La beauté des larmes

par
Donizetti

Gaetano DONIZETTI
(1797 - 1848)
Roberto Devereux
Mariella DEVIA (Elisabetta, Queen of England), Mansoo KIM (The Duke of Nottingham), Sonia GANASSI (Sara, Duchess of Nottingham), Stefan POP (Roberto Devereux, Earl of Essex), Alessandro FANTONI (Lord Cecil), Claudio OTTINO (Sir Gualtiero Raleigh); Matteo ARMANINO (A page), Loris PURPURA (A servant of Nottingham) ORCHESTRE et CHOEURS du TEATRO CARLO FELICE, dir.: Francesco LANZILLOTTA, Pablo ASSANTE, chef de choeur
Enregistré en direct du 20 au 24 mars 2016 au Teatro Carlo Felice de Gênes
DDD-2CD- CD1 64'27-CD2 66'24- livret en italien et anglais-pas de texte-chanté en italien- Dynamic CDS7755.02

De la vaine lutte de la volonté contre la mort -mort de l'amour, trahison, mort physique, affrontée face à face, le compositeur bergamasque, puisant une force inhumaine dans son propre malheur, a su en exprimer la splendeur. Car, c'est au moment même où viennent de périr ses parents, sa femme Virginia et ses enfants que le génie prolifique de Donizetti trouve son accomplissement le plus secret et le plus flamboyant. « Opéra de mes émotions » écrit-il le 4 septembre 1837 peu avant la création sur la scène du San Carlo. Curieusement, c'est tout de même la quatrième fois qu'il aborde le sujet de cette souveraine glorieuse et tragique qui symbolise l'âge d'or de la civilisation anglaise, mais, cette fois, c'est sa fin qu'il célèbre. Cette focalisation sur la violence éveillait par ailleurs, bien des échos en Europe et à Paris : en effet l’œuvre fut créée sur la scène du Théâtre italien, le 27 décembre 1838 -moins de 50 ans après la décapitation publique du roi Louis XVI, de la reine Marie-Antoinette (suivies de milliers d'autres!) sur l'actuelle place de la Concorde ! « Cet échafaud est rouge de sang /Ma couronne en est toute baignée/ un spectre affreux parcourt mon palais » s'écrie Elisabetta (Acte III scène 9 « Quel sangue versato al cielo s'innalza... ») avant de s'exclamer -« là où était mon trône s'élève une tombe ! J'y descends ». De forme traditionnelle seria avec récitatif orchestrés, l'action est vivement menée et comme unifiée par la pulsion musicale et dramatique. Les déchirements offrent d'infinies possibilités expressives, amour, extase, tendresse, rêve, jalousie, dépit où le belcantisme peut déployer ses derniers éclats. Au cœur du dispositif Mariella Devia est une reine incandescente tour à tour arrogante, glapissante, céleste et ondulante toute éperdue de vocalises ascensionnelles. « L'amor suo mi fè beata » offre une superbe cadence tandis que cette voix entre ciel et terre, changeante d'expressivité et de nuances descend dans la tombe en vraie souveraine du chant. Certes, certains aspects esthétiques peuvent surprendre (vibrato, dynamique, esthétique entre deux mondes) néanmoins il s'agit là d'une interprétation de référence. D'autant que la reine Devia est fort bien entourée. Sara (Sonia Ganassi) met habilement en valeur les admirables airs qui lui sont confiés et sait émouvoir. Le duc de Nottingham (vicieux Mansoo Kim) et Roberto Devereux (élégant et dramatique Stefan Pop, salué d'une ovation après son appel à Dieu Come uno spirto angelico : « pour la première fois, la douleur fera pleurer le ciel » !) font aussi des merveilles sous la baguette de Francesco Lanzillotta, précis et coloré. L'orchestre et les choeurs du teatro Carlo Felice se montrent bons sans plus. Une version déjà largement diffusée lors de diverses productions. L'absence de livret et de texte est regrettable.
Bénédicte Palaux Simonnet
Son 9 - Livret 5 - Répertoire 10 - Interprétation 10

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