Dvořák à son meilleur!

par

Antonín Dvořák (1841-1904)
Concerto pour violon et orchestre en la mineur, op. 53 - Romance pour violon et orchestre en fa mineur, op. 11 - Mazurek pour violon et orchestre en mi mineur, op. 49 - Humoresque en Sol bémol majeur, op. 101, n°7

Anne-Sophie Mutter (violon), Berliner Philarmoniker, Manfred Honek (dir.), Ayami Ikeba (piano)
2013 -55’08 - Livret trilingue : anglais, allemand et français par Oswald Beaujean - DG

Anne-Sophie Mutter livrait l’été dernier un nouvel album sous l’étiquette Deutsche Grammophon, accompagnée par le Berliner Philharmoniker sous la direction de Manfred Honek. La collaboration entre Mutter et le Berliner Philharmoniker remonte au début de la carrière de la jeune prodige, en 1976, alors qu’âgée d’à peine six ans elle fut invitée par Herbert van Karajan à travailler avec l’orchestre. Leur collaboration n’a pas pris une ride et la violoniste, fidèle à elle-même, offre ici une interprétation de la plus grande qualité qui restera certainement une référence pour la postérité. D’autre part, nous devons souligner que cet enregistrement du Concerto pour violon op. 53, d’Antonín Dvořák vient compléter la liste des grands concertos romantiques enregistrés par Mutter, artiste véritablement au sommet de l’industrie discographique classique, comptant jusqu’à ce jour non moins de 10 millions d’albums vendus.
La genèse du concerto prend source dans l’amitié entre Antonín Dvořák et Johannes Brahms. En effet, Dvořák est introduit par Brahms à la fin des années 1870 auprès de l’éditeur allemand Simrock. Il connaît alors ses premiers grands succès, notamment avec ses Danses slaves, op. 46. L’année de la composition de son Sextuor à cordes, en 1879, Dvořák se consacre au projet d’un grand solo concertant pour violon inspiré par le violoniste virtuose Joseph Joachim. Ce dernier avait par ailleurs été présenté à Dvořák par l’entremise de Brahms. Joachim aura l’honneur d’être le dédicataire des concertos pour violon des deux compositeurs. Toutefois, il ne jouera jamais l’œuvre de Dvořák dont la première devra attendre au mois d’octobre 1883 avant d’être donnée à Prague par le violoniste František Ondráček.
Le Concerto pour violon, comme la plupart des compositions contemporaines de Dvořák, reflète la passion du compositeur pour sa patrie, s’inspirant des musiques traditionnelles tchèques, moraves et slaves. Il s’inscrit ainsi dans la lignée de son prédécesseur Bedřich Smetana, bien qu’ils soient tous deux très différents de style et de caractère. Les références aux cultures tchèques et slaves sont ici d’autant plus pertinentes que le concerto fut composé à l’époque où Dvořák était attaché au mouvement de libération nationale tchèque contre l’oppression de l’Empire austro-hongrois. On en entend un exemple dès dans le premier mouvement du concerto, la dumka, chant populaire slave sous forme de plainte. Outre les références aux cultures musicales de sa patrie, on ressent la forte influence de Brahms, voire même de Liszt, dans l’écriture orchestrale de Dvořák.
Anne-Sophie Mutter offre avec le concerto une interprétation tout aussi remarquable de trois autres pièces pour violon solo de Dvořák, soit la Romance op.11, la Mazurek op. 49, et l’Humoresque op.101 n°7. La violoniste rend à merveille les couleurs expressives de l’âme tchèque. Son extraordinaire habileté technique donne l’impression d’une simplicité de jeu, dominant l’ensemble des difficultés d’un bout à l’autre de l’œuvre. L’assurance de l’archet de Mutter, la force de ses contrastes et sa large échelle d’expressivité la place définitivement à la tête des meilleures violonistes de notre temps.
Hubert Bolduc-Cloutier
Son 10 – Livret 9 – Répertoire 8.5 – Interprétation 10

 

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