« À l’extrême bord du monde », Rencontre avec Harold Noben et Benoît Mernier

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À l’extrême bord du monde, un opéra de chambre composé par Harold Noben dans le cadre d’un projet ENOA en collaboration avec la Chapelle musicale Reine Elisabeth, sous la guidance de Benoît Mernier. Compte-rendu d’une rencontre, à la terrasse du Belga à Flagey par un matin d’automne naissant, avec deux compositeurs à la croisée de leurs chemins.

C’est en 2018 que le pianiste et compositeur Harold Noben pose sa candidature pour participer à un nouveau projet pédagogique de la Chapelle musicale Reine Elisabeth autour de la création. Celle-ci souhaitait en effet organiser, en partenariat avec ENOA, des résidences pour jeunes compositeurs. L’idée originelle de Bernard de Launoit était de proposer un travail avec les chanteurs et instrumentistes de la Chapelle, sous forme d’un laboratoire en temps réel, guidé par un mentor spécialisé dans l’écriture pour la voix : Benoît Mernier. Ce qui devait être au départ un projet modeste avec la simple restitution d’un travail d’écriture à la clé, a finalement pris la forme aboutie d’une production d’opéra de chambre, pour mezzo-soprano, ténor et quatuor à clavier. Le public est attendu pour la découvrir le 4 octobre à 15h à au Théâtre Royal de La Monnaie, dans une mise en scène de Mien Bogaert. 

Symphonie pour un cerveau, un documentaire avec Michel Cymès et Alain Altinoglu 

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Les nouveaux documentaires sur des artistes musicaux de notre temps sont rares et les documentaires musicaux avec des thématiques transversales à partir de la musique classique sont encore plus rares. C’est dans ce contexte qu’il faut saluer Symphonie pour un cerveau, un documentaire de Michel Cymes, François Dru et Jean-Pierre Devillers, réalisé par Jean-Pierre Devillers, réalisateur multi-primé pour ses nombreux documentaires culturels. 

Pour ce film, le célèbre Docteur Michel Cymes et le chef d’orchestre Alain Altinoglu dissèquent le cerveau de cette profession souvent fantasmée mais si méconnue, et la totalité des compétences qu’elle requiert. L’opération musicale explore : neurologie, ORL, physiologie, imageries médicales, leadership,... pour répondre à cette question : que se passe-t-il dans le cerveau d’un chef quand il dirige ?  

Une (re)découverte bienvenue : Görge le rêveur à Nancy

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Quelle belle soirée, musicale, vocale et scénique. Mais avant de justifier cette affirmation heureuse, il est, je pense, nécessaire de s’attarder un peu sur la genèse de ce Görge le rêveur.

 C’est un opéra d’Alexander von Zemlinsky (1871-1942) dont on connaît peut-être Le Nain, Le Roi Candaule et Une Tragédie florentine, des œuvres peu représentées… sinon à Nancy justement ! Chef d’orchestre applaudi et professeur reconnu, Zemlinsky fut très proche de Schönberg (devenant même son beau-frère) qu’il ne suivra cependant pas dans ses innovations radicales (cet opéra en est la preuve). Il sera aussi l’ami de Gustav Mahler. Menacé par l’arrivée au pouvoir des nazis, il devra s’exiler aux USA. Il y mourra.

C’est justement Mahler, alors directeur de l’Opéra de Vienne, qui, en 1906, lui passe commande de l’œuvre. Mais Mahler quitte Vienne et l’œuvre n’intéresse pas le nouveau directeur. On va l’oublier longtemps : il faudra attendre octobre 1980 pour qu’elle soit enfin créée à l’Opéra de Nuremberg. L’Opéra de Lorraine, en coproduction avec l’Opéra de Dijon, en assure la première représentation en France.

