Un Schubert franc et mature

par

Franz Schubert (1797-1828)
Symphonie n°8 en do majeur D 944 « La Grande » - Symphonie n°7 en si mineur D 759 « Inachevée »
Wiener Symphoniker, Philippe Jordan, direction
2015-DDD-77’02-Textes de présentation en anglais et allemand-Wiener Symphoniker-WS009

Suite d’une belle série avec ce neuvième coffret consacré aux deux dernières symphonies de Franz Schubert par le Wiener Symphoniker et son directeur musical, Philippe Jordan. C’est à la tête de ce même ensemble que Jordan est venu à BOZAR lors de la saison précédente à l’occasion d’une tournée européenne. D’emblée, il impressionnait par la grande maîtrise de sa phalange viennoise et par la clairvoyance de son langage. Un langage expressif, franc et sincère, à travers de nombreux gestes clairs et porteurs d’une direction limpide et intelligente. Deux symphonies aux histoires et genèses complexes. L’ « Inachevée », en deux mouvements est composée en 1822 mais ne sera créée qu’après la mort du compositeur. Une ébauche d’un scherzo existe mais se compose uniquement de 120 mesures pour piano dont seul le début est orchestré. Plusieurs ont tenté plus tard de terminer l’œuvre, mais aucun de ces projets ne semble subsister aujourd’hui. A l’initiative de Schumann qui obtint de Ferdinand Schubert, le frère ainé, le manuscrit, la « Grande Symphonie » est aussi créée après la mort du compositeur. Sous la direction de Mendelssohn, cette œuvre novatrice, bien que toujours dans la lignée de Beethoven, ne reçoit pas l’accueil espéré. Se décèlent immédiatement un regard personnel sur le matériau mélodique et une richesse expressive rarement entendue.
Ce sont cette richesse et cette maturité que l’on retrouve à nouveau dans cette parution, à travers un répertoire qui colle à l’artiste. Tant dans l’architecture du matériau musical que dans la finesse des différents motifs et parties, le chef impose à ses musiciens la volonté d’aller au bout des choses. Comme Celibidache, Jordan ne laisse rien au hasard, contrôle les masses tant dans les pianissimi que dans les grands tutti et laisse malgré tout l’opportunité aux musiciens de s’exprimer librement. Côté orchestre, voilà un ensemble qui joue d’une seule voix, notamment par la perfection de la mise en place mais aussi et surtout par l’incroyable écoute au sein de pupitres. Se ressent inévitablement un dialogue efficace entre le chef et l’orchestre, ce dernier exprimant avec aisance le style direct du chef. Mettre sur disque l’œuvre de Schubert est un défi osé et dangereux si la partition n’est pas analysée dans le détail. Jordan et son orchestre démontrent ici qu’ils en sont capables en offrant ainsi une très belle référence discographique.
Ayrton Desimpelaere

Son 10 – Livret 10 - Répertoire 9 – Interprétation 10

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