Un bel hommage à Claudio Abbado

par

Franz SCHUBERT (1797-1828)
Symphonie n° 8 D. 759
Ludwig van BEETHOVEN
(1770-1827)

Symphonie n° 2 opus 36
Richard WAGNER (1813-1883)
Siegfried-Idyll
Orchestre Philharmonique de Vienne, Chamber Orchestra of Europe, dir.: Claudio ABBADO
1978-1988-ADD-77'44-Textes de présentation en français, anglais et allemand-Audite 95.627

Avant de devenir véritablement l’âme du Festival de Lucerne à partir de 2003 en créant l'orchestre tel qu'il s'y produit aujourd'hui encore, Claudio Abbado participa activement à la vie de cet événement planétaire dès 1966; il avait alors 33 ans. Jusqu'à 1988, il y donnera quinze concerts à la tête des orchestres les plus prestigieux. Ce disque est avant tout un nouveau volet de la série dévolue par Audite aux archives sonores de l’histoire de cette aventure annuelle qui naquit en 1943, alors qu'était rassemblée une formation destinée à être dirigée par Arturo Toscanini, figure ô combien emblématique de la lutte contre le fascisme. Mais il offre aussi un portrait fidèle du style assez reconnaissable du chef italien. Que ce soit avec les Wiener Philharmoniker en 1978 ou l’orchestre de chambre européen en 1988, les caractéristiques de cette direction apparaissent avec clarté: élégance et raffinement, franchise et honnêteté artistique, charme palpable et émotion discrète. Pourtant, comment ne pas regretter cette relative mollesse, ce manque de tension qu’on retrouve assez souvent dans ses interprétations de cette époque. Sa conception des œuvres qu’il aborde est bien structurée, les édifices sont solidement charpentés, l’équilibre règne partout en maître; il s’agit à l’évidence de la manifestation d’un métier sûr, sans faille, du travail de grand professionnel. Mais à aucun moment nous ne nous sentons décoller de notre siège. Ce n'est que bien plus tard, dans ses dernières années, que cette discrétion dans les intentions cédera le pas à des lectures plus intenses, parmi lesquelles une 2ème de Mahler, à Lucerne justement en 2003, qui ne risque pas d'être détrônée de sitôt. Ici, son Inachevée a de splendides couleurs automnales mais ne reste qu’une jolie peinture un peu figée. Il risque et réussit la grâce dans la 2ème de Beethoven avec, cette fois, des sonorités claires et fruitées, une vivacité jamais prise en défaut, une conception très « italienne » de l’ouvrage, mais ne parvient pas à se départir du caractère « décoratif » dont il revêt l'oeuvre. Quant à Siegfried-Idyll, le constat est plus sévère encore: cette page qui possède peu de matière à dynamiser le discours s’enlise ici dans une somnolence un peu malvenue. En résumé, un disque qui est un bel hommage à celui qui vient de nous quitter cette année, qui s’écoute avec plaisir mais risque fort de ne pas rester dans les mémoires.
Bernard Postiau

Son 9 - Livret 9 - Répertoire 10 - Interprétation 8

Les commentaires sont clos.