Le premier opéra italien à Bruxelles

par

JOKER

Gioseffo ZAMPONI (1600/10-1662)
Ulisse all'isola di Circe
Drama musicale (Brussels-1650)
Céline SCHEEN (Circe), Furio ZANASI (Ulisse), Sergio ORESTI (Nettuno), Fernando GUIMARAES (Euriloco/Tritone/Statua/Marte), Zachary WILDER (Mercurio/Apollo), Mariana FLORES (Venere), Dominique VISSE (Argesta), Fabian SCHOFRIN (Satiro), Matteo BELLOTO (Giove), Ensemble CLEMATIS, Cappella Mediterranea, Choeur de Chambre de Namur, dir.: Leonardo GARCIA ALARCON
2014-DDD-2CD- 2h18'11- Textes de présentation en français, anglais, allemand-Textes en italien, français, anglais - Chanté en italien - Ricercar RIC 342

Un événement! De grande classe! Et sur tous les points. Si le nom de Zamponi ne figure dans aucune encyclopédie et n'a droit qu'à... 3 lignes dans la Pléiade, son importance n'en est pas moins notable: n'est-ce pas à travers son «Ulisse all'isola di Circe» que les Belges découvrirent l'opéra italien le «jeudy de carnaval 1650» (21 février), nouveauté que Mazarin avait imposée à Paris (en 1647) avec l'«Egisto» de Cavalli? Or il semble bien que les Bruxellois aient réagi beaucoup plus positivement que les Parisiens à cette étrange nouveauté esthético-musicale. Aujourd'hui une troupe formée par la Capella Mediterranea et le Choeur de Chambre de Namur dirigés par Leonardo Garcia Alarcon, après un long travail d'approche, en propose le premier enregistrement. Superbe déjà par la présentation en un coffret admirablement illustré et délicieuse surprise à l'écoute!
Aujourd'hui, cette «dispute» sur l'Amour, la tendresse, la trahison peut paraître un peu spécieux (encore qu'à l'Elysée...). Mais ces joutes littéraires et musicales où les dieux eux-mêmes – de Mercure à Jupiter en passant par Vénus, Apollon et Circé – présentent un miroir de l'humanité à travers ses désirs, ses tromperies, ses ridicules voire ses justifications résumés ça et là, à travers une sentence philosophique. Et puis, n'était-ce pas les débats que l'époque aimait à multiplier pour le plaisir de philosopher? A cet égard, l'oeuvre de Zamponi, Romain de naissance s'inscrit parfaitement dans le mouvement esthétique qui faisait rayonner la péninsule notamment avec la Camerata Bardi. Si bien que la verve, les ensembles, les climax nous semblent déjà familiers. Et combien délectable s'avère pareille résurrection! Grâce à des choix d'instrumentation et d'effectifs savoureux, colorés, surprenants. Grâce à un goût aussi raffiné que vivant dans la conduite musicale. Car c'est avec une attention sans faille, souplesse et équilibre que Léonardo Garcia Alarcon dirige ses remarquables interprètes de l'orchestre et du chant, ces dernier offrant une variété de styles, une maîtrise du récitatif comique, de la diction. A cet égard, soulignons le charme rare d'une instrumentation où voix et instrument ne font qu'un, rivalisant d'éloquence, de fraîcheur (scène de la coiffure de Circé CD2/ 5) et de suggestion faisant littéralement «voir» les formidables machines du décor. Fabuleuse re-création! Splendeurs du bel canto en sa prime jeunesse!
Bénédicte Palaux Simonnet

Son 10 - Livret 10 - Répertoire 10 - Interprétation 10

 

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