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Pelléas et Mélisande à Liège

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Pelléas et Mélisande : l’histoire d’un amour impossible, d’un amour interdit qui ne peut se conclure que par la mort des amants ? Une autre variation sur un thème qui parcourt notre littérature de Tristan et Iseut à « Love Story » d’Erich Segal, de Roméo et Juliette aux Colin et Chloé de « l’Ecume des Jours » de Boris Vian ? Oui et non. 

S’étant égaré en forêt un jour de chasse, Golaud découvre « une petite fille perdue », Mélisande, qui s’est enfuie on ne sait d’où, on ne sait de quoi. Il l’épouse et la ramène au château familial. Elle y rencontre Pelléas, le demi-frère de Golaud. Attirance irrésistible. Ces deux-là vont s’aimer d’un amour interdit. Ils en mourront.

Mais l’oeuvre -pièce de théâtre devenue opéra- est bien davantage qu’un enchaînement fatal de péripéties. Pour Maurice Maeterlinck, l’auteur de la pièce, « nous ne voyons que l’envers des choses ». Tout ce que nous disons, tout ce que nous vivons, n’est que l’apparence de réalités dissimulées, profondes ; tout cela n’est que « symboles ». Les mots ne valent que par ce qu’ils suggèrent, ce qu’ils laissent entendre, ce qu’ils évoquent, rappellent ou annoncent. Les silences qui les séparent sont significatifs. Les lieux, la nature, les lumières et les sons, eux aussi, sont des signes révélateurs. Tout est joué déjà, tout suit sa course, inexorablement.

Ce monde-là, qui ne vaut que par ce qui le sous-tend, Barbe & Doucet, les metteurs en scène, lui ont donné une magnifique apparence scénographique. Des arbres suspendus dont on découvre ces racines qui leur donnent vie et apparence ; de l’eau sur la scène, celle des fontaines, des eaux souterraines, si mystérieuses dans leur profondeur, omniprésentes dans l’œuvre. Des lumières (de Guy Simard), ombres et clartés, qui révèlent un peu et dissimulent beaucoup. Des parois qui s’ouvrent ou se referment, surgissement des personnages. 

Avec cet opéra populaire, en ce lieu-là, l’opéra est populaire : Carmen à Orange

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Quel bonheur de se retrouver une fois encore au milieu des sept mille, oui, vous avez bien lu, sept mille spectateurs des Chorégies d’Orange. 

Chaque année, c’est la même fête, la même effervescence populaire, avec dans les rues, des files de spectateurs qui convergent vers l’extraordinaire Théâtre antique. C’est un public joliment hétérogène -on vient en famille, on vient avec des amis, on vient depuis toujours (et pour certains, c’est manifestement un défi au temps qui passe : « j’y suis encore allé ! »), on vient pour la première fois. 

Pourquoi sont-ils si nombreux, si heureux d’être là ? C’est qu’on leur propose, année après année, des œuvres qui ne cessent de ravir, d’enchanter. Le Wozzeck de la veille à Aix n’y aurait pas sa place. Non, ici, il s’agit d’un opéra aux airs immédiatement reconnaissables (mon voisin de la rangée d’en-dessous se tournait avec un grand sourire vers sa femme au début de chacun d’eux), aux péripéties (mélo)dramatiques ou drolatiques (L’Elixir d’amour de l’été dernier). Oui, à Orange, l’opéra est populaire.

De plus, au programme 2023, Carmen, l’opéra sans doute le plus populaire : plus de 180 productions all over the world cette saison ! Avec évidemment tous les ingrédients nécessaires : cette gitane si éprise de sa liberté, rendant fou d’amour un pauvre garçon qui en deviendra son meurtrier. Des airs qu’on n’oublie pas une fois qu’on les a entendus, une atmosphère espagnolisante plus que typée. 

Carmen encore, me direz-vous. Eh bien oui, parce qu’il y a le bonheur justement de retrouver ses airs dès leur première note ou même de les attendre. Et aussi parce qu’il y a la surprise de découvrir ses nouveaux interprètes.

Un monstre d’orgueil et d’ambition« Henri VIII » de Camille Saint-Saëns

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Un monstre d’orgueil et d’ambition, tel est le Henri VIII magistralement incarné par Lionel Lhote, tel est le Henri VIII que nous propose le metteur en scène Olivier Py.

