Si vous entendez un type jouer du blues, c’est parce qu’il a de bonnes raisons de le faire

par

Bluebird, Tristan Koëgel, Didier jeunesse
Minnie, c’est la fille du songster. Celui qui joue de la guitare avec son canif, qui chante le blues comme personne et qui use ses souliers sur les routes, toujours par monts et par vaux à travers le Mississipi. La petite ne quitte pas son père, ni des yeux, ni du cœur et l’accompagne à l’harmonica.
Dans les années 1940, même black, même pauvre, on pouvait encore survivre en chantant. A condition de ne pas se faire remarquer. De ne pas attirer l’attention. Car il n’est pas loin encore le temps de l’esclavage et des cueilleurs de coton. Les plantations sont restées ce qu’elles étaient. Les rôles sont clairement distribués, les riches dominent et les pauvres triment pour rembourser d’improbables dettes. Et il ne fait pas bon s’opposer au contremaître si on veut vivre sans coups et sans peur. Pour les ouvriers, il ne reste que les chants de travail, le soir autour du feu. Chacun a son instrument. Tous avec leur voix. Ensemble, ils font de leur peine une musique merveilleuse et vibrante.
Sur un chemin, Minnie s’est blessée. Elle trouve refuge chez un Papy qui devient le sien. Le songster travaille pour payer leur gîte et la collectivité prend soin de l’adolescente. Les voilà adoptés par une famille, entourés de bonne chaleur mais dans une vie qu’ils n’ont pas choisie. Minnie rêve de disques qu’elle enregistrerait et son père de grands espaces et de liberté.
Si la vie était comme dans les songes, comme dans les livres, ça se saurait, non ? La leur va basculer parce que le père se trouve là où il ne devait pas et que le fils du contremaître tombe amoureux de la joueuse d’harmonica.
Puis l’auteur change de personnage et tout se transforme. Celui que l’on craignait a finalement des sentiments et l’histoire n’est plus ce qu’on en pensait. Elle prend une autre dimension.
Seul le blues lancinant continue au fil des pages et accompagne notre lecture pour découvrir cette Amérique heureusement révolue mais pas encore si lointaine.
Deborah Danblon

Les commentaires sont clos.