Mozart et Vieuxtemps au violon : un couplage intense

par

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour violon n°5 en la majeur K219
Henri Vieuxtemps (1820-1881) : Concerto pour violon n°4 en ré mineur op. 31
Hilary Hahn (violon), Deutsche Kammerphilharmonie Bremen, dir.: Paavo Järvi
2015-DDD-59’53-Textes de présentation en anglais, allemand et français-Deutsche Grammophon 4793956 GH

A travers cet enregistrement, Hilary Hahn ne fait pas qu’interpréter deux concertos célèbres du répertoire : elle retrace avant tout son propre parcours. Lors d’un stage estival pour débutants, la jeune musicienne (5 ans) rencontre Klara Berkovich, ancien professeur à l’Ecole spécialisée pour jeunes talents musicaux de Saint-Pétersbourg. L’entente est immédiate, l’élève voit son professeur deux fois par semaine, un professeur qui en plus d’enseigner le violon emmène Hilary Hahn aux musées, l’oriente dans ses lectures… Avant d’intégrer le Curtis Institute of Music, la violoniste aborde le Concerto n°4 pour violon du compositeur belge, Vieuxtemps qui sera la dernière œuvre travaillée avec Klara Berkovich. Quelques mois plus tard, son nouveau professeur, Jascha Brodsky, lui même élève d’Eugène Ysaÿe dont le maître n’est autre que Vieuxtemps, entame son travail avec le Concerto n°5 de Mozart. Véritables fondements de son répertoire, elle les grave ici accompagné d’un chef et d’un orchestre qu’elle connaît bien : Paavo Järvi et la Deutsche Kammerphilharmonie Bremen.
Ce long parcours historique émouvant se fond à merveille dans le discours proposé par les artistes. Dans Mozart, s’apprécient notamment la pureté du son, le dialogue efficace avec l’orchestre et l’incroyable précision des contrastes, phrasés, dynamiques et respirations. Si tout semble parfait, il manquerait éventuellement un petit brin de folie dans les mouvements rapides. Pour Vieuxtemps, dont la forme se décompose en quatre mouvements comme une symphonie, les protagonistes semblent plus libérés. Dans un style beethovénien, ce concerto marque un trait d’union entre les traditions classique et romantique. L’effectif y est plus large, avec une grande palette de couleurs et requiert de chaque musicien une concentration maximale. Dans cette œuvre d’envergure, Paavo Järvi exploite à nouveau sa capacité à créer un discours imagé et coloré tout en maîtrisant le dialogue avec la soliste. Il amène les grands tutti avec dynamisme et souplesse tandis qu’il insuffle à l’orchestre l’envie d’aller dans le détail. Très naturellement, Hahn se projette dans l’œuvre et développe chaque ligne avec soin. Voilà un Concerto dont l’expressivité qui en découle ne peut provenir que d’une grande artiste, artiste dont la maturité artistique est intense.
Ayrton Desimpelaere

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 9.5

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