Double carte de visite

par

Alieva & Antonenko
Airs et duos de Verdi, Puccini, et Tchaikovski
Dinara ALIEVA (soprano), Aleksanders ANTONENKO (ténor), Kaunas State Choir, Kaunas City Symphony Orchestra, dir.: Constantine ORBELIAN
2015-DDD-74' 41''-Texte de présentation en anglais-chanté en italien et en russe-Delos DE 3477

Il est toujours malaisé d'appréhender l'art de nouveaux chanteurs par l'écoute d'extraits d'opéras. Ces CD "carte de visite" sont souvent trompeurs, car ils veulent exposer toutes les facettes d'un artiste par accumulation d'airs trop différents. La réaction sera souvent mitigée, et l'on attendra bien plus d'une véritable intégrale que de ces melting pots décevants. Ceci dit, ils ne souffrent pas tous de ce défaut, le présent CD en offre la preuve. Trois compositeurs pour deux chanteurs. Des airs, sans doute, mais des duos aussi. De la sorte, la personnalité de chacun peut mieux se dégager. La soprano azéri Dinara Alieva est familière de beaux rôles féminins telles Violetta, Mimi, Liu,  Nedda ou Tatiana. Le ténor letton Aleksanders Antonenko, un fort ténor, chante Manrico, Radamès, Calaf ou Otello, ce dernier rôle avec Muti ou Pappano, et a déjà une belle carrière derrière lui. Verdi est d'abord représenté par Aida. Si le Radamès d'Antonenko est solaire à souhait, sa démarche héroïque ne laisse pas trop de place aux sentiments. L'Aida d'Alieva démontre une puissance que l'on n'attendait pas. Le grand duo final est fort beau. Malgré un orchestre poussif, voilà un beau moment concertant. On peut commenter de même le Miserere du Trouvère, avec un Manrico tutta forza (mais qui ne crie pas) et une Leonora parfois couverte, mais soucieuse de la ligne. On ressentira les mêmes émotions avec les extraits de Tosca, célèbres : "Recondita armonia", "Vissi d'arte" et "E lucevan le stelle". Antonenko chante à pleins poumons, droit devant lui, et Alieva est sans doute plus musicale, et plus nuancée, à coup sûr. Le grand duo de l'acte I ("Mario ! Mario !"), toujours aussi tutta forza, est entraînant. Pour ces extraits d'opéras italiens, il est à noter que la soprano souffre d'un fort accent slave, contrairement au ténor, impeccable. Le récital se termine par trois fragments de La Dame de pique de Tchaïkovski. Les deux solistes sont ici chez eux, cela se ressent. Fini le concert, place au drame. Antonenko et Alieva se donnent à fond dans leur air respectif, et le duo final, le long du canal, est haletant : enfin du théâtre!
Bruno Peeters

Son 8 - Livret 10 - Répertoire 10 - Interprétation 9

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