Ferruccio Busoni au disque

par

Johann Sebastian Bach (1685-1750)/Ferruccio Busoni (1866-1924) : Chaconne en ré mineur, BV B 24
Ferruccio Busoni (1866-1924) : Fantaisie d’après Johann Sebastian Bach, BV 253 – Fantasia Contrappuntistica, BV 256
Lukasz Kwiatkowski, piano
2014-DDD-58’53-Textes de présentation en anglais et polonais-DUX 0934

Que le lecteur ne se méprenne pas ! Le présent enregistrement rend, certes, hommage à Johann Sebastian Bach à travers la Chaconne en ré mineur et à différents chorals, mais est avant tout un chaleureux hommage à un compositeur brillant souvent oublié : Ferruccio Busoni. Pianiste de formation, Busoni fut toute sa vie durant un fidèle admirateur du compositeur de L’Art de la fugue. Connu principalement pour ses différentes transcriptions pour piano d’œuvres de Bach, le compositeur, chef d’orchestre et pianiste enseigna dans de grands centres internationaux (Weimar, Vienne,…) et eut sous sa direction des étudiants tels Edgard Varèse, Kurt Weil, Claudio Arrau, Egon Petri... Sa musique, d’un contrepoint magistral, comporte une grande maturité d’esprit et une recherche raffinée de la ligne mélodique. Se référant toujours au passé, Busoni est l’un des précurseurs de la musique électro-acoustique ou microtonale, bien que sa musique ne fût jamais influencée par ces procédés. Initialement pour violon et issue de la Partita n°2, la Chaconne de Bach n’est pas reprise textuellement. Busoni apporte sa touche personnelle par l’ajout de motifs, d’effets, de chromatismes, de voix,…. La Fantaisie d’après Bach, écrite en 1909, reprend des motifs de trois chorals. Souple et recueillie, l’œuvre s’ouvre sur des lignes expressives et poétiques caractérisant parfaitement les traits de chaque choral. La Fantasia contrappuntistica attise la curiosité puisqu’elle est en quelque sorte la conclusion de L’Art de la fugue. Ici, tout le génie du compositeur italien se retrouve à travers un contrepoint redoutable. Influencée mais libre d’esprit, l’œuvre de Busoni se caractérise presque à l’image d’une œuvre pour orchestre tant les motifs, nombreux, émergent de chaque touche du clavier.
Nous pouvons déjà féliciter le jeune pianiste, Lukasz Kwiatkowski de restituer ce répertoire riche et très peu joué. Auteur d’un ouvrage consacré à la place de la musique de Bach dans celle de Busoni, l’artiste connaît l’essence même de ces œuvres et offre ici une prestation intéressante. On pourrait lui reprocher un usage abusif de la pédale, brouillant de temps à autres le langage qui se doit d’être clair alors que le pianiste dispose d’une large palette d’idées et de couleurs. L’analyse faite de chaque œuvre est pourtant précise et présente les contours harmoniques intelligemment. La construction de la forme est aboutie, on ne s’ennuie pas. Voilà malgré tout un enregistrement qui permet de découvrir une figure importante de la vie musicale à travers une passion pour l’un des plus grands génies de l’histoire.
Ayrton Desimpelaere

Son 8 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 8.5

Les commentaires sont clos.