Une manne de découvertes pianistiques gâchées par une interprétation sans relief

par

Félix MENDELSSOHN (1809-1847)
Oeuvres pour piano
Roberto PROSSEDA (piano)
2013-DDD-77'20, 71'57 et 65'17-Textes de présentation en anglais, italien, allemand et français-Decca 481 1010 (3 cd)

Ce coffret vient à point nommé pour nous rappeler que l'oeuvre de Félix Mendelssohn possède toujours bien des zones d'ombre et que nombreuses sont les pages qui n'avaient jusqu'à présent pas encore connu les honneurs du disque, ou si peu. Cela n'est guère étonnant quand on sait que plus de deux cents pièces pour piano sont issues de sa plume. Ces trois cd bien remplis nous plongent bien dans l'univers pianistique du compositeur du Songe d'une nuit d'été et ses climats variés, mais n'abordent pas les Romances sans paroles ou la sonate. Si l'on retrouve les sévères et plus ou moins connus Préludes et fugues opus 35 ainsi que les Variations sérieuses opus 54 qui ont tenté un Horowitz ou un Cortot par exemple, nous nous trouvons devant plus de deux disques de pièces inédites ou très rarement jouées. Il s'agit pour l'essentiel de courtes vignettes, sans que ce terme possède quoi que ce soit de péjoratif. On constate également la présence de pages rejetées par Mendelssohn lui-même, telles que ces quatre variations qu'il n'intégrera pas au corpus de l'opus 54, un exemple du jugement extrêmement critique qu'il exprimait à l'égard de ses propres oeuvres. Dire que ces   découvertes offrent  une quelconque révélation serait très exagéré. Le plus souvent, on reste bel et bien dans l'univers feutré et plein de fraîcheur des Romances sans paroles, mais sans nécessairement y retrouver leur délicate originalité, d'autant plus qu'il s'agit le plus souvent de pièces de jeunesse où le compositeur ne s'est pas encore affranchi d'un certain quant-à-soi – oserait-on le terme d'académisme ? – qui disparaîtra progressivement à la maturité. Notre enthousiasme est cependant tempéré par l'interprétation, propre mais froide, terne, presque indifférente, qui ne s'attarde guère à tenter de varier les éclairages; la succession de ces feuillets devient vite lassante lors d'une écoute en continu. On imagine ce qu'auraient pu faire une Guiomar Novaes, un Aldo Ciccolini, un Rubinstein dans ce répertoire, eux qui, tous, l'ont abordé avec un art que l'on admire toujours aujourd'hui.
Bernard Postiau

Son 9 - Livret 9 - Répertoire 10 - Interprétation: 6

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