Siegfried dominé par les images...

par

Richard Wagner (1813 – 1883)
Siegfried

Lance Ryan (Siegfried), Peter Bronder (Mime), Terje Stensvold (Wanderer), Johannes Martin Kränzle (Alberich), Alexander Tsymbalyuk (Fafner), Anna Larsson (Erda), Nina Stemme (Brünnhilde), Rinnat Moriah/Viviana Guadalupi (Waldvogel). Orchestre de la Scala de Milan. Direction musicale: Daniel Barenboim.
Mise en scène: Guy Cassiers. Décor et lumières: Enrico Bagnoli. Costumes: Tim van Steenbergen. Vidéo: Arjen Klerkx, Kurt D’haeseleer. Chorégraphie : Sidi Larbi Cherkaoui - Arthaus Musik 101695-253’
Enregistré à Milan en octobre 2012, ce spectacle est un maillon du Ring coproduit par la Scala (Milan) et le Staatsoper unter den Linden de Berlin, en collaboration avec le Toneelhuis d’Anvers. C’est en effet Guy Cassiers, le directeur artistique du théâtre anversois qui, avec son équipe habituelle, a assuré la mise en scène du cycle. Le public milanais l’a généralement accueilli avec bienveillance, sans doute parce que Cassiers n’a pas imposé un «Konzept» : il raconte l’histoire de manière directe, l’illustrant de beaucoup d’images changeantes. Le côté visuel de ce Siegfried est en effet impressionnant. Dommage que le second acte soit, pour la plus grande partie, plongé dans l'obscurité. Et, bien sûr, il n’est pas possible d’avoir tout le temps une vue globale de la scène et de l’interaction des protagonistes. Par ailleurs, les gros plans ne sont pas toujours flatteurs pour les chanteurs ni parfois pour le décor. Le rocher de Brünnhilde a bien piètre allure. Siegfried, costume de cuir noir et longs cheveux au vent brandit son glaive ; le Wanderer en long manteau, chapeau sur la tête, porte sa lance et Mime, avec ses lunettes sur le nez, ressemble à un fonctionnaire appliqué ; l’oiseau est représenté par une jolie fille et chanté par une autre, Brünnhilde et Erda sont habillées de robes signées Tim van Steenbergen et Sidi Larbi Cherkaoui fait évoluer cinq danseurs comme une garde personnelle autour de Siegfried qui vient de tuer Fafner.
Musicalement, le spectacle est plus intéressant : Daniel Barenboim conduit l’excellent orchestre de la Scala dans une exécution bien équilibrée et pleine d’élan dramatique. Il y a les moments poétiques du second acte, la force orchestrale de l’introduction du troisième et l’exaltation de la scène finale. Lance Ryan est un Siegfried crédible visuellement et son ténor est souple, peut-être pas très fourni dans le médium, mais il triomphe des écueils et tient le coup jusqu’à la fin où il est confronté à l’impressionnante Brünnhilde de Nina Stemme, fraîchement réveillée! La soprano déploie sa voix riche et pleine de nuances dans son évolution de la vierge craintive à la femme aimante. Anna Larsson est une Erda bien sonore et Peter Bronder un excellent Mime avec une belle projection du texte. Terje Stensvold donne de l’allure au Wandere mais la voix montre des signes de fatigue. L’Alberich de Johannes Martin Kränzle pourrait avoir plus de mordant et Alexander Tsymbalyuk offre à Fafner des sons caverneux. Le Waldvogl est servi par la voix fraîche de Rinnat Moriah et Viviana Guadalupi lui donne une forme séduisante.
Le public milanais a accueilli tous les protagonistes avec des applaudissements fournis.
Erna Metdepenninghen

Les commentaires sont clos.