Yossif Ivanov confrontation russe en ré majeur 

par

Pyotr Ilyich Tchaïkovsky (1840-1893) : Concerto pour violon en ré majeur, Op.35 ; Igor Stravinsky (1882-1971) : Concerto pour violon en ré majeur W 61-64. Yossif Ivanov, violon ; Brussels Philharmonic Orchestra, Damian Iorio (Tchaïkovsky) et Alexei Ogrintchouk (Stravinsky). 2021. Livret en neerlandais, français et anglais. Warner.  0190296416514

Notre excellent compatriote Yossif Ivanov signe un album qui oppose deux concertos russes unis à travers les temps par la même tonalité solaire de ré majeur. L’affiche est finalement assez évidente mais pas si courante au disque. Notons également en prélude que le musicien a dédié cet album à son professeur Igor Oïstrakh décédé l'an passé et figure majeure de l'enseignement du violon en Belgique. 

La discographie de Yossif Ivanov se concentre principalement sur des grands concertos du XXe siècle : Bartók, Chostakovitch, Dutilleux ou Rafaël d’Haene. On n’est ainsi pas étonné de le voir aborder le Concerto pour violon de Stravinsky dont il livre une fabuleuse interprétation. Le violoniste est très à son aise dans cette partition brillante mais sur le fil d’une ironie grinçante avec ses influences baroque et sa virtuosité étincelante. La technique est hautement  assurée tout comme le second degré narratif si important pour ne pas prendre cette partition trop au sérieux et en faire ressortir toute la vigueur. L’accompagnement d'Alexei Ogrintchouk au pupitre du Brussels Philharmonic est du même niveau et ensemble, ils dialoguent au point de sembler s’amuser à rivaliser de gouaille. C’est sans contestation, l’une des plus belles versions récentes de cette partition aux côtés de celle d’Ilya Gringolts (Bis).

La concurrence est redoutable dans le Concerto pour violon de Tchaïkovsky, mais Yossif Ivanov en évacue l'esbroufe et le mielleux. L’approche musicale est franche et ne cherche pas le vain sentimentalisme. Dans le mouvement lent "Andante canzonetta", on apprécie ce ton presque chambriste d’un beau dialogue avec les pupitres de l’orchestre, en particulier les vents. La technique est toujours aussi assurée et la sonorité est ronde et flatteuse ce qui sied parfaitement aux mouvements rapides. Cependant, le chef Damian Iorio ne semble pas à son aise avec la vision décantée et réfléchie du soliste et il plombe le premier mouvement. Si la direction se fait timide dans le second mouvement, elle laisse les pupitres dialoguer. L’Allegro vivacissimo conclusif est emporté au panache d’un orchestre plus concerné sans se hisser pourtant au niveau du soliste. Hélas, cette lecture peine à convaincre par le manque d’adéquation orchestrale à la vision de Yossif Ivanov. 

On tient donc un ½ disque avec un magistral concerto de Stravinsky qui affirme le talent exceptionnel de Yossif Ivanov.  

Son : 8  Notice : 8  Répertoire : 10  Interprétation : 8 (mais 10 pour le Stravinsky seul). 

Pierre-Jean Tribot

 

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