Au Palais Garnier, de somptueux ‘Joyaux’   

par
Balanchine

Pour ouvrir sa saison 2017-18, le Ballet de l’Opéra de Paris reprend ‘Joyaux’, le triptyque que George Balanchine avait imaginé durant l’hiver de 1967 en passant devant les vitrines des bijoutiers Van Cleef & Arpels sur la Cinquième Avenue ; et la production fut présentée par le New York City Ballet le 13 avril 1967 au New York State Theater. Le chorégraphe en personne vint à Paris en mars 1974 afin de monter pour la troupe le second volet, ‘Capriccio’. Et le tout entra au répertoire de la compagnie le 19 décembre 2000 en faisant appel à Christian Lacroix pour concevoir les décors et les costumes. Avec l’idée de faire briller une pierre précieuse pour rendre hommage aux capitales de la danse, ‘Emeraudes’ évoque Paris, ‘Rubis’, New York et ‘Diamants’, Saint-Pétersbourg.

Le rideau s’ouvre sur la couleur verte noyant le fond de scène et imprégnant tutus longs et pourpoints de velours, tandis que Vello Pähn et l’Orchestre Pasdeloup interprètent remarquablement le Fauré des musiques de scène pour ‘Pelléas et Mélisande’ et ‘Shylock’. Figées sur les pointes en se tenant les mains, dix danseuses suscitent un climat de retenue suave où se glisse la rencontre entre les deux premiers plans, Emilie Cozette et Florian Magnenet. Puis ‘La Fileuse’ prête à la ballerine des gestes suppliants, quand ‘Sicilienne’ bénéficie de la grâce fragile de Léonore Baulac. Le Pas de trois devient incandescent grâce à la virtuosité du jeune Jérémy-Loup Quer, alors que les Pas de deux requérant les couples Cozette-Magnenet et Baulac-Audric Bezard font alterner solennité et demi-teintes tristes. Le Scherzo sollicitant l’ensemble prend un caractère cérémonieux tandis que le Molto adagio conclusif semble recueillir les émanations d’une sérénité retrouvée.
Tout de rouge vif, ‘Rubis’ se base sur le ‘Capriccio pour piano et orchestre’ d’Igor Stravinsky qui a pour soliste le co-répétiteur de la compagnie, Michel Dietlin. Indomptable énergie et ironie dominent le Presto initial où quatre des danseurs semblent vouloir désarticuler une Alice Renavand, aguicheuse en diable ; l’Andante rapsodico fait intervenir un François Alu, resplendissant dans l’intrépidité de ses sauts et bonds ainsi qu’une Valentine Colasante, magistrale dans ses pirouettes fouettées. Et sous le signe de l’humour corrosif, le Finale propulse les quinze danseurs vers une fête populaire totalement débridée.
D’un blanc éclatant rehaussé de l’éclat de pierreries et sous de longs rameaux argentés descendant des cintres se présente ‘Diamants’ élaboré à partir de quatre des mouvements de la Troisième Symphonie en ré majeur de Tchaikovsky. Neuf danseuses proposent d’abord une valse lente dont Myriam Ould-Braham et Germain Louvet dégageront la fibre tragique. Le Scherzo aux inflexions sarcastiques permettra du reste à notre danseur étoile de mettre en valeur la maîtrise de sa technique quand sa partenaire renouera avec l’élégance évanescente de sa ‘Sylphide’. Et la Polonaise conclusive a la grandeur surannée de ces finales magnifiant le classicisme prôné par Marius Petipa. Que d’ovations enthousiastes décerne un public qui a savouré sa soirée en compagnie d’un Ballet de l’Opéra dont la renommée n’est plus à prouver !
Paul-André Demierre
Paris, Opéra, le 7 octobre 2017

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