Henri VIII est un opéra de Camille Saint-Saëns, créé à l’Académie nationale de musique de Paris (aujourd’hui Opéra de Paris) le 5 mars 1883. Un opéra rarement représenté : cette saison, « all over the world », il ne sera à l’affiche que pour cette production bruxelloise ! C’est dire. 

Justifie-t-il ce désintérêt ? Mérite-t-il cette sorte d’exhumation ? Oui et non. C’est une œuvre musicalement bienvenue, de belle orchestration, de belle instrumentation. Et l’on comprend le bonheur d’Alain Altinoglu de nous la faire découvrir. De nous la faire bien découvrir dans la mesure où, très bien suivi par un Orchestre de la Monnaie qu’il a manifestement convaincu et stimulé, il en exalte les richesses. Mais c’est une œuvre qui n’a pas la tension de ces grands chefs-d’œuvre lyriques qui nous emportent inexorablement dans leur déferlement ou qui nous marquent à jamais par l’un ou l’autre épisode de leur partition. 

Elle nous confronte donc à cet Henri VIII dont nous savons tous par infusion culturelle qu’il s’est marié six fois, et que d’ailleurs l’un de ces mariages a provoqué le schisme anglican. Cet Henri VIII dont nous reconnaissons à l’instant le portrait peint par Holbein. Le livret, qui prend des libertés avec l’Histoire, nous invite à le rejoindre au moment où il répudie Catherine d’Aragon, la remplace par Anne de Boleyn et de ce fait quitte l’Eglise romaine avec fracas. Ce livret insère un certain Don Gomez de Féria, ambassadeur espagnol auprès de la Cour d’Angleterre, amant dorénavant rejeté par Anne de Boleyn, mais pour qui elle avait écrit une lettre d’instante recommandation auprès de la reine aujourd’hui ostracisée, une lettre qui pourrait compromettre sa merveilleuse ascension (« l’humble fille d’hier sera reine demain »). Un livret assez linéaire en fait et qui n’abonde guère en « coups d’opéra ».

Olivier Py s’en est emparé dans une mise en scène dont tous les aspects visent à faire du monarque un monstre d’orgueil et d’ambition, un cynique jouant sur tous les tableaux, de la séduction à la menace sans appel (Ses derniers mots : « si j’apprends qu’on s’est raillé de moi, la hache désormais »). 

La première séquence est si révélatrice : Henri VIII entre sur le plateau vêtu d’une redingote noire. Un photographe s’installe. On revêt le monarque d’un manteau et d’un chapeau d’apparat. Henri VIII, tel que l’a imposé pour l’éternité le portrait d’Holbein. Photo. Plus tard, une autre photo, tout aussi majestueuse, sur un faux cheval. Plus tard encore, au début du troisième acte, le roi entre en scène… sur un vrai cheval, incroyable tribune pour des paroles d’autorité et de décisions sans appel.

Souvent, alors que les autres protagonistes sont à l’avant-plan, il est là, à l’affût, à l’écoute. Et même, le voilà batifolant avec une dame d’honneur d’Anne de Boleyn, en négation méchamment ironique de ses grands serments d’affection et de prédilection.

Tout cela s’inscrivant dans une scénographie et des costumes de Pierre-André Weitz, le complice au long cours de Py, qui nous plongent dans un univers surdimensionné, majestueux, dont le noir typique permet des contrastes éclatants avec certains vêtements rouges ou blancs.

Olivier Py est un incontestable créateur de tableaux scéniques époustouflants. Ainsi, la séquence du synode qui se conclura par le schisme : masse rouge vif des prélats rassemblés se métamorphosant, chasubles retirées, en peuple acclamant son roi (un grand moment pour les chœurs !).

Mais Olivier Py, ce sont aussi, qui m’ont moins convaincu, ses éternels beaux jeunes gens quasi dénudés (mais cette fois, un seul « tout nu » : a-t-il été tiré au sort ou l’a-t-il voulu ?) qui doublent les séquences ou en anticipent des réalités futures. C’est aussi ce que j’appellerai un caprice de metteur en scène : cette locomotive qui, au début du deuxième tableau du quatrième acte, surgit sur le plateau en défonçant un mur, tout cela pour dire qu’on est parti à la campagne… Ce sont aussi des séquences chorégraphiées (par Ivo Bauchiero), obligées par le genre certes, dont j’interroge la signification et l’intérêt (mais cette réticence est peut-être liée à ma relation personnelle à la danse).

