Une voix rare, puissante, somptueuse

par

Ewa PODLES, contralto
Airs et scènes de Gluck, Rossini, Donizetti, Prokofiev, Ponchielli, Mascagni, Verdi et Massenet
Orchestre Philharmonique de Poznan, dir.: Lukasz BOROWICZ
2015-live-59' 33''-Notice de présentation en polonais, anglais- Textes chantés non inclus-Dux 1134

La voix de contralto est rare : les mélomanes pensent à Kathleen Ferrier, Maureen Forrester ou Aafje Heynis, toutes fort associées au répertoire sacré ou symphonique (Mahler). Seule, sans doute, Marilyn Horne échappe à ce carcan : elle a brillé dans le domaine de l'opéra, de Haendel, Vivaldi, Gluck ou Rossini à Meyerbeer. Plus récemment, nous connaissons Marie-Nicole Lemieux ou Nathalie Stutzmann. Il reste que ce timbre est rare, et donc précieux. La diva polonaise Ewa Podles, dont le répertoire est en grande partie tourné vers la scène, en est une des plus brillantes représentantes actuelles. Voici le reflet d'un récital donné à Poznan le 6 juin 2014, qui nous permet d'apprécier cette personnalité hors du commun. Comme Horne, elle est contralto colorature. Après l'air d'Orphée de Gluck, bien dessiné, mais un peu indifférent, la longue scène extraite de Ciro in Babilonia de Rossini (Infelice) offre un exemple éclatant de son talent : récitatif accompagné précédant une lamentation langoureuse, pour terminer, en un feu d'artifice de notes graves, par la cabalette de Cyrus exhortant ses chevaliers au combat. Cet impressionnant étalage de graves se poursuit dans le fameux "brindisi" d'Orsini de la Lucrezia Borgia de Donizetti, époustouflant de virtuosité, puis dans l'air de la Cieca de La Gioconda de Ponchielli (Voce di donna), ou dans le célèbre "Stride la vampa "du Trouvère de Verdi. Le CD termine par le bel air d'Isabella "Cruda sorte", de L'Italienne à Alger, écrit par Rossini pour Marietta Marcolini, celle-même qui créa le rôle de Cyrus. Opera seria et dramma giocoso se trouvent ainsi réunis. La tirade de Madame de la Haltière, dans la Cendrillon de Massenet, témoigne de l'aptitude comique de la cantatrice, et la complainte du champ des morts d'Alexandre Nevsky de Prokofiev, un peu incongrue ici, d'un beau sens du tragique. Lukasz Borowicz accompagne fort bien ces airs et scènes. Heureusement, car sa direction est décevante dans les pièces pour orchestre seul : ouvertures d'Iphigénie en Aulide, trop rapide, d'Aureliano in Palmira, banale, intermezzo de Cavalleria rusticana, indifférent, ou prélude de l'acte II du Trouvère, très plat.
Bruno Peeters

Son 9 - Livret 7 - Répertoire 9 - Interprétation 9

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