Festival de Peralada : un anniversaire au programme resserré

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Le Festival “Castel de Peralada” fondé en 1987 près de Figueras, dans le nord de la Catalogne, a proposé cette année une programmation resserrée et élaborée en tenant compte des contraintes imposées par le Corona. Le programme était étalé sur trois semaines, du 16 juillet au 1 août , principalement sur trois week ends, et le nombre des spectateurs réduit : 700 places à l’Auditorium, un espace de plein air, et 160 personnes à l’Eglesia del Carme au lieu de 300.

Comme chaque année, le programme proposait des spectacles de ballet -cette année le Béjart Ballet Lausanne-, des récitals lyriques avec, entre autres, le ténor Benjamin Bernheim, et des opéras en versions concertantes ou scéniques tel l’Orlando de Hândel avec le contre-ténor Xavier Sabata et Tosca de Puccini avec Sondra Radvanovsky, Jonas Kaufmann et Carlos Alvarez dirigés par Nicola Luisotti, une soirée venue en droite ligne du Teatro Real de Madrid.

J’avais choisi le dernier week end : un récital lyrique par l’éblouissante jeune soprano norvégienne Lise Davidsen, et Aminta et Fillide, une cantate de jeunesse de Händel présentée en théâtre vivant par William Christie et les voix fraîches des Arts Florissants. Pour couronner le Festival, le “Gala lyrique” en célébrait le 35e anniversaire.

Hélas, les circonstances en ont décidé autrement. Lise Davidsen, engagée cet été à Bayreuth pour Tannhäuser et Die Walküre, devait faire un aller-retour Allemagne-Espagne mais en décida finalement autrement : pas de récital à Peralada cet année ! Pas de Händel par les Arts Florissants non plus, du moins pour moi, car l’Eglesia del Carme ne pouvait contenir qu’un public restreint et je n’en fus pas. Dommage.

Composition musicale et condiments peuvent-ils faire bon ménage ?

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Jerzy Gablenz (1888-1937) : Concerto pour piano et orchestre en ré bémol majeur op. 25. Ignacy Jan Paderewski (1860-1941) : Fantaisie polonaise sur des thèmes originaux pour piano et orchestre op. 19. Jonathan Plowright, piano ; BBC Scottish Symphony Orchestra, direction Łukasz Borowicz. 2021. Notice en anglais, en français et en allemand. 66.27. Hypérion CDA68323.

Un précieux coffret de six CD pour le souvenir du violoniste Louis Kaufman

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Ernest Chausson (1855-1899) : Concert pour violon et quatuor à cordes op. 21. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Concerto pour violon et orchestre n° 3 op. 61 ; Havanaise op. 83. Bohuslav Martinú (1890-1959) : Sonate pour deux violons et piano H.123 ; Cinq Pièces brèves pour violon et piano H. 184. Richard Strauss (1864-1949) : Sonate pour violon et piano. Frederick Delius (1862-1934) : Sonate pour violon et piano n° 1. Darius Milhaud : Danse de Jacarémirim pour violon et piano op. 26 ; Concerto pour violon et orchestre n° 2 op. 63. Felix Menfdelssohn-Bartholdy (1809-1847) : Concerto pour violon et orchestre op. 64. César Franck : Sonate pour violon et piano. Samuel Barber (1910-1981) : Concerto pour violon et orchestre op. 14. Aaron Copland (1900-1990) : Sonate pour violon et piano. Robert Russell Bennett (1894-1981) : A Song Sonata, pour violon et piano ; Hexapoda, cinq études pour violon et piano. Camargo Guarnieri (1907-1993) : Sonate pour violon et piano n° 2. Quincy Porter (1897-1966) : Sonate pour violon et piano n° 2. Antonio Vivaldi (1678-1741) : Les Quatre Saisons ; Concertos pour violon et orchestre RV 178 et 332 ; Concerto pour deux violons et orchestre RV 513….Louis Kaufman, violon ; Peter Rybar, violon ; Artur Balsam, Pina Pozzi, Theodore Saidenberg, Paul Ulanowsky, Hélène Pignari, Aaron Copland et Robert Russell Bennett, piano ; Quatuor Pascal ; Orchestre Philharmonique Néerlandais, direction Mauritz van der Berg et Otto Ackermann ; Orchestre National de la Radiodiffusion française, direction Darius Milhaud ; Musical Masterpieces Symphony Orchestra, direction Walter Goehr ; The Concert Hall Orchestra, direction Henry Swoboda ; Orchestre symphonique de Winterthur, direction Clemens Dahindens. 1940-1954. Notice en allemand et en anglais. 414.30. Un coffret de six CD Profil Hänssler PH21019.

Riccardo Muti à l'occasion de son 80e anniversaire : " La vie est courte, l'art est long "

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Pour le 80e anniversaire du grand chef d'orchestre italien Riccardo Muti, Warner publie un coffret de célébration qui rassemble ses enregistrements symphoniques : l’occasion incontournable d’une conversation avec le Maestro. Notre collègue Nicola Cattò (Rédacteur en chef de Musica et Secrétaire général du Jury des International Classical Music Awards) l’a rencontré.

