Anton Bruckner arrangé avec talent et respect par Anthony Payne

par

Anton BRUCKNER (1824-1896)
Symphonie n° 2 (arrangement pour orchestre de chambre par Anthony Payne)
Johann STRAUSS fils (1825-1899)
Wein, Weib und Gesang opus 333 (arrangement Alban Berg)
Royal Academy of Music Soloists Ensemble, dir. Trevor PINNOCK
2013-DDD-65'39-Textes de présentation en anglais-Linn CKD 442
Il y a peu, le label Linn nous avait proposé une 4ème de Mahler réduite aux dimensions d'un petit ensemble de chambre, une réduction dans l'esprit de celles d'Arnold Schoenberg qui, sa vie durant, encouragea les arrangements de ce genre pour rendre les grandes fresques orchestrales accessibles à un public plus large. Le travail maladroit de Erwin Stein, qui tentait de conserver toutes les voix mais aussi la teneur symphonique de l'oeuvre, nous avait paru d'une totale incongruité et tout l'art de Trevor Pinnock n'avait pu suffire à éviter le naufrage. Nous avouons avoir poussé un certain soupir de découragement en voyant arriver un nouveau disque, au visuel comparable, basé sur le même concept, qui proposait le même exercice, cette fois avec une des symphonies les moins imposantes du compositeur de Saint Florian: la 2ème. Pourtant, un monde – artistique – sépare les deux albums. C'est que, cette fois, l'adaptation a été confiée à une personnalité hors du commun. En effet, Anthony Payne est l'auteur de livres qui font référence sur Schoenberg et Bridge. Mais, plus encore, il est celui qui a complété avec talent la 3ème Symphonie de Elgar, créée sous cette forme en 1997; un événement qui a fait beaucoup de bruit à l'époque et a tenté une baguette aussi prestigieuse que celle de Colin Davis. Dans la page qui nous intéresse ici, Anthony Payne n'essaie pas d'obtenir le même effet avec un ensemble d'une quinzaine de musiciens qu'avec une phalange au grand complet. Au contraire, il privilégie l'effet chambriste, particulièrement sensible dans le second mouvement. Quadrature du cercle: malgré les divers aménagements auxquels il doit procéder, il parvient à tout moment à conserver l'esprit brucknérien de la partition. On appréciera l'absence absolue de lourdeur conjuguée à une émotion restée intacte. Seul petit bémol: les voix principales sont parfois un peu perdues dans les passages où le contrepoint se fait le plus complexe. De la belle ouvrage en tout cas. Hommage à l'instigateur posthume de cette intéressante curiosité, la valse Wein, Weib und Gesang de Johann Strauss fils réécrite avec délicatesse par Schoenberg nous est proposée en un complément bienvenu. Le chef britannique semble cette fois très à l'aise et inspiré par cette bouffée de fraîcheur musicale, inattendue mais fort réussie.
Bernard Postiau
Son 10 - Livret 9 - Répertoire 9 - Interprétation 9      

 

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