Mais si cet Henri VIII restera dans notre souvenir, ce sera, et c’est essentiel en l’occurrence, grâce à celui qui l’incarne : Lionel Lhote. Il est, vocalement et scéniquement, le monstre d’orgueil et d’ambition de son personnage. Quelle rage, quelle séduction doucereuse, quelle conviction, quelles menaces dans les intonations de sa voix, dans la conduite et la maîtrise de son chant. Et son jeu corporel est alors comme le prolongement, comme l’exacte visualisation de ce qu’il nous donne à entendre. Quelle maturité ! 

Joliment joli : « Lakmé » de Léo Delibes 

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A l’Opéra Royal de Wallonie-Liège, Lakmé de Léo Delibes offre à ses spectateurs un album de belles images colorées-coloriées et surtout des ravissements vocaux. Tout cela est, n’y voyez pas d’ironie, joliment joli. 

Dans le jardin aussi magnifique que solennel d’un temple hindou, ils se voient et cela suffit pour qu’ils s’aiment. Définitivement. Mais ils ne vivent pas dans le meilleur des mondes et tout ne pourra pas y aller pour le mieux. Elle, c’est Lakmé, la fille du redoutable brahmane Nilakantha ; lui, c’est Gérald, un officier de ces forces britanniques qui ont colonisé et occupent le pays. Leur amour est impossible, elle en mourra. 

Une tragédie, oui et non. Oui dans les faits et leur enchaînement fatal, non dans la musique et les airs qui l’expriment. Si beaux pour dire le rêve impossible.

Joliment jolie : telle est la mise en scène de Davide Garattini Raimondi, absolument couleur locale. Tout dit l’Inde des représentations coloniales : processions religieuses, pétales de fleurs, statues des dieux, bougies, sari, uniformes anglais (dont nous venons de contempler à satiété les déclinaisons contemporaines lors d’un enterrement récent), portrait de la Reine Victoria. Et surtout, elle nous vaut un remarquable travail sur les couleurs, celles des lumières de Paolo Vitale, celles des vêtements de Giada Masi. Le fruit, comme nous l’apprend la brochure de soirée, de tout un travail de recherche sur ces couleurs et leurs significations là-bas. Oui, un magnifique album d’images colorées-coloriées.

Streamings de la semaine : Tourcoing, Liège et Bruxelles

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Pour commencer cette sélection, nous vous donnons rendez-vous en ligne. Le samedi 5 juin à 20h sur la page Facebook de l’Atelier lyrique de Tourcoing,vous pourrez retrouver l'Orchestre les Ambassadeurs sous la direction d’Alexis Kossenko pour un concert qui fera revivre l’orchestre de Dresde au temps de Bach, à travers une sélection de chefs-d’œuvre de Zelenka, Heinichen, Pisendel, Fasch. Ce concert sera également en crosspostage sur la page Facebook sur Crescendo Magazine.

Les Ambassadeurs n’ont pas lésiné sur les moyens pour en rendre toute la saveur, l’intensité et la fougue – orchestre somptueux et solistes d’exception (Coline Dutilleul et Stephan MacLeod). Un projet filmé dans le cadre de l'abbaye de Royaumont. 

A l'Opéra de Liège, ce sera la fête à Mozart avec un superbe Cosi fan Tutte sous la direction de Christophe Rousset. Au pupitre de cette version concertante, le chef français dirigera une distribution qui s’annonce excellente : Cyrille Dubois, Leon Košavić, Maria Rey-Joly, Lucia Cirillo, Sophie Karthäuser et Lionel Lhote. Rendez-vous du 5 juin au 15 juin. 

Du côté de La Monnaie de Bruxelles, qui reprend des représentations publiques avec Tosca de Puccini et un récital particulièrement attendu de Simon Keenlyside, vous pouvez visionner jusqu’au 8 juin un concert nordique avec Sibelius (Concerto pour violon) et Grieg (Extraits de Peer Gynt) avec le violoniste Emmanuel Tjeknavorian, en compagnie de l’Orchestre symphonique de La Monnaie sous la direction d’Alain Altinoglu. 

