits sur la Folie. Et William Christie ajoute : « Je me permets d’insister que cette frivolité des situations, ce goût du badinage, ne doivent pas faire croire que la musique de Campra est une musique facile, du moins dans le sens de la trivialité ! »
Le raffinement de la partition et la délicatesse d’écriture de Campra étaient en de bonnes mains avec William Christie et ses Arts Florissants (orchestre et chœurs) qui ont donné vie, couleur et entrain au spectacle et ont bien accompagné les chanteurs, une équipe parfaitement équilibrée et rodée chantant avec style et des voix souples, parfois un peu légères, une bonne diction et interprétant avec succès plusieurs rôles : les sopranos Emmanuelle de Negri, Elodie Fonnard et Rachel Redmond, la mezzo Emilie Renard, les ténors Cyril Auvity, Reinoud van Mechelen, Marcel Beekman et Sean Clayton, le baryton Jonathan McGovern et les basses François Lis et Geoffroy Buffière.
Venise était bien sur la scène de toutes ces fêtes, aventures amoureuses, déguisements, confusions, trahisons ou enlèvements et en somme l’acteur principal dans les livrets assez minces des différents épisodes. Robert Carsen a magistralement évoqué la ville des doges avec Radu Boruzescu (décors), Petra Reinhardt (costumes), Peter Van Praet et Robert Carsen (lumières) et Ed Wubbe (chorégraphie) dans des images féeriques avec deux couleurs dominantes : noir (les bâtiments) et rouge (les intérieurs damassés). La première scène nous montre la place Saint-Marc envahie par des touristes d’aujourd’hui, émerveillés, qui vont participer aux festivités du carnaval (costumes d’époque et masques), la dernière (l’épilogue rajouté), leur départ assez mélancolique laissant leur détritus sur la place. Les scènes des « Entrées » débordent de vie, d’imagination (la scène des gondoles), de ravissement et d’ironie (L’Opéra !) et les danses pleines de fantaisie par l’excellent Scapino Ballet Rotterdam s’intègrent parfaitement dans l’ensemble de l’action. Un spectacle réjouissant.
Erna Metdepenninghen
Toulouse, Théâtre du Capitole, le 23 Février 2016

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