Tcherniakov a déjà fait mieux. Minkowski aussi

par

Giuseppe VERDI (1813-1901)
Il Trovatore
M. Didyk (Manrico), M. Poplavskaïa (Leonora), S. Hendricks (le comte de Luna), S. Brunet-Grupposo (Azucena), G. Furlanetto (Ferrando), Choeurs et orchestre symphonique de La Monnaie, dir. Marc MINKOWSKI, mise en scène : Dmitri TCHERNIAKOV
2014- DVD - 143' - Notice en anglais, français et néerlandais - chanté en italien - BelAir Classiques BAC 108

Enregistrée en 2012, cette production de La Monnaie déçoit. Tcherniakov, que l'on a connu plus inspiré (Eugène Onéguine, Kitège), situe l'action dans une vaste demeure abandonnée. Tous les personnages de l'opéra (sauf Ruiz et Ines) y sont réunis, sur invitation d'Azucena. Et ils seront tous là, tout le temps, durant toute la durée de l'opéra. Comme cet imbroglio n'est pas clair pour le spectateur, le metteur en scène s'explique dans le livret : "La principale force motrice, c'est la découverte progressive du passé grâce aux efforts communs." Les cinq protagonistes rebâtissent leur passé par la reconstitution de tous les événements qu'ils ont vécus. La mise en scène se présente donc tel un jeu de rôle, qui n'aide pas trop à la compréhension d'une intrigue déjà parmi les plus alambiquées de l'histoire de l'opéra. Tout cela n'emporte pas l'adhésion, il faut le reconnaître. La suppression des petits rôles (leurs phrases sont chantées par les rôles principaux) et l'absence totale des choeurs sur scène (ils sont dans les coulisses, dès lors pas de gitans ni d'enclumes) aident encore moins. Le huis clos devient bien statique, on ne sait plus toujours qui est qui et on finit par s'ennuyer ferme, sauf peut-être à l'extrême fin, où le trio final, acculé dans un coin de la scène, hallucine dans une ambiance suffocante. Musicalement, on est un peu mieux loti. Les chanteurs sont corrects, à commencer par le vétéran Furlanetto. Dès Tacea la notte, Marina Poplavskaïa se révèle une belle Leonora : excellent Miserere aussi. Manrico et Luna sont honnêtes sans plus. Par contre, un grand bravo à Sylvie Brunet-Grupposo pour son Azucena "maîtresse de maison", tant au point de vue dramatique que vocal. Minkowski est-il vraiment à l'aise avec Verdi ? On peut se le demander à l'écoute d'une direction suffisante sans doute mais ni alerte ni, surtout, nerveuse : étonnant de sa part. Un metteur en scène et un chef peu inspirés, trois chanteurs moyens sur cinq : ne restent que ces deux dames pour sauver la production. C'est peu.
Bruno Peeters

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