Guillaume Tourniaire, chef d’orchestre 

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Le chef d’orchestre Guillaume Tourniaire est le maître d'œuvre d' un formidable concert que l’Opéra royal de Liège propose en ligne. L’opéra romantique français est le titre de ce moment de musique qui nous permet de retrouver un beau panel de chanteurs belges (Jodie Devos, Lionel Lhote et Marc Laho). C’est à voir en ligne sur la plateforme streaming de l’Opéra royal de Liège. 

Ce concert liégeois a pour titre “Hamlet et le romantisme à la française”. Pouvez-vous nous définir ce “romantisme à la française”?

C’est une vaste et passionnante question, à laquelle il est malheureusement impossible de répondre en quelques lignes seulement. Tentons cependant d’esquisser quelques pistes d’orientation… Quelques décennies après la révolution française, les soubresauts et conséquences de celle-ci continuent de modifier en profondeur la culture, l’organisation et l’existence même des pays en Europe. Les notions de nation et d’identité liée à une langue, deviennent de vibrants enjeux sociétaux. Ainsi, l’opéra italien (et "en italien"), qui régnait en maître jusqu’à la fin du siècle des Lumières dans tous les théâtres du monde, commence à être remis en question. Tandis qu’à Paris, Rossini et Donizetti composent désormais en français, chaque pays cherche à célébrer sa culture en se rapprochant de ses propres racines.  Née en partie de ces préoccupations, la réforme wagnérienne de l’opéra va marquer à jamais (mais  aussi polariser) la créativité des écoles nationales. Si Mozart (grâce à Beaumarchais) avait déjà ouvert la route dès 1786 dans Le Nozze di Figaro, la politique devient désormais un sujet récurrent d’inspiration chez de nombreux compositeurs célébrés à la fois comme artistes et hommes d'État. Il suffira de songer à la place prise par Verdi dans le Risorgimento en Italie où à celle de Smetana dans l’exaltation du sentiment anti Habsbourg alors que la Bohème vivait sous le joug de l’Empire austro-hongrois…  ou encore à celle d’Auber et sa Muette de Portici dans les troubles qui précédèrent la Révolution belge de 1830.    

Exerçant alors un pouvoir d’attraction unique en Europe, Paris est à la croisée de tous ces courants artistiques. Succédant aux premières créations géniales et révolutionnaires de Berlioz, les œuvres de Auber, Meyerbeer et Halévy enrichissent les premières pages du répertoire romantique français en faisant une synthèse des beautés du chant italien, de la richesse de l’orchestration allemande, et des préoccupations dramatiques nouvelles. Puis, s’affranchissant peu à peu de ces influences, et soucieux de se démarquer des deux figures tutélaires que sont Verdi et Wagner, les compositeurs français découvrent des accents musicaux plus personnels, plus caractéristiques de subtilités de leur langue et de leur culture.  La déclamation lyrique, jusqu’alors plus hiératique ou formelle, devient plus naturelle, plus souple et la mélodie française prend son envol. Les inflexions des récits chantés vont pouvoir se parer de sublimes transparences poétiques, de chatoyances orchestrales. La légèreté ou la fragilité des sentiments exprimés, mais aussi l’opulence ou la sensualité des passions ravageuses, vont bientôt caractériser un univers sonore unique et reconnaissable entre tous… le romantisme à la française...

 Comment avez-vous conçu le programme de ce concert ?

Celui-ci s’inscrit dans une programmation de quelques concerts en streaming faisant écho à des productions qui n’ont malheureusement pas pu avoir lieu à Liège cette saison à cause de la pandémie. Ainsi, la Directrice musicale de l’Opéra Royal de Wallonie, Speranza Scappucci, m’a proposé de diriger quelques extraits de Hamlet avec les formidables solistes wallons Jodie Devos, Lionel Lhote et Marc Laho. Soucieux d’une part de ne pas trop divulgâcher (comme disent nos amis québécois) Hamlet que nous redonnerons dans une prochaine saison, et d’autre part, de conserver une trame théâtrale à ce concert, j’ai décidé de concentrer ce programme autour de trois chef-d’œuvres, Hamlet, Werther et Les Pêcheurs de Perles, trois piliers du répertoire romantique lyrique français, mêlant amour et folie. Puis, malgré l’absence de public, il m’a semblé qu’une pièce infiniment plus légère et réunissant nos trois solistes (le trio "Ah! Vous dirai-je maman!" extrait du Toréador d’Adolphe Adam), serait un charmant clin d’œil clôturant ce moment musical…         

Streamings de la semaine : Varsovie, Lille et Liège

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On commence ce parcours avec rien moins que Martha Argerich dans le Concerto pour piano n°1 de Chopin avec le Sinfonia Varsovia dirigé par Jacek Kaspszyk (concert filmé le 27 aout 2010 à Varsovie). Ce concert est mis en ligne sur la chaîne Youtube de la Deutsche Welle.