Une invitation au Gaumont Palace en 1939,  avec son orgue de cinéma et son orchestre

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Oscar STRAUS (1870-1954) : Trois Valses, pour orchestre et orgue. Guy LAFARGE (1904-1990) : Dans le bois, pour orgue et violon, arrangement Ghestem /Tzipine. Nikolaï RIMSKY-KORSAKOV (1844-1908) : Chant indou, pour orgue et violon, arrangement Ghestem/Tzipine. Franz SCHUBERT (1797-1828) : Fantaisie sur divers thèmes, arrangement Salabert. Eric COATES (1886-1957) : Les Oiseaux dans le soir, pour orgue et violon, arrangement Ghestem/Tzipine. Robert PLANQUETTE (1848-1903) : Les Cloches de Corneville, arrangement Faustin Jeanjean. Frédéric CHOPIN (1810-1849) : Tristesse, pour orgue et orchestre, arrangement Ghestem. Jacques OFFENBACH (1819-1880) : Orphée aux enfers pour orgue et orchestre, arrangement non mentionné. Paul MISRAKI (1908-1998) : Dans mon cœur, pour orgue et violon, arrangement Ghestem/Tzipine. JOËGUY : Le Carillonneur de Bruges, pour orgue et violon, arrangement Ghestem/Tzipine. Maurice RAVEL (1875-1937) : Boléro, pour orgue et orchestre. Edvard GRIEG (1843-1907) : Chanson de Solveig, pour orgue et violon, arrangement Ghestem/Tzipine. Franz von VESCSEY (1893-1935) : Chanson du souvenir « Valse triste », arrangement Ghestem/Tzipine. Georges GERSHWIN (1898-1937) : Rhapsody in Blue, arrangement Ferde Grofé, version pour orgue et orchestre. Raoul Gola, piano ; George Ghestem, orgue ; Orchestre du Gaumont-Palace, Georges Tzipine, violon et direction. 1939. Livret en français. 60.03. Hortus 160. 

Les tops du mois  : octobre 2020

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Cette sélection des concerts du mois d’octobre prend encore un aspect un peu particulier. Devant les incertitudes liées à la pandémie, les annulations et les changements de distributions, il n’est pas sûr que les concerts puissent avoir lieu avec les programmes et les artistes annoncés. Cela étant, les organisateurs de concerts rivalisent de panache pour continuer de proposer des évènements. Cette sélection, en rien exhaustive, est un choix de la Rédaction de Crescendo. 

À Bruxelles, le Belgian National Orchestra sera le fer de lance musical du Palais des Beaux-Arts avec la venue du surdoué David Afkham dans Brahms et Beethoven (9/10) et d'Anthony Hermus en remplacement de Dalia Stasevska (16/10). Enfin, notre compatriote David Reiland sera au pupitre du BNO et du Choeur Octopus pour un concert de Toussaint avec le Requiem de Mozart (30/10 et 1/11). 

Du côté du Brussels Philharmonic, on repense Mahler avec un programme qui propose “l'Abschied” du Lied von der Erde dans la transcription chambriste d’Arnold Schoenberg, et “l’Adagietto” de la Symphonie n°5 en miroir avec Within her Arms d’Anna Clyne. C’est à Flagey et au Concertgebouw de Bruges entre le 2 et le 4 octobre. À Flagey, on ne ratera sous aucun prétexte le concert Brahms par le Collegium Vocale de Gand et le pianiste Nelson Goerner (31/10).

Richard Strauss, un bourgeois de Munich (1)

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Crescendo Magazine continue de reprendre les dossiers publiés dans ses éditions papiers. Nous mettons en ligne mais en épisodes, un dossier rédigé par Bernard Postiau.

Un des paradoxes de Richard Strauss, et non des moindres, est d'être pour célèbre pour ses poèmes symphoniques plus que pour le reste de son œuvre, en particulier les opéras. De ceux-ci, on ne retient généralement que les valses du Rosenkavalier, la "Danse des sept voiles" de Salomé et les titres de deux ou trois autres: Elektra, Capriccio... Et pourtant, si l'on passe en revue l'ensemble de la création du maître bavarois, force est de constater que l'opéra occupe une position centrale et essentielle dans son activité créatrice. Tous ses autres opus peuvent être vus, à des degrés divers, comme un travail préparatoire à ses partitions lyriques ou comme des objets satellites, périphériques, plus ou moins dérivés de celles-ci. L'attrait irrésistible de Richard Strauss pour le théâtre -et pour la voix féminine en particulier- n'a cependant rien d'inné: de nombreuses années d'apprentissage s'écouleront avant qu'il produise une œuvre lyrique présentable -ce sera Guntram- et d'autres encore avant d'acquérir un style propre, débarrassé de la majorité des "tics" wagnériens. Il créera alors Salomé. La maturité aidant, il trouvera son style définitif dans un certain retour au classicisme et Der Rosenkavalier en est l'une des premières expressions.

