De remarquables "Puritani" au Regio de Turin

par

Olga Peretyatko (Elvira) e Dmitry Korchak (Lord Arturo Talb) nell'atto III

En coproduction avec le Mai Musical Florentin, le Teatro Regio de Turin affiche I Puritani dans la production  du jeune metteur en scène Fabio Ceresa (décors : Tiziano Santi /costumes : Giuseppe Palella /éclairages : Marco Filibeck) ; tous quatre  épient le temps qui s’écoule entre les premier et troisième actes : trois mois pour Arturo, trois siècles pour Elvira (à ce que dit le libretto). Cet espace est donc perçu différemment par chacun, comme un présent-futur qui suscite un doute : Elvira serait-elle déjà un fantôme au dernier tableau ? Des tombes et sépulcres qui parsèment le plateau, surgissent des spectres qui lui tendent un voile de noces, grisâtre comme un linceul. En perspective, le dôme d’une cathédrale gothique disparaît peu à peu, permettant à ce monde souterrain arborant des tenues fin XIXème d’accéder à la lumière salvatrice. A la tête des forces du Teatro Regio, le fringant chef d’orchestre Michele Mariotti  confère une indéniable grandeur à cette partition largement tributaire du dernier Rossini, tant par la précision du trait que par le souffle tragique qu’il lui prodigue. Sur scène, Olga Peretyatko donne d’Elvira une image touchante avec une voix consistante  dans le medio-grave, se jouant avec aisance de la coloratura virtuose, même si l’extrême aigu est souvent tiré. Le ténor Dmitri Korchak affronte avec une indéniable musicalité le rôle massacrant d’Arturo, évitant les contre-fa du tableau final pour se contenter du contre ré bémol, à l’instar de ses collègues. Nicola Alaimo a la solidité granitique barytonale de Riccardo, Nicola Ulivieri, l’austérité de Giorgio, quoiqu’il négocie avec une émission inégale son arioso « Cinta di fiori ». Samantha Korbey (Enrichetta), Fabrizio Beggi (Gualtiero) et Saverio  Fiore (Bruno) complètent honorablement la distribution de cette indéniable réussite, même si quelques sifflets épars égratignent les premiers plans au rideau final.
Paul-André Demierre
Turin, Teatro Regio, le 19 avril 2015

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