J'ai rencontré le Maestro Muti à la fin du mois de mai chez lui à Ravenne : après le long entretien, nous nous sommes rendus dans l'après-midi dans un charmant petit théâtre à quelques kilomètres, pour les répétitions de l'Orchestre Cherubini. Il s'agit du Teatro Socjale, inauguré il y a exactement 100 ans et construit à la demande de la coopérative locale des ouvriers agricoles. Muti qui, pendant le Festival de Ravenne, a inauguré un autre minuscule théâtre, celui de Marradi, entre l'Émilie et la Toscane, plaisante : J'avais l'habitude de diriger au Musikverein, maintenant je dirige au Piangipane ! Puis, plus sérieusement, il insiste sur l'importance de revitaliser les nombreux joyaux patrimoniaux disséminés dans toute l'Italie, en confiant leur gestion aux jeunes. Le 28 juillet, le Maestro a eu 80 ans, l'occasion de me remémorer sa longue carrière à la lumière du coffret Warner qui rassemble tous ses enregistrements symphoniques ex-EMI.

Comme cela s'est souvent produit lors de nos rencontres ces dernières années, la conversation commence très naturellement lorsque le maestro voit les couvertures des derniers numéros de notre magazine Musica : cette fois, son regard s'est posé sur Andrei Gavrilov, le protagoniste de plusieurs enregistrements du coffret Warner : les Concertos n°2, n°3 et la Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachmaninov et le Concerto n°1 de Tchaïkovski. C'est précisément en évoquant ce dernier enregistrement que Muti commence à parler du pianiste russe : Il est entré dans le studio, les musiciens du London Philharmonic étaient déjà sur scène, et il a immédiatement dit : Faisons un vrai Tchaïkovski, à la russe. Tout le monde était abasourdi, mais une fois qu'il s'est assis au clavier, on a immédiatement réalisé quel musicien il était ! Discutable, peut-être, mais techniquement splendide. Et des années plus tard, à Philadelphie pour nos enregistrements Rachmaninov, pour donner le “la” à l'orchestre, il a donné un énorme coup sur la touche du piano, si bien que j'ai dû descendre du podium, jouer la même note doucement et leur dire : C’est ceci que la soliste a voulu.

Toscanini :  la légende et le paradoxe (I) 

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Crescendo-Magazine reprend en quatre parties un dossier Toscanini rédigé par Bernard Postiau et publié dans ses numéros papiers. 

Arturo Toscanini ! Que d’images surgissent à ce nom : le dictateur colérique, le pourfendeur du fascisme, l’apôtre du respect total de la partition, le réformateur de l’opéra, le maître d’oeuvre de répétitions musclées où les baguettes sont brisées et les montres écrasées, l’homme aux jugements à l’emporte-pièce, l’artiste aussi, flamboyant, électrique, partisan de lectures hyper rapides et d’un tempo métronomique. Toscanini fut cela... et son contraire. Oui, car derrière ces images d’Epinal se cache une personnalité complexe, pleine de contradictions, capable de grandeur d’âme comme de la plus basse hypocrisie : un être tout ce qu’il y a de plus humain, en somme, un être banal par bien des côtés, méprisable ou attachant par d’autres. 

Le personnage lui-même est remarquable. « Petit, increvable, infatigable, incorruptible et inflexible » selon Angelo Scottini, son apparence était toujours impeccable : tiré à quatre épingles, la moustache toujours prête pour la bataille, les cheveux toujours artistiquement tirés vers l’arrière. Son regard, surtout, impressionne : celui d’un myope, peut-être, mais clair, brillant, plongeant droit dans ceux de son interlocuteur... ou du pauvre musicien auquel il s’adresse au cours d’une répétition. La description de Bertha Geissmar, qui fut la secrétaire de Furtwängler puis de Thomas Beecham, résume à elle seule le magnétisme que le maestro exerçait sur ceux qui l’approchaient : « Quiconque a parlé avec Toscanini ne pourra jamais oublier l’extrême intensité de l’expression d’un visage frappant d’élégance. Ses yeux brillants, étincelants, sont pleins de feu et révèlent la résolution de son tempérament, une vitalité tempérée pourtant par une inclinaison à une étrange et obsédante rêverie. Sa manière de parler apparaît résolue, elle aussi, et il accompagne ses paroles de gestes brefs et décidés ».

Pourtant, et aussi étrange que cela puisse paraître, il conservera toujours, vis-à-vis de lui-même, une lucidité et même une forme de modestie presque désarmante : « Je ne suis qu’un honnête musicien » répétera-t-il à des « fans » trop enthousiastes. Ou, encore, ce stupéfiant témoignage, en 1938 : « Je ne sais comment j’arrive à faire de la musique avec mon cerveau. Peut-être est-ce à force d’habitude de diriger des notes que je le fais inconsciemment et, inconsciemment, le public est tellement habitué à me croire capable qu’il persiste dans son erreur ! ».

CPE Bach : au-delà des limites et survolté

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Beyond The Limits/Au-delà des limites. Carl Philipp Emanuel Bach (1714-1788) : Intégrale des symphonies pour cordes. Six symphonies, Wq. 182 (1773) et Symphonie, Wq. 177 (1759). Gli Incogniti, violon et direction :  Amandine Beyer. 2021. Textes de présentation en français, anglais et allemand. 71’11. Harmonia Mundi  HMM 905321