Schmitt en démonstration orchestrale 

par

Florent Schmitt (1870-1958) : La Tragédie de Salomé, poème symphonique Op.50 ; Musique sur l’eau, Op.33 ; Oriane et le Prince d’Amour, suite, Op.83.bis ; Légende, Op.66. Susan Platts, mezzo-soprano ; Nikki Chooi, violon ; Women’s Choir of Buffalo, Kathleen Bassett ; Buffalo Philharmonic Orchestra, JoAnn Falletta. 2019 et 2020. Livret en anglais et français. 60’39’’

Les 150 ans de la naissance de Florent Schmitt n’ont pas foncièrement stimulé les éditeurs. Si Warner a remis en numérique un beau panorama des enregistrements patrimoniaux de son catalogue, cette initiative est restée isolée. C’est dans ce contexte de disette qu’il faut célébrer cette nouvelle parution Naxos avec en étendard la célèbre Tragédie de Salomé. La cheffe américaine JoAnn Falletta n’en est pas à son premier coup d’essai au bénéfice du compositeur, cet album vient prendre place aux côtés d’une précédente galette consacrée aux deux brillantes suites d’Antoine et Cléopâtre et au Palais hanté. 

Avec la Tragédie de Salomé, on est dans un parangon d’orientalisme musical avec une écriture foisonnante et généreuse en technicolor. L’effet de cette partition est toujours incroyable et on comprend l'admiration de Stravinsky qui écrivait : “Que c'est beau ! C'est un des plus grands chefs-d'œuvre de la musique moderne.” La baguette de JoAnn Falletta, poétique et narrative à souhait, dresse une lecture puissante, lumineuse et sensuelle de cette merveille musicale. C’est assurément l’une des plus belles versions aux côtés des grandes versions historiques de Jean Martinon (Warner) et Pierre Dervaux (Warner). 

Contraste saisissant avec la Musique sur l’eau dans sa version avec voix soliste. La musique se fait plus impressionniste et les contrastes virent à une palette plus limitée et moins explosive dans ses couleurs, mais on admire la science de l’orchestration de ce bijou sur un texte du très oublié Albert Samain dont les vers avaient séduit Fauré et Saint-Saëns. 

Retour au grand spectacle symphonique avec la suite tirée d’Oriane et le Prince d’Amour, ballet commandé pour la danseuse Ida Rubinstein sur un livret de Claude Séran. La force évocatrice de Schmitt compose un monde symphonique exubérant et presque cinématographique dans sa puissance suggestive ; la “Danse des Mongols” est ainsi un grand moment d’orchestre. 

La Légende qui clôt le disque est présentée dans sa version pour violon et orchestre (il en existe des éditions pour saxophone et alto). Le ton est mélodique et plus sombre mais il présente une autre facette du talent de cet orchestrateur hors pair. 

Les solistes, les forces chorales et instrumentales sont magnifiques sous la direction convaincante de JoAnn Falletta. 

Le son est excellent et le livret de présentation (que Naxos a eu l’amabilité de faire traduire en français), simple et efficace, contribuent au bonheur que procure cet album. 

Son : 10 – Livret : 10 – Répertoire : 10 – Interprétation : 10

Pierre-Jean Tribot

Un commentaire

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