Le Brahms Project de François-Frédéric Guy

par

0126_JOKERJohannes BRAHMS
(1833 - 1897)
Sonate pour piano n°2 en fa dièse mineur op. 2 - Sonate pour piano n°1 en Ut Majeur op. 1 - Sonate pour piano n°3 en fa mineur op. 5
François-Frédéric Guy (piano)
2016-93'32'' (2 CD)- Textes de présentation en français et en anglais -Evidence EVCD 022

Excepté des compositeurs de l'époque baroque, Alban Berg et Prokofiev, je n'en connais pas qui ouvrent leur corpus avec de grandes sonates pour piano composées en deux années de distance. Ce n'est pas pour rien qu'à l'écoute des esquisses de celles-ci, Schumann reprit sa plume de critique, abandonnée depuis dix ans, pour proclamer la venue d'un génie : "Ce furent des sonates, ou plutôt des symphonies déguisées [...]. Ajoutez un jeu tout génial qui faisait du clavier un orchestre entier aux voix tout à tour gémissantes ou exultantes". Et encore : "Voici venu le nouveau prophète de la musique allemande!". Et alors que Schumann était déjà à Endenich, il écrit au jeune compositeur de vingt ans : "Ta seconde sonate m'a beaucoup rapproché de toi [...] Je vis en ta musique". Le hasard fit qu'en 1854, lors de la parution de la Sonate en fa mineur de Brahms sortait chez le même éditeur, Breitkopf, la Sonate en si mineur de Liszt, de 22 ans son aîné, dédiée à Robert Schumann. Il y eut alors les "lisztiens/wagnériens" et les "brahmsiens".
Car il y a du Beethoven, du Schumann, du Mendelssohn, et même du Schubert chez Johannes Brahms. Mais, bien sûr, avant tout, sa propre marque. Car la 1ère Sonate op. 1 annonce déjà la 3e op. 5, et, plus loin, les Ballades op. 10 et même les derniers intimistes opus 116, 118, 119. Dès qu'il prend la plume, la "touche" Brahms est reconnaissable entre toutes.
Les trois sonates, "de jeunesse" du point de vue chronologique et non de maturité, sont des oeuvres de grande envergure (environ 26 minutes pour la 1ère, 24 minutes pour la 2e, et 37 minutes pour la 3e, en cinq mouvements de surcroît, un Intermezzo s'intercalant entre le Scherzo et le Finale). Aussi faut-il une main sûre et un esprit clair pour maîtriser ces "symphonies déguisées", les timbres et la polyphonie qui s'en dégagent, les mélodies qui émergent, les nuances des caractères, la grande arche de la structure. François-Frédéric Guy possède ces dons -il les avait déjà fait entendre lors de son "Beethoven Project"- pour nous faire intimement pénétrer le monde de Brahms, avec, à tout moment, une sonorité qui a de l'écorce, de la pulpe,... du jus. Vivement la suite !
Bernadette Beyne

Son 10 - Livret 8 - Répertoire 10 - Interprétation 10

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