A Lille, l'Orchestre national de Lille, sous la direction de Jean-Claude Casadesus accompagnait la formidable violoncelliste Anastasia Kobekina dans le Concerto n°1 de Chostakovitch. En complément de programme : la Symphonie n°5 de Beethoven.

Enfin, on rappelle l'excellent concert opéra français de l'Opéra royal de Liège sous la direction de Guillaume Tourniaire en compagnie d'un trio de chanteurs belges : Jodie Devos, Marc Laho et Lionel Lhote. C’est à voir en ligne sur le site de l‘Opéra royal de Wallonie et jusqu'au 23 mai.

Cendrillon de Massenet en DVD :  Fiona Shaw met en scène la question de l’identité 

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Jules MASSENET (1842-1912) : Cendrillon, conte de fée en quatre actes. Danielle de Niese (Cendrillon) ; Kate Lindsey (Le Prince charmant) ; Lionel Lhote (Pandolphe) ; Nina Minasyan (La Fée) ; Agnes Zwierko (Madame de la Haltière) ; Eduarda Melo (Noémie) ; Julie Pasturaud (Dorothée) ; The Glyndebourne Chorus ; Orchestre Philharmonique de Londres, direction John Wilson. 2019. Notice et synopsis en anglais. Sous-titres en anglais, français, allemand, japonais et coréen. 148.00.  DVD ou Blu Ray  Opus Arte 0A1303D.

En toute intensité : Don Carlos de Giuseppe Verdi à Liège

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Allons à l’essentiel : les émotions intenses vécues, le plaisir éprouvé. Ils sont liés à la qualité et à l’engagement du plateau vocal. De belles voix au service d’une partition idéalement conçue pour qu’elles s’épanouissent et expriment les sentiments et passions qui agitent les personnages. 

Celui qui m’a le plus touché est Rodrigue, Marquis de Posa. Il est en quelque sorte l’axe du livret : ami de cet infant Don Carlos qui voit ses espérances amoureuses avec Elisabeth de Valois brisées par la décision de Philippe II, son père, d’épouser la jeune femme. Favori de ce roi qu’il doit servir et qu’il trahira par amitié ; victime enfin des terribles réquisitions et condamnations du Grand Inquisiteur. Lionel Lhote lui donne une ampleur vocale et une présence scénique remarquables. Quel bonheur de le suivre dans les joies de l’amitié, dans les affres du dilemme : le roi ou l’ami. Gregory Kunde impose tous les grands élans de Don Carlos, de l’amour partagé au traumatisme révolté face aux décisions de son père, en passant par l’exaltation de l’amitié avec Rodrigue. Bonheur aussi des voix d’Ildebrando D’Arcangelo en Philippe II, de Roberto Scandiuzzi en Grand Inquisiteur. Plénitude amoureuse, malheur, jalousie, désespoir vivent tout aussi intensément dans les voix féminines. Kate Aldrich est une Princesse Eboli successivement envahie par l’espoir amoureux, la jalousie vengeresse et le repentir. Quant à Yolanda Auyanet, après avoir incarné émois amoureux et résignation, elle a malheureusement dû, souffrante, passer le relais après l’entracte à Leah Gordon qui n’a pas manqué la chance qui s’offrait à elle. Paolo Arrivabeni « harmonise » le tout à la tête de l’Orchestre et des Chœurs de l’Opéra Royal de Wallonie-Liège.

