Baroque Splendor

par

0126_JOKERHeinrich Ignaz Franz von BIBER (1644-1704)
Motet « Plaudite tympana » à 54 voix - « Battalia » à 10 voix - « Sonata Sancti Polycarpi » à 9 voix - « Missa Salisburgensis » à 54 voix
LA CAPELLA REIAL DE CATALUNYAn LE CONCERT DES NATIONS, HESPERION XXI
Jordi SAVALL, dir.
2015-SACD-71'40- présentation et livret en français, anglais, espagnol, catalan, allemand- chanté en latin – Alia Vox n°AVSA 9912
Plaudite tympana ! Clangite classica ! Voces applaudite ! Oui, battez tambours, résonnez trompettes pour saluer la parution de ce chef d’œuvre qui vient enrichir la centaine de disques déjà publiés par Jordi Savall ! Et tous de premier plan. Il y a plus d'une trentaine d'années, un enregistrement de la « Missa Salisburgensis » avait été publié mais attribué à Orazio Benevoli (1605-1672). La célébrité de l’œuvre est due à ses effectifs -pensez-donc 54 voix ! Depuis, les recherches musicologiques ont permis de rattacher cette extraordinaire « nébuleuse musicale » à l'époque où elle fut créée, 1682 et à son auteur, Biber. Elles ont donné lieu à quelques enregistrements (Koopman, Balestracci , Mac Creesh, Goebel) De « von » Biber (puisqu’anobli par l'Empereur Léopold Ier en 1690) on connaissait ses fameuses « 16 Sonates sur les Mystères du Rosaire » par R. Goebel notamment, pleines de vie, de foi, de poésie où l'utilisation virtuose de la « scordatura » prend ses lettres de noblesse tout comme ses « Litaniae de Sancto Josepho », sa « Messa Christi resurgentis » et nombre de partitions de haute volée pour voix (« Missa Sancti Henrici ») ou instruments (différentes « Sonates » pour 8 trompettes, ou violon et basse continue notamment). Précédé ici d'une magnifique « Fanfara » de Bartholomao Riedl (ca 1650-1688), le disque de Jordi Savall offre un programme varié, intelligemment composé puisqu'après un admirable motet -  « Plaudite Tymana » à 54 voix de 1682- on entend une non moins pittoresque « Battalia » à 10 voix de 1673 où, après six mouvements de fort belle tenue, sonne une « Schlacht » (bataille) de haute volée en dépit de sa brièveté (43 secondes) et qui laisse la place à une méditation -« Lamento »- émue pour les Mousquetaires blessés sinon morts dans l'affrontement. La « Sonata Sancti Polycarpi » à 9 voix de 1673 n'est pas moins convaincante en ses trois mouvements et que suit le joyau de l'art baroque que représente cette « Missa Salisburgis » à 54 voix de 1682. Ici, c'est tout à la fois un architecte, un visionnaire, un titan qui domine de haut sa partition et nous laisse pantois devant tant de beautés contrastées -et de science musicale. Car l'auditeur n'est jamais écrasé par un monument surdimensionné mais au contraire surpris, ravi, transporté par des perspectives étonnantes, des nuances cristallines, des contrepoints majestueux, des fugues vertigineuses. Jordi Savall parvient à re-créer, pour l'enregistrement réalisé à la Collégiale du château de Cardona en Catalogne, les splendeurs sonores d'une partition qui fut à l'origine, conçue « sur mesure » pour un édifice religieux à la structure acoustique bien particulière, la cathédrale saint Rupert à Salzbourg (dotée de 7 orgues indépendants. Mozart y fut baptisé et jouait à l'orgue du pilastre). Après sa « Missa Bruxellensis » parue en 1999, le musicien catalan ajoute là une magistrale démonstration de son art, de son savoir, de sa fine sensibilité aussi.
Voces applaudite !
Bénédicte Palaux Simonnet

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