Victor Julien-Laferrière, violoncelle conquérant 

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Triomphateur de la première édition du Concours Reine Elisabeth consacrée au violoncelle, Victor Julien-Laferrière fait paraître un album qui met en reflets le célébrissime concerto de Dvořák et celui plus rare de Martinů. Rencontre avec un jeune musicien convaincu et convainquant.  

Votre nouvel album propose les concertos pour violoncelle de Dvořák et Martinů. Si Dvořák est l’un des tubes, peut-être même le concerto pour violoncelle le plus connu du monde, ce n’est pas le cas de celui de son compatriote Martinů. Qu'est-ce qui vous a orienté vers ce choix ? Comment avez-vous découvert cette oeuvre ? 

J’aime la musique de Martinu depuis la découverte à l’âge de 11 ans de sa troisième sonate pour violoncelle. Depuis je ne me lasse pas de découvrir peu à peu l’immense production qu’il nous a laissée. Dans ce disque, je cherchais des œuvres qui, par leurs différences autant que par leurs liens de parenté, pouvaient correspondre entre elles. Bien au-delà de la nationalité commune des deux compositeurs, qui n’est qu’un détail! Le concerto de Dvořák  est une magnifique porte d’entrée dans l’œuvre de  Martinů, et inversement.

L’interprétation du Concerto de Dvořák a été marquée par tant d'illustres et légendaires interprétations. Quel est votre état d’esprit avant d'enregistrer un tel chef-d'œuvre caractérisé par tant de versions marquantes ? Est-ce que vous avez écouté de grandes interprétations pour préparer votre enregistrement ? 

Je ne pense pas avoir écouté ce concerto en disque depuis ma jeune adolescence ! Sauf pour vérifier un détail ou une question que je pouvais me poser sur le choix de tel ou tel interprète à un endroit précis de la partition. Je suis bien plus au fait en ce qui concerne les enregistrements des concertos pour violon, par exemple... J’ai souvent joué ce concerto en concert ces dernières années et c’est la première chose que je prends en compte au moment de choisir le programme d’enregistrement. L’idéal recherché au disque se situe vers la restitution de la vitalité du concert plutôt que l’inscription dans une discographie mythique.

Qui dit concerto dit orchestre et chef d’orchestre ! Comment s’est passée la collaboration avec Gergely Madaras ? 

Je connaissais Gergely Madaras depuis notre rencontre à Saint-Pétersbourg il y a huit ans puis à Dijon quelques années après, c’est l’une des raisons qui m’ont décidées à enregistrer à Liège! Il possède une relation remarquable avec l’orchestre, mélange d’exigence, de naturel et d’humilité. J’ai eu le sentiment que nous partagions la même concentration durant cette enregistrement et j’ai hâte de donner ce programme en concert avec eux à l’automne.

Pour cet enregistrement vous étiez à Liège chez nous en Belgique pays où vous avez triomphé au Concours Reine Elisabeth. Est-ce que vous repensez de temps en temps à ce concours ? Qu’est-ce qu’il vous a apporté ? 

Il m’est difficile de revenir en Belgique sans repenser à cette période ! Je suis ravi d’avoir découvert ce pays sous toutes ses coutures, ou presque, depuis quatre ans ! Le concours m’a permis de concrétiser nombre de projets, d’oser en concevoir de nouveaux, il m’a apporté une plus grande liberté artistique. En cela il aura eu une influence prépondérante sur ma vie musicale. Mais je suis un petit peu jeune pour faire le bilan!

La scène française, qui a connu tant d’illustres violoncellistes semble continuer d’être une pépinière incroyable de talents. Qu’est-ce qui fait le secret de l’école française du violoncelle ? 

Ce secret est certainement à chercher du côté des formateurs, des professeurs d’écoles de musique partout dans le pays. Plusieurs périodes cruciales dans le développement du musicien se déroulent bien avant la rencontre avec le grand professeur. Mais la France n’est pas le seul pays à compter un fort vivier de violoncellistes et j’ai surtout l’impression que notre instrument poursuit son éclosion!

En tant que jeune musicien, comment vivez-vous la période actuelle ? 

On passe dans une même journée par tant et tant d’états et d’émotions. On tente de vivre en musique quoi qu’il se passe autour de nous. L’occasion nous est donnée de réfléchir à notre pratique, de comprendre ce qu’ont pu vivre certains artistes du passé plongés dans des situations exceptionnelles ou encore de développer notre univers musical indépendamment du concert. Avec du recul nous verrons si cela aura été une période fondatrice ou  juste une manière de combler le vide.

Comment envisagez-vous l’avenir de la musique classique au sortir de cette période ?

L’ancrage local en sortira certainement renforcé et c’est de cette manière qu’on ira toucher tous les publics. A contrario du numérique et de l’image qui, j’espère, ne continueront pas de gagner toujours plus de terrain... Mais j’ai dépensé beaucoup d’énergie depuis un an à essayer de ne pas me projeter !

Le site de Victor Julien-Laferriere :  www.victorjulienlaferriere.com

  • A écouter :

Antonin Dvořák :  Concerto pour violoncelle n°2, en si mineur,  Op.104 ;  Bohuslav Martinů :  Concerto pour violoncelle  n°1, H196.  Victor Julien-Laferrière, violoncelle ; Orchestre philharmonique royal de Liège, Gergely Madaras. 1 CD Alpha 731

 

Propos recueillis par Pierre-Jean Tribot  

Crédits photographiques : Richard Dumas /  OPRL

 

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