Un Ravel féérique
Maurice RAVEL
(1875 – 1937)
Ma Mère l’Oye (ballet complet) - Shéhérazade, ouverture de féerie - Le Tombeau de Couperin
Les Siècles, dir. François-Xavier Roth
2018 DDD 56’33 Livret français et anglais CD Harmonia Mundi HMM 905281
Après nous avoir donné de très beaux Stravinsky, François-Xavier Roth et son ensemble Les Siècles nous offrent des Ravel. Deux disques sont sortis, dont celui-ci. Les trois oeuvres présentes ont d’abord été écrites pour piano, à deux ou quatre mains. Ravel les a ensuite orchestrées, avec toute sa science en la matière. Le grand critique Emile Vuillermoz écrivait : “Orchestrer pour Ravel, c’est exploiter la couleur des instruments, accomoder les timbres, les varier et les nuancer dans le moindre détail, sans jamais perdre de vue l’équilibre de l’ensemble”. Il y a d’abord le ballet complet de Ma Mère l’Oye. Le monde magique de l’enfance en est la substance, et Ravel nous séduit par sa tendresse.
De la même manière, François-Xavier Roth nous séduit par sa direction. Rarement, Ma Mère l’Oye n’a si bien rendu l’enfance et sa féerie. Le début du Petit Poucet ressemble à du Satie, l’auteur des Menus Propos Enfantins. De même, l’orientalisme de Laideronnette, Impératrice des Pagodes est naturel, et pas forcé, et c’est absolument délicieux. De l’exotisme, il y en a à foison dans Shéhérazade, une oeuvre de jeunesse que Ravel désavoua en refusant l’édition de la partition (parue seulement en 1975). Judicieusement, elle n’est pas intitulée ouverture de concert, ou ouverture d’opéra (puisque ce n’en est pas un), mais ouverture féerique. Le Tombeau de Couperin est une suite de danse “à l’ancienne”, chacune dédiée à la mémoire d’un ami mort à la guerre. Elles sont écrites à l’origine pour piano, avec en plus Fugue et Toccata, non orchestrées dans cette suite. C’est du néo-classicisme, courant dominant dans l’entre-deux guerre. Avec ce disque, Ravel n’a jamais été aussi bien servi, même par Boulez : c’est dire !
Dominique Lawalrée
Son 10 - Livret 10 - Répertoire 10 - Interprétation 10