Maria Callas, la Voix Totale

Il semblerait incroyable de ne point consacrer une ligne à La Callas lorsqu'on se consacre à la voix! Au-delà des mille visages déjà surpris au détour d'une interprétation, au-delà des mille autres à découvrir à chaque fois, La Callas nous entraîne immanquablement par immersion complète, dans l'univers de la vocalité. Couronnée du titre de Voix totale tant son registre, ses couleurs, son expressivité lui assuraient un libre accès à tous les répertoires, à tous les rôles, la cantatrice a brillé par sa polyvalence du son, polyvalence du mot.

Rappelant le phénomène de la soprano assoluta, soprano qui fit fortune à l'époque romantique et dont la voix absolue alliait le grave puissant et généreux de notre contralto actuel avec l'éclat et la brillance d'un soprano tel que nous l'entendons aujourd'hui. Soprano assoluta qui enclenchera le désir de monter le registre vers l'aigu et développera cette tension électrique des foules. Si les premiers contre-ut déjà entendus avec Haendel ou au fil des opéras de Keiser se voient dépassés quelques années plus tard par le contre-sol de Popoli di Tessaglia de Mozart, cette brusque première montée n'en est pas moins arrêtée net par le rééquilibrage rossinien dès le début du XIXe siècle. En conjuguant dans sa palette vocale unique, la conviction de ses héroïnes, la puissance de leur passion, la souplesse et la brillance d'un tempérament virtuose, La Callas nous offre en une voix, les couleurs variées de notre histoire du chant. Une voix totale pour embrasser des siècles de musique.
Claire Aubry

... à travers ses propos:

Quand je me dis: « Mon Dieu, je vais chanter ce soir, qu’est-ce qu’ils veulent de moi? Comment puis-je faire de mon mieux, mieux qu’hier et toujours mieux? », c’est un coup de fouet terrible. Je ne peux pas y échapper.

Vocalement, il y a des chanteuses qui font mieux que moi. Mais je donne au public quelque chose de différent, et il en est conscient. Je ne me contente pas de chanter mes rôles. Je les joue comme je les sens. Sur scène, il faut se laisser aller à l’émotion, oublier ce qu’on a préparé.

Il n’y a pas que l’exhibition vocale qui compte. A partir du moment où vous acceptez de monter sur scène, vous acceptez de tout exhiber, la voix, mais aussi le corps.

Si le public s’est attaché à moi, c’est parce que je lui ai offert la vérité, la mienne et la sienne. Les gens ne sont pas dupes. 

Maintenant j’ai peur. Le public m’a donné une situation splendide, unique au monde. Mais cela vous laisse très seule. Parce que la chute peut être tellement dure. La gloire elle-même fait peur, parce que l’on comprend que ce n’est pas naturel.

Je pense souvent à la mort, mais je n’en ai pas peur. Pourvu que je ne souffre pas. De quoi aurais-je peur ? La gloire ? Je ne lui fais pas confiance. Quand je mourrai, je pousserai un soupir de soulagement en me disant: « j’ai bien fait mon travail. J’ai été et je resterai la Callas.

Rencontre : José Van Dam