Une plaisante Cambiale di Matrimonio à la Fenice

par

© Michele Crosera

En ce début d’automne, le Teatro La Fenice reprend trois de ses productions, La Traviata selon Robert Carsen, une Tosca modernisée par Serena Sinigaglia et La Cambiale di Matrimonio de Rossini dont la basse bouffe Enzo Dara avait élaboré la mise en scène pour le Teatro Malibran en mars 2013 : dans un rythme soutenu, sa régie se contente de respecter la tradition de la simple farsa sans appuyer sur les ficelles du comique. Avec l’aide de l’Ecole de Scénographie des Beaux-Arts de Venise, le décor de Stefano Crivellari use de gigantesques étalages en parois et de coupons de tissus tombant des cintres, laissant apparaître une Giudecca stylisée en toile de fond ; et sous de plaisants éclairages conçus par Elisa Ottogalli, les costumes de Federica Miani prennent un cachet romantique que pimente l’apparition d’arlequins à la Tiepolo.
Alors qu’à la tête de l’Orchestre vénitien, il aurait fallu une baguette plus expérimentée que celle de Lorenzo Viotti, le fils du regretté Marcello Viotti, le plateau est dominé par les deux basses : Omar Montanari prête à Tobia Mill la faconde enjouée du marchand qui recourt aux cascades de paroles à des fins péremptoires, tandis que, par la générosité de ses élans, Filippo Fontana dessine un Slook bon enfant, ravi d’un heureux compromis. Marina Bucciarelli tire Fanny l’ingénue vers la primadonna en agrémentant son chant de contre-notes hors de propos face à l’Edoardo Milfort de Francisco Brito, à l’expression trop uniforme. En Clarina et Norton, Rossella Locatelli et Claudio Levantino complètent adroitement la distribution de ce joli spectacle qui ragaillardit tout spectateur.
Paul-André Demierre
Venise, La Fenice, le 26 septembre 2015

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