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Au Covent Garden, une contestable Theodora de Handel

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George Frideric Handel (1685-1759) : Theodora, oratorio en trois actes. Julia Bullock (Theodora), Joyce DiDonato (Irene), Jakub Józef Orliński (Didymus), Ed Lyon (Septimius), Gyula Orendt (Valens), Thando Mjandana (Marcus) ; Chœurs et Orchestre du Royal Opera House, direction Harry Bicket. 2022. Pas de notice ; bref synopsis en anglais. Sous-titres en anglais, en français, en allemand, en japonais et en coréen. 189’00’’. Un DVD Opus Arte OA1368D. Aussi disponible en Blu Ray.

Un monstre d’orgueil et d’ambition« Henri VIII » de Camille Saint-Saëns

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Un monstre d’orgueil et d’ambition, tel est le Henri VIII magistralement incarné par Lionel Lhote, tel est le Henri VIII que nous propose le metteur en scène Olivier Py.

Henri VIII est un opéra de Camille Saint-Saëns, créé à l’Académie nationale de musique de Paris (aujourd’hui Opéra de Paris) le 5 mars 1883. Un opéra rarement représenté : cette saison, « all over the world », il ne sera à l’affiche que pour cette production bruxelloise ! C’est dire. 

Justifie-t-il ce désintérêt ? Mérite-t-il cette sorte d’exhumation ? Oui et non. C’est une œuvre musicalement bienvenue, de belle orchestration, de belle instrumentation. Et l’on comprend le bonheur d’Alain Altinoglu de nous la faire découvrir. De nous la faire bien découvrir dans la mesure où, très bien suivi par un Orchestre de la Monnaie qu’il a manifestement convaincu et stimulé, il en exalte les richesses. Mais c’est une œuvre qui n’a pas la tension de ces grands chefs-d’œuvre lyriques qui nous emportent inexorablement dans leur déferlement ou qui nous marquent à jamais par l’un ou l’autre épisode de leur partition. 

Elle nous confronte donc à cet Henri VIII dont nous savons tous par infusion culturelle qu’il s’est marié six fois, et que d’ailleurs l’un de ces mariages a provoqué le schisme anglican. Cet Henri VIII dont nous reconnaissons à l’instant le portrait peint par Holbein. Le livret, qui prend des libertés avec l’Histoire, nous invite à le rejoindre au moment où il répudie Catherine d’Aragon, la remplace par Anne de Boleyn et de ce fait quitte l’Eglise romaine avec fracas. Ce livret insère un certain Don Gomez de Féria, ambassadeur espagnol auprès de la Cour d’Angleterre, amant dorénavant rejeté par Anne de Boleyn, mais pour qui elle avait écrit une lettre d’instante recommandation auprès de la reine aujourd’hui ostracisée, une lettre qui pourrait compromettre sa merveilleuse ascension (« l’humble fille d’hier sera reine demain »). Un livret assez linéaire en fait et qui n’abonde guère en « coups d’opéra ».

Olivier Py s’en est emparé dans une mise en scène dont tous les aspects visent à faire du monarque un monstre d’orgueil et d’ambition, un cynique jouant sur tous les tableaux, de la séduction à la menace sans appel (Ses derniers mots : « si j’apprends qu’on s’est raillé de moi, la hache désormais »). 

La première séquence est si révélatrice : Henri VIII entre sur le plateau vêtu d’une redingote noire. Un photographe s’installe. On revêt le monarque d’un manteau et d’un chapeau d’apparat. Henri VIII, tel que l’a imposé pour l’éternité le portrait d’Holbein. Photo. Plus tard, une autre photo, tout aussi majestueuse, sur un faux cheval. Plus tard encore, au début du troisième acte, le roi entre en scène… sur un vrai cheval, incroyable tribune pour des paroles d’autorité et de décisions sans appel.

Souvent, alors que les autres protagonistes sont à l’avant-plan, il est là, à l’affût, à l’écoute. Et même, le voilà batifolant avec une dame d’honneur d’Anne de Boleyn, en négation méchamment ironique de ses grands serments d’affection et de prédilection.

