Le Septembre Musical de Montreux

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Pour le concert d’ouverture de ce festival, son directeur, Tobias Richter, a fait appel à l’Orchestre de la Suisse Romande et à son chef titulaire, Neeme Järvi. Par rapport à ce que l’on a entendu à Genève au cours de la dernière saison, l’OSR a montré une rare cohésion de ses registres dans l’ensemble du programme. La pianiste Elisabeth Leonskaja en était la soliste ; mais dans le Concerto en la mineur d’Edvard Grieg, son jeu a paru anguleux par la raideur du trait dans l’attaque des passages en accords ; mais l’adagio a révélé de plus tendres coloris qui ont donné ensuite fluidité à ‘Feux d’artifice’, le dernier des Préludes du 2ème Livre de Claude Debussy. En seconde partie, la Symphonie n.5 en si bémol majeur op.100 de Serge Prokofiev a pris une solennité grandiose que corrodaient les bois acidulés. En bis, un Andante festivo de Jan Sibelius, tout aussi impressionnant.
Samedi 31 août Orchestre de la Suisse romande /direction : Neeme Järvi soliste : Elisabeth Leonskaja, piano

Un phénomène du piano vous propose, à l’âge de vingt-deux ans, sa propre Sonate en quatre mouvements : technique faramineuse, ‘forte’ cataclysmiques, inspiration tributaire de Rachmaninov, Medtner, Lyapounov : y a-t-il pour autant une ‘vraie’ musique dans ce fatras ? Il y en eut ensuite dans trois des ‘Contes de fées’ de Nikolai Medtner, de facture poétique souvent émouvante. Retour à l’exagération sonore avec la transcription de trois pages de ‘L’Oiseau de feu’ par Guido Agosti (Danse infernale de Katchei – Berceuse – Finale). En seconde partie, changement de programme : à la place des Vingt-quatre Préludes de Chopin, une page de Sergey Rachmaninov, les Variations sur un thème de Chopin, basées sur le 20ème Prélude en ut mineur ; et c’est là que l’artiste donne le meilleur de lui-même, alors que l’enchaînement de certains numéros de l’opus 28 (21 à 24, 7 à 9, 15-16) montre une distance interprétative par rapport à Chopin.
Dimanche 1er septembre récital Daniil Trifonov

Depuis six ans, le Royal Philharmonic Orchestra est la formation en résidence au Festival de Montreux. Charles Dutoit en est le chef principal et le directeur artistique. Cette année, trois programmes très diversifiés, dont le clou a été ‘Le Sacre du Printemps’, l’un des chevaux de bataille du maestro qui, dans une lecture époustouflante, réussit à mettre en évidence certains traits, jamais perçus auparavant ; et quelle virulence dynamique à vous faire décoller de votre siège ! L’on en dira autant du Boléro de Ravel et de ‘La Mer’, grisante d’intensité expressive. Au niveau des solistes, est intervenu d’abord le pianiste russe Kirill Gerstein avec un Deuxième Concerto de Rachmaninov, maîtrisé techniquement mais exsangue d’inspiration. Martha Argerich est exceptionnelle dans un Premier de Beethoven, rattaché à une clarté dix-huitiémiste par la précision du jeu perlé et l’énergie indomptable qui sous-tendront ensuite le bis, ‘Traumeswirren’ des ‘Fantasiestücke’ op.12 de Schumann, hallucinant. Renaud Capuçon a présenté la Symphonie Espagnole de Lalo dans une sonorité au grain corsé, propre à l’école française de violon du début XXème siècle. Et la particularité de ce cycle a été constituée par ‘Le Château de Barbe-Bleue’ de Bela Bartok, présenté en version de concert : alors qu’est choisi le texte original hongrois avec de convaincants interprètes, le mezzo Andrea Melath et la basse Balint Szabo, pourquoi priver le public d’une traduction française, le laissant pantois devant un monument dont le chef restituait la farouche grandeur ?
Jeudi 5 , Samedi 7, Dimanche 8 Septembre le Royal Philharmonic Orchestra de Londres ou le sacre de Charles Dutoit

Paul-André Demierre

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