Rien ou presque dans les compositions du jeune Strauss ne laisse présager le rôle primordial que prendra l'opéra dans sa vie. Ses premiers essais relèvent du piano et de la musique de chambre, davantage des exercices "à la manière de". Même s'il écrit relativement tôt pour l'orchestre, il faudra attendre 1886, quinze ans après ses débuts, pour voir naître une création vraiment personnelle: Aus Italien. *

A la Scala, un gala pour ouvrir la saison de ballet

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Le Ballet de la Scala, reprend une activité en organisant, pour quatre représentations, une soirée de gala où figurent les étoiles de la compagnie, la section masculine des danseurs et l’Orchestre de la maison dirigé par un expert en la matière, le maestro David Coleman. 

Le rideau se lève sur un extrait de l’acte II du Corsaire de Riccardo Drigo et de divers musiciens. Immortalisée comme Pas de deux par le couple Margot Fonteyn-Rudolf Nureyev, cette page brillante est devenue un Pas de trois dans la version qu’Anna-Marie Holmes a conçue pour l’English National Opera et qui est utilisée ici. Le second rôle de l’esclave Ali s’en trouve renforcé, ce dont profite le jeune Mattia Semperboni pour faire valoir ses capacités techniques face au danseur de caractère qu’est le Conrad de Marco Agostino, au demeurant remarquable ; mais tous deux se partagent les faveurs de Medora campée par Martina Arduino qui n’est qu’élégance au gré d’un rubato subtil. 

Il y a six mois, le chorégraphe Mauro Bigonzetti devait faire découvrir, sur une musique de Fabio Vacchi, une création, Madina, qui a été annulée temporairement à cause de l’émergence de l’épidémie. En lieu et place, il a accepté l’opportunité d’une nouveauté de dernière minute, Do a duet ; sur les six minutes de l’Allegro con brio ouvrant la 25e Symphonie en sol mineur K. 183 de Mozart, il met dos à dos deux ballerines en tutu noir, Antonella Albano et Maria Celeste Losa, mijaurées cocasses qui se toisent à coup de mimiques outrées et de gestes saccadés.

Beethoven à Monte-Carlo 

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La rentrée est beethovenienne avec l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo et Kazuki Yamada, son directeur musical et artistique. Une rentrée particulière car elle est marquée par la prolongation de trois saisons de son engagement à ce poste, et la sortie de deux nouveaux titres sous le label OPMC Classics : les Symphonies n°1 et n°3 de Mendelssohn et le Requiem et Cantique de Jean Racine de Gabriel Fauré. Mais c’est Beethoven qui nous retient pour ces concerts d’ouverture de saison. 

Le premier concert au Grimaldi Forum propose, avec l'ouverture Léonore n°3, le Triple concerto pour violon, violoncelle et piano et la Symphonie n°3. Dans le Triple concerto, l’équipe musicale se compose de Antje Weithaas au violon, Marie-Elisabeth Hecker au violoncelle et Martin Helmchen au piano. Les musiciens varient les atmosphères et les couleurs et chantent tous les trois en une ample respiration, bien secondés par le chef. Seul au pupitre, Kazuki Yamada qui excelle, fascine et émerveille dans le répertoire français des XIXe et XXe siècles, est moins à son affaire dans les oeuvres classiques. Certes, la Symphonie n°3 "Eroica" de Beethoven est très fidèlement interprétée, mais cela manque de marques personnelles.  Nous n'arrivons pas à oublier les interprétations puissantes et dramatiques des symphonies de Beethoven avec le même orchestre et le regretté Yakov Kreizberg.