Tout cela s’inscrivant dans une scénographie et des costumes de Pierre-André Weitz, le complice au long cours de Py, qui nous plongent dans un univers surdimensionné, majestueux, dont le noir typique permet des contrastes éclatants avec certains vêtements rouges ou blancs.

Olivier Py est un incontestable créateur de tableaux scéniques époustouflants. Ainsi, la séquence du synode qui se conclura par le schisme : masse rouge vif des prélats rassemblés se métamorphosant, chasubles retirées, en peuple acclamant son roi (un grand moment pour les chœurs !).

Mais Olivier Py, ce sont aussi, qui m’ont moins convaincu, ses éternels beaux jeunes gens quasi dénudés (mais cette fois, un seul « tout nu » : a-t-il été tiré au sort ou l’a-t-il voulu ?) qui doublent les séquences ou en anticipent des réalités futures. C’est aussi ce que j’appellerai un caprice de metteur en scène : cette locomotive qui, au début du deuxième tableau du quatrième acte, surgit sur le plateau en défonçant un mur, tout cela pour dire qu’on est parti à la campagne… Ce sont aussi des séquences chorégraphiées (par Ivo Bauchiero), obligées par le genre certes, dont j’interroge la signification et l’intérêt (mais cette réticence est peut-être liée à ma relation personnelle à la danse).

Mais si cet Henri VIII restera dans notre souvenir, ce sera, et c’est essentiel en l’occurrence, grâce à celui qui l’incarne : Lionel Lhote. Il est, vocalement et scéniquement, le monstre d’orgueil et d’ambition de son personnage. Quelle rage, quelle séduction doucereuse, quelle conviction, quelles menaces dans les intonations de sa voix, dans la conduite et la maîtrise de son chant. Et son jeu corporel est alors comme le prolongement, comme l’exacte visualisation de ce qu’il nous donne à entendre. Quelle maturité ! 

Le Tour d’écrou de Benjamin Britten à la Monnaie : un huis clos oppressant

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Benjamin Britten (1913-1976) : The Turn of the Screw, opéra en un prologue et deux actes, op. 54. Sally Matthews (La Gouvernante), Julian Hubbard (Peter Quint), Carole Wilson (Mrs. Grose), Giselle Allen (Miss Jessel), Ed Lyon (Le Prologue), Thomas Heinen (Miles), Katharina Bierweiler (Flora) ; Orchestre de chambre de la Monnaie, direction Ben Glassberg. 2021. Notice en français, en anglais et en allemand. Livret complet en anglais, avec traduction française. 105.13. Un album de deux CD Alpha 828.

La Flûte enchantée à La Monnaie : Peut-on tout se permettre avec Mozart ?

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La mode du "Regietheater" a envahi les scènes lyriques et on ne s'étonne plus des approches tarabiscotées, politico-érotiques ou non, qu'appliquent nos modernes metteurs en scène aux chefs-d'oeuvre du répertoire. Il est vrai que ceux-ci en ont vu d'autres et qu'ils sont plus résistants qu'un opéra inconnu. La Traviata, Tosca, ou Pelléas et Mélisande ont connu pareils avatars et s'en sont tirés. Qu'en est-il de Mozart ? On ne compte plus les Don Giovanni ou les Cosi fan tutte "modernisés".

Un bouleversant témoignage contre la guerre

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Nicholas LENS
(° 1957)
Shell Shock, a requiem of war, opéra
Sara Fulgoni (la mère, l'ange de la mort, le femme), Mark S. Doss (le soldat colonial, le survivant), Ed Lyon (le soldat inconnu, le soldat, le déserteur), Gerald Thompson (le disparu, le soldat, le déserteur), Claron McFadden (l'infirmière, l'ange de la mort), Gabriel Kuti, Gabriel Crozier, Theo Lally (les orphelins, les enfants-soldats, les enfants), Choeurs et orchestre symphonique de La Monnaie, dir.: Koen KESSELS
2016-Live-49' 44'' et 44' 15''-texte de présentation en anglais-livret en anglais, néerlandais et français-chanté en anglais-La Monnaie 481-247-3