Walter Gieseking et Bach chez Deutsche Grammophon

par
Gieseking

Johann Sebastian BACH
(1685 - 1750)
Les six Partitas - Ouverture dans le style français en si mineur BWV 831 - Toccata en ut mineur BWV 911 - Le Clavier bien tempéré Vol. I et II - Concerto Italien BWV 971 - Fantaisie chromatique et Fugue en ré mineur BWV 903 - Fantaisie et Fugue en ut mineur BWV 906 - Capriccio en si bémol majeur BWV 992 "Sur  e départ de mon frère bien-aimé"
Petits Préludes - Inventions à 2 voix - Inventions à 3 voix - En bonus : le concerto pour piano de Schumann avec le Berliner Philharmoniker sous la direction de Wilhelm Furtwängler
Walter GIESEKING (piano)
1950/2017 - 7 CD - ADD Mono - Textes de présentation en anglais et en allemand - DG 479 7362

Ces enregistrements proviennent de la Radio de Sarrebruck où enseignait alors Walter Gieseking après son passage à vide pour son attitude durant la guerre, quand il revint des Etats-Unis pour jouer dans l'Allemagne hitlérienne. Comme Wilhelm Furtwängler, il fut ensuite blanchi mais les propos tenus lors du Concours Eugène Ysaÿe (aujourd'hui Concours Reine Elisabeth) où il était membre du jury aux côtés d'Emil Sauer, Ignaz Friedman, Olga Samaroff, Nicolas Orloff et Arthur Rubinstein font encore frémir : il proclama être convaincu de la justesse des idées du "sauveur de l'Allemagne". Sa carrière internationale reconnue dans tous les répertoires en prit un grand coup; il fut notamment interdit de jouer aux Etats-Unis jusqu'à son concert au Carnegie Hall en 1953. 
En 1947, Walter Gieseking est donc professeur de piano au Conservatoire de Sarrebruck. Après ses cours, il se rend à l'auditorium de la radio et, entre le 24 avril et le 5 juin 1950, les récitals sont consacrés à l'oeuvre pour clavecin du Cantor dont on célèbre le bicentenaire de la mort. Les micros sont là. Les récitals sont enregistrés et l'étiquette jaune a rassemblé les bandes pour nous offrir le Bach de Gieseking en 7 CD (en bonus, le concerto de Schumann avec Furtwängler, un ajout non indispensable ici). De précieux documents quand on sait le pianiste créateur de l'instant en respectant toujours une ligne de conduite pour l'interprétation de Bach qu'il énonce dans son ouvrage "Comment je suis devenu pianiste" (1963) : jamais de fortissimi, les instruments de l'époque ne les permettaient pas ; aucune pédale sauf en de très rares exceptions ; pas de transcriptions pour le piano des oeuvres pour orgue -alors que c'était la mode, comme le jeu romantique - même si les transcriptions de Liszt et de Busoni sont impressionnantes ; aucun romantisme, certains moyens d'expressions n'étaient pas encore inventés à ce moment-là et n'ont tout simplement rien à faire dans la musique de Bach ; éviter tout extrême dans les tempi, il faut penser au son bref, difficile à tenir, des anciens instruments à touches ;  préserver le caractère dansant de la musique de Bach. Gieseking réfute tout intellectualisme mais il se fie à ses nombreuses -et très fouillées- lectures des partitions : "Seule l'intuition, supérieure à la raison et à tous les sentiments, est capable de guider la pensée comme la sensibilité, permet une juste divination, même au-delà des siècles". Et avec quelle vitalité le pianiste concrétise-t-il toutes ces recommandations que l'on  retrouve tout au long de l'écoute des 7 CD : simplicité, clarté de la polyphonie, couleur sonore, intensité de la pulsation rythmique chez ce pianiste pour qui le "talent est inversement proportionnel à la somme de travail requis"... pas plus de deux heures de travail par jour, ce qui laissait place à son autre passion : la chasse aux papillons. C'est encore Gieseking qui intitulait un de ses ouvrages : "la voie la plus courte vers la perfection d'exécution au piano". 
En relisant l'article du pianiste sur l'interprétation de Bach au piano de concert (1941) je ne peux m'empêcher d'à nouveau le citer : "On s'attendra peut-être à présent, avec toutes mes exigences d'authenticité du style et d'objectivité, à voir en moi un partisan du clavecin [...] Si tant de mes aimables collègues féminines n'adoraient pas cet instrument, je pourrais être assez méchant pour affirmer que seuls les musiciens dont la technique est insuffisante pour jouer du vrai piano aiment le clavecin. Mais ce serait peu courtois, surtout envers les dames..." Aujourd'hui, cela ne manquerait pas de faire un "buzz" sur les réseaux sociaux !!!
Bernadette Beyne

Son 8 - Livret 8 - Répertoire 10 - Interprétation 10

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