Les Sonates pour violon et piano de Paul Hindemith

par

Paul Hindemith (1895-1963) : Intégrale des Sonates pour violon et piano
Jill Lawson, piano – Eliot Lawson, violon
2014-DDD-53’56-Texte de présentation en anglais-Brillant Classics-94741

L’œuvre de Paul Hindemith serait-elle occupée -enfin- à prendre le chemin des studios d’enregistrements ? Après les excellentes parutions d’Antoine Tamestit, Paavo Jarvï, Christoph Eschenbach, Marcus Creed et d’autres, Eliot et Jill Lawson se lancent dans l’interprétation des quatre Sonates pour violon et piano du compositeur allemand. Enregistrées dans l’excellente acoustique du studio de Flagey, les quatre pièces s’étalent sur deux périodes de la vie d’Hindemith : la première, 1918, voit un jeune compositeur émerger parmi les grands noms du moment, à savoir Stravinsky, Debussy, Schönberg… Les deux Sonates opus 11voient donc le jour dans un contexte musical et politique confus. Quelques couleurs romantiques touchent la première sonate où le langage n’est pas si éloigné de Reger ou Strauss. La seconde, plus longue, est déjà plus franche et dynamique avec les premier et dernier mouvements. Les structures sont abouties et le rapport violon/piano est toujours intelligemment conduit. Il faudra attendre 1935, seconde période, pour l’ébauche d’une nouvelle œuvre avec violon (pour rappel, Hindemith se consacre davantage à l’alto durant cette longue période). D’un lyrisme poignant et d’un style d’écriture plus novateur, la Sonate en mi est moderne et proche des grandes œuvres symphoniques du compositeur. Dans une période troublée, notamment par la censure des autorités allemandes qui poussent Hindemith à émigrer aux Etats-Unis, la dernière sonate est écrite en 1939 et présente une forme plus traditionnelle en trois mouvements. La double fugue, par ses différents motifs, est d’une richesse contrapuntique absolue tandis que le second mouvement se compose de motifs mélodiques lyriques dans une rythmique parfois déroutante. L’interprétation des frère et sœur Lawson rend justice à la musique de chambre d’Hindemith. Son riche, plein et profond. La pianiste accompagne le violon avec une finesse remarquable tandis que le dialogue semble naturel entre les deux artistes. Eliot Lawson joue d’un archet précis avec une approche des dynamiques et nuances convaincante. Belle compréhension du langage d’Hindemith et structure générale aboutie avec une direction rudement bien menée. Accompagné d’un très beau texte de Michel Stockhem (uniquement en anglais), ce nouveau disque consacré à Hindemith est une réussite et un pari risqué, mais réussi. Pour notre plus grand plaisir, les Lawson rendent un bel hommage à ce compositeur encore dans l’ombre,  dont nous avons célébré en 2013 les cinquante ans de sa mort.
Ayrton Desimpelaere

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 9

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