Concours Reine Elisabeth, samedi après-midi

par

Deuxième et dernière journée des demi-finales.
C'est la mezzo-soprano française Héloïse Mas qui ouvre les débats. On retrouve la voix profonde, fruitée et puissante dont elle avait fait montre au début de la semaine. Son programme propose Carmen, Isabella de l'Italienne à Alger, un des Rückert-Lieder, Charlotte de Werther avec Haendel (Médée) en point d'orgue. Tout au long de cette  prestation marquée essentiellement par l'originalité de cette voix qu'elle mène où elle veut, Héloïse Mas s'appuie sur un talent de comédienne trop souvent construit et l'on regrette regrette qu'il ne vise pas le sens émotionnel que porte les mots.
Suit la soprano coréenne Heejin Park qui proposera successivement Pergolèse (Serpina), Donizetti (Norina), Brahms (un des Vier Gesänge op. 43), Poulenc (Air champêtre), et Dvorak (Rusalka). Toute de rondeur et de naturel, elle raconte de sa voix lumineuse empreinte d'une belle dynamique et conduit son propos avec générosité. En Norina, son humour et son beau legato font merveille comme avec une Rusalka très sensible dans les couleurs de la nostalgie. Chez Heejin Park, seul importe le sens de ce qu'elle investit et partage.
On continue d'apprécier le beau timbre d'Anton Kuzenok, le ténor russe qui lui succède et, s'il convainc dans Shabby Peasant du Lady Macbeth de Chostakovitch où il semble accéder au second degré, il faudra se contenter, dans Bizet (Les pêcheurs de perles), Verdi (Requiem) et Offenbach (Contes d'Hoffmann), de la sincérité touchante dont il fait preuve à chaque instant. La diction laisse à désirer et les aigus posent quand même problème.

D'une grande maturité vocale et artistique, le ténor français Fabien Hyon axe surtout son répertoire sur la mélodie française qui semble son terreau originel. Accompagné d'un pianiste complice, Michalis Boliakis, les deux Möricke Lieder de Hugo Wolf sont donnés avec noblesse et intensité du propos, la prononciation est parfaite. La mi-voix est superbe dans Light de Roussel et, tout du long, les crescendi jusqu'au fff sont organiques, guidés par le sens du texte. Dans Azaël de l'Enfant prodigue de Debussy, la voix se fait tendresse, enrobée de soie pour rejoindre le tragique final : "J'ai mérité mon sort"... Un moment fort.
Quel bel artiste !
Le baryton américain Alex DeSocio vient ensuite conforter et enrichir les belles qualités dont il avait fait preuve au début de la semaine. De Ravel (Don Quichotte à Dulcinée), il personnalise les atmosphères même si la diction est perfectible. Il imprime au Schwanengesang de Schubert des accents graves et tragiques qui se voient magnifiés à la fin. Il mobilise totalement le public lorsqu'il aborde Perterburg sur un texte d'Aleksandr Blok de Georgy Sviridov : le chant au service du texte avec toute son intensité. Il termine sa prestation par un excellent Valentin (Faust).
Très beau timbre toujours chez le baryton ukrainien Yuriy Hadzetskyy dont on goûte la concentration, le sens de la construction et la maîtrise de la voix tout au long de sa prestation où il offrira Rivolgete a lui lo sguardo KV. 584 de Mozart, quatre mélodies de Grieg, Es ist genug (Elias de Mendelssohn) et le Lied Heimliche Aufforderung de Richard Strauss. Il y a là de la lumière, une respiration judicieuse et un remarquable contrôle des forte jamais criards.

 

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.