Un collier de perles rares

par
Chailly

Ouvertures, Préludes et Intermezzi d'opéras de Verdi, Catalani, Rossini, Donizetti, Bellini, Giordano, Puccini, Ponchielli, Leoncavallo et Boito
Filarmonia della Scala, dir.: Riccardo CHAILLY
2016-DDD-76'35-Textes de présentation en anglais, français, allemand et italien-Decca 483 1148

Dès les balbutiements de la musique enregistrée, la tentation a été grande de graver les chefs-d'oeuvre de l'opéra, genre populaire entre tous. Mais la très courte durée du cylindre ou du 78 tours limita très longtemps les ambitions à ne graver que des airs isolés et des ouvertures ou autres pages symphoniques. Même à l'apparition du 33 tours, proposer un opéra complet sur disque fut une entreprise très ambitieuse... et c'est toujours le cas aujourd'hui. Le public lui-même, outre le poids financier que représentait l'achat d'un fort coffret, dut s'habituer à se lever de son siège toutes les 20-25 minutes pour change de face ou passer au disque suivant. Du temps fut nécessaire avant que le mélomane s'habitue à ce rituel tout autant qu'à l'effort de concentration requis sur une aussi longue période car voir un opéra et l'entendre sans le soutien visuel sont deux exercices fort différents. C'est ainsi que, tels des « ersatz », souvent de très bonne qualité, fleurirent des compilations d'ouvertures, ballets ou choeurs, le plus souvent dus à différents compositeurs sur un même disque, qui firent les beaux jours des catalogues Decca, Telefunken, Philips, Emi et bien d'autres. L'apparition du compact fit disparaître cette mode jusqu'à ce que, il y a quelques années, quelques courageux tentèrent de remettre ce genre de programmation au goût du jour, entre autres pour faire découvrir des pages méconnues. Riccardo Chailly nous proposait déjà, il y a quelques années, un « Viva Verdi ! » très réussi. Le chef italien récidive aujourd'hui et c'est un grand bonheur. L'ouverture de Il finto Stanislao, mieux connu sous le nom de Un giorno di regno, est l'une des très rares pages comiques sortie de la plume du chantre des Roncole, un moment de bravoure orchestrale pris ici à un tempo d'enfer et d'une difficulté d'exécution qui n'est pas inférieure à celle des ouvertures des Noces de Figaro, de La fiancée vendue ou de Ruslan et Ludmilla. Le prélude du 3ème au trio du 3ème acte de I Lombardi offre un parfait contraste avec son solo de violon tout droit sorti de Paganini. C'est ensuite l'admirable introduction à l'acte 3 de La Wally de Catalani dont on peut s'étonner qu'il n'ait pas encore été utilisé par le marketing comme illustration sonore d'un spot publicitaire. L'ouverture de La pietra del paragone de Rossini n'est autre que celle que le cygne de Pesaro utilisera quelques années plus tard pour Tancredi. Nous avons ensuite la très rossinienne introduction de Ugo, conte di Parigi de Donizetti, un petit bijou de finesse et de vitalité. L'ouverture de La Norma, bien connue, elle, bénéficie de l'écrin que Chailly construit avec amour pour cette gemme de Bellini. Nous passons ensuite au vérisme pour ne plus le quitter avec le prélude de l'acte 2 de l'extraordinaire Siberia d'Umberto Giordano, plein de tension glacée, et l'intermezzo désolé et si triste de Madama Butterfly du grand Giacomo. Contraste encore avec la dentelle du prélude de l'acte 4 de Edgar qui nous rappelle combien Puccini était un orchestrateur hors pair. La Danse des heures de La Gioconda (Ponchielli) et l'intermezzo de Pagliacci (Leoncavallo) sont bien connus et magnifiés comme jamais par les forces milanaises. Les préludes de I Medici de Leoncavallo sont sans doute la partie la moins explorée du programme et on se demande bien pourquoi: grandiose pour l'un, majestueux pour l'autre, ils nous offrent des sonneries hautes en couleurs, aux accents de chasse à courre, et une orchestration brillante, pleine de panache; un vrai régal. A quand une intégrale? Fin de programme toute en grandeur et en beauté avec l'impressionnant prélude de Mefistofele de Boito. Est-il utile de dire que Chailly est parfait dans cette sélection taillée sur mesure? Un disque magnifique qui s'écoute avec un immense plaisir. On regrettera seulement que la prise de son, très perfectible, nous rappelle cruellement qu'un John Culshaw ou un Victor Olof ne sont plus aux commandes...
Bernard Postiau

Son 8 - Livret 9 - Répertoire 10 - Interprétation 10

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