Benvenuto Cellini ouvre la saison des 250 ans de l’Opéra Royal de Versailles

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Benvenuto Cellini de Hector Berlioz, présenté en version de concert, était l’une des productions les plus remarquées du Festival Berlioz qui fêtait le 150e anniversaire de sa mort. La production est passée par Allemagne et le Royaume-Uni avant d’arriver à l’Opéra Royal de Versailles le 8 septembre dernier. Berlioz à Versailles ? Pour un théâtre plutôt spécialisé dans la musique baroque, la présence de cette œuvre est quelque peu surprenante, bien que La Damnation de Faust y ait déjà été à l’affiche. Mais il y a bien une raison à cette programmation. L’opéra a été présenté dans un magnifique décor de Pierre-Luc-Charles Ciceri (1782-1868), peintre et décorateur de théâtre, auteur de nombreux décors spectaculaires pour La Muette de Portici d'Auber, Robert le Diable et Le Prophète de Meyerbeer, Guillaume Tell de Rossini ou encore Hernani de Victor Hugo (lors de la fameuse bataille) et bien d’autres opéras et théâtres. Datant de 1837, récemment restaurée, la toile peinte du « Palais de marbre rehaussé d’or » et ses châssis ont été construits à l’occasion de la création, la même année, du musée de l’Histoire de la France par le roi Louis-Philippe au Château de Versailles. Il s’agit de l’un des seuls décors de grande dimension de cette époque conservés tels quels ; il est spécialement remonté pour quelques semaines seulement. Berlioz a très certainement dirigé un concert sur la même scène, le dimanche 29 octobre 1848, devant ces splendides éléments à perspective renforcée.

Don Pasquale, réussite totale à La Monnaie

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Venant après une Flûte enchantée très problématique et une De la maison des morts peu festive par nature, cette nouvelle production de Don Pasquale de Donizetti faisait office de bulles de champagnes bien en accord avec l’ambiance des fêtes de fin d’année. Il faut dire que l’affiche pouvait rassurer les plus sceptiques : Laurent Pelly à la mise en scène et Alain Altinoglu en fosse ! Un tandem qui a fait ses preuves à La Monnaie !

Même au cirque, Carmen fascine encore et toujours

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© Lorraine Wauters/ORW

D'après le site "Operabase", Carmen est l'opéra le plus joué au monde, après La Traviata, et La Flûte enchantée. On le comprend aisément : trame limpide, caractères dramatiques forts, inspiration mélodique géniale. Carmen, l'opéra parfait ? Peut-être. La production de l'Opéra Royal de Wallonie le démontre :

Un spectacle réussi sans doute, mais imparfait

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Anne-Catherine Gillet © Hofmann / La Monnaie

Béatrice et Bénédict
Pour cette nouvelle production de l'opéra-comique de Berlioz, La Monnaie inaugurait son "Palais", véritable ville dans la ville, un chapiteau de 500 m2, pouvant contenir 1100 places, installé sur le site industriel de Tour & Taxis", ancienne gare de marchandises désaffectée. Jusqu'à l'achèvement des travaux au bâtiment original, soit en décembre de cette année, les spectacles se donneront ici. Le directeur général, Peter de Caluwe, l'a rappelé en ce jour de première, après la minute de silence dédiée aux victimes des attentats du 22 mars suivie d'une "Brabançonne" émue.

Formidable prise de rôle pour Jodie Devos !

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Laurent Kubla, Jodie Devos et Lionel Lhote ® Opéra Royal de Wallonie - Lorraine Wauters

Il Barbiere di Siviglia à l'ORW
A tout seigneur tout honneur : le Figaro de Lionel Lhote a dominé le spectacle. Quelle chance aussi de disposer d'un air d'entrée aussi brillant et connu que le Largo al factotum: réussi, le baryton met le public dans sa poche comme il le fit en 2004 lors de la finale du Concours Reine Elisabeth !

Une somptueuse pièce en costumes

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Ernani de Giuseppe Verdi
1830 : la bataille d'Hernani ! .... souvenirs de classe...  Le livret tiré par Piave pour Verdi est fidèle à la pièce de Victor Hugo, sauf que dona Sol y devient Elvira et est sauvée de la mort, tout comme Silva. Ce cinquième opéra de Verdi (1844) connut un beau succès et marque un jalon, après Nabucco, vers une caractérisation des personnages plus affinée, avant de se réaliser pleinement dans Macbeth (1847).

Un autre Guillaume Tell !

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A Liège, Guillaume Tell de Grétry

Créé en 1791, au « Théâtre de l’Opéra Comique National ci-devant Comédie Italienne », Guillaume Tell était l’oeuvre d’un compositeur illustre et bien ancré dans la vie musicale parisienne.