Rossini à 17 ans!

par

Gioachino ROSSINI (1792-1868)
Demetrio e Polibio

Maria Jose MORENO (Lisinga), Victoria ZAYTSEVA (Demetrio-Siveno), Yijie SHI (Demetrio-Eumene), Mirco PALAZZI (Polibio), Orchestre Sinfonica G.Rossini, Prague Chamber Choir, dir.:Corrado ROVARIS, mise en scène: Davide LIVERMORE
2010-live-115' +14' bonus- PCM Stereo- DD 5.1 -16:9- DVD 9 - NTSC- Sous-titres en italien, anglais, français, allemand, espagnol, coréen-chanté en italien- ARTHAUS Musik 101 647
Une liturgie de bougies volantes, des pompiers, des agents de sécurité armés de torches, des héros/spectres doublés par des danseurs, un décor de coulisses ou de pressing géant (?), des costumes affreux -une perruque choucroute blonde sur un chanteur chinois!- sur un canevas typiquement seria (un roi syrien et l'autre parthe se disputent la paternité d'un fils -rôle travesti amoureux de la fille de l'autre)... Ce qui était un essai de jeunesse -Rossini avait 17 ans!- élaboré à partir de quelques airs au sein d'une famille de chanteurs virtuoses, les Mombelli, avait-il vraiment besoin d'être «étoffé» de tant de complications scéniques ?
Mais si Pesaro (2010) a choisi de représenter ce «coup d'essai» qui est aussi un «coup de maître» c'est, au moins, pour une bonne raison: le grand Rossini -celui d'après 1812- y pointe déjà l'oreille en quelques airs bien venus (Demetrio, de' Siri Re potente au Ier Acte et plus encore Donami omai Siveno au IIe).
Il y a également là bien des péchés de jeunesse, des facilités stylistiques, des notes attendues qui, justement, arrivent. Des vocalises à profusion qui ne paraissent pas toujours correspondre à la nécessité du sentiment, voire des réminiscences de compositeurs précédents -Mozart et Cimarossa notamment.
Par ailleurs, le fameux ténor Mombelli (rencontré par le jeune compositeur alors âgé 13 ans) y a mis aussi la main et, comme il avait deux filles, Rossini écrivit aussi pour elles: Esther (18 ans ) plus expérimentée et qui devait avoir sa préférence si l'on considère la quantité d'airs qui lui sont dédiés, et Anna (17 ans) dont la voix de mezzo et la technique devaient être tout de même déjà fort accomplies au vu de ses interventions, tout aussi virtuoses.
En conclusion? Un instant précieux pour les Rossinophiles, mais franchement desservi par une mise en scène qui cherche à en rajouter là où il suffisait de laisser parler la musique et la jeunesse. Heureusement, la partition s'impose en dépit d'un orchestre moyen et d'un chef peu engagé semble-t-il. Au tomber de rideau, les chanteurs dont la vaillance physique et vocale est mise à rude épreuve sont plus chaudement applaudis que pendant la représentation. Les trois principaux rôles déjà: Mirco Palazzi (Polibio), Yijie Shi (Demetrio-Eumene), Victoria Zaytseva (Demetrio-Siveno) étonnée avec raison d'être si peu saluée alors qu'elle s'est montrée bonne musicienne autant qu'actrice, tandis que Maria José Moreno accapare tous les bravos -avec raison et justice...
Les cadrages ne flattent guère les interprètes, laissant des espaces vides d'où émerge la tête du chef d'orchestre jouant des sémaphores. De plus, l'image sombre et le montage mollasson ne font que renforcer la laideur et la vacuité de la mise en scène. Quelques vues sympathiques du festival dans le bonus. Pour passionnés.
Bénédicte Palaux Simonnet
Son 6 - Livret 8 - Répertoire 7 - Interprétation 8 - Mise en scène 3

Les commentaires sont clos.