Le Deutsche Oper Berlin pleure la disparition de Gottfried Pilz, scénographe, à l'âge de 80 ans
Dans ses travaux, il ne s'agit pas de décoration, mais de rendre visible ce qui se trouve derrière un mur, ce qui est au-delà des limites, a déclaré Gottfried Pilz un jour. Et en effet, chacun des décors que Pilz a créés au cours de sa longue carrière reflétait cette réflexion sur l'essence et le message de l'œuvre sous-jacente : qu'ils situent concrètement l'action, comme son projet pour la mise en scène berlinoise des Huguenots de Meyerbeer, qu'il a fait jouer en 1987 dans un paysage berlinois de ruines de guerre, ou qu'il crée un de ces espaces plus abstraits, meublés avec parcimonie et déterminés par des changements de lumière et de couleur, comme pour ses mises en scène berlinoises des Dialogues des Carmélites de Poulenc ou d'Oedipe d'Enescu.
Avec sa volonté de rendre visible et présent le cœur des grandes œuvres du théâtre musical, le Salzbourgeois né en 1944 est rapidement devenu le partenaire d'une génération de metteurs en scène qui s'étaient fixé les mêmes objectifs : John Dew, par exemple, avec lequel il a travaillé de manière continue de 1980 à 1990 et qui l'a également amené au Deutsche Oper Berlin pour Les Huguenots et Faust de Gounod. Pilz avait connu la maison très tôt, au début des années 70, en tant qu'assistant de Filippo Sanjust et décorateur de plusieurs productions (dont la première de l'opéra de chambre Melusine d'Aribert Reimann en 1971), mais il devint alors -avec son collègue Peter Sykora- le scénographe qui allait marquer le plus durablement l'esthétique de l'ère Götz Friedrich. Gottfried Pilz travaillera avec Götz Friedrich lui-même jusqu'à la mort de ce dernier et sera responsable, entre autres, de productions comme Der Rosenkavalier, Un ballo in maschera, Boris Godunow et, en décembre 2000, de la dernière première de Friedrich, l'opéra pour enfants Amahl und die nächtlichen Besucher de Menotti.
L'exigence intellectuelle et la pensée globale que Pilz revendiquait pour ses travaux l'ont inévitablement amené à considérer -presque toujours en collaboration avec son épouse de l'époque, Isabel Ines Glathar- la création des costumes comme une partie intégrante de son travail. 18 productions devaient finalement lier Pilz au Deutsche Oper Berlin, outre la collaboration avec Friedrich et Dew, il faut surtout mentionner celle avec Günter Krämer (Dialogues des Carmélites, Ascension et chute de la ville de Mahagonny). Il y a deux semaines seulement, Pilz a assisté dans sa ville d'adoption, Berlin, à une manifestation organisée en l'honneur de son quatre-vingtième anniversaire, au cours de laquelle un livre sur lui et son œuvre a été présenté (Kerstin Schröder (Hsg.) : Gottfried Pilz. Bühne Kostüm Regie, Verlag Theater der Zeit).