"Des Canyons aux étoiles" d’Olivier Messiaen, 50 ans

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Des canyons aux étoiles est la partition orchestrale la plus vaste et monumentale d'Olivier Messiaen par son programme et par sa durée supérieure à l'heure et demie. Cette musique minérale, suggestive et granitique s'impose comme l'un des sommets de l'œuvre du compositeur français.

Commandée pour les célébrations du bicentenaire des Etats-Unis (1776), la pièce, composée entre 1971 et 1974, est créée à New York en 1974. Pour s'imprégner du climat américain, Messiaen visite le site de Bruce Canyon dans l'Utah d'où ce titre. Cette œuvre présente, comme toujours chez Messiaen, une référence religieuse, ainsi l'âme doit s'élever des canyons aux étoiles, et même plus haut par une glorification de Dieu dans toutes ses créations terrestres et spirituelles. Mais au-delà ces allusions, Des canyons aux étoiles se veut aussi une œuvre « géologique, astronomique » et une « partition couleur » qui reprend toutes les teintes de l'arc-en-ciel et des roches des Grands canyons. La partition utilise des chants d'oiseaux, particulièrement ceux de l'Utah et des îles Hawaï.

La partition se décompose en douze pièces groupées en trois parties. La première partie s'ouvre par Le désert, pièce brève d'introduction, elle est marquée par une ouverture et une conclusion confiée au cor ; la partie centrale présente plusieurs chants d'oiseaux dont celui du sirli du désert. La section suivante se nomme Les orioles, du nom des loriots de l'ouest américain. Les volatiles sont rendus par de magnifiques effets de timbres et d'harmonie. « Ce qui est écrit sur les étoiles » est de forme cyclique avec un passage virtuose fondé sur des chants des oiseaux japonais et américains. Une partie de piano seul, très développée et suggestive, est au cœur du Cossyphe d'Heuglin du nom d'un oiseau d'Afrique du sud. Cedar Breaks et le Don de Crainte est l'alliance d'un hommage au Cedar Breaks, l'un des sites les plus impressionnants de l'Utah et du « Don de Crainte », l'un des sept dons de l'esprit. L'orchestre utilisé dans son entier, avec même une machine à vent, est ici d'un grand raffinement.

La seconde partie s'ouvre par L'appel interstellaire confié au cor solo qui doit ici dépasser les limites de virtuosité. Partition redoutable, souvent imposée lors des concours de recrutement des orchestres, L'appel interstellaire reste confiné, sur décision du compositeur, aux exécutions intégrales des Canyons, en dépit du souhait de nombreux cornistes d'étoffer leur répertoire de concert soliste. Bryce Canyon et les rochers rouges orange, d'une durée d'un quart d'heure, est la plus longue section de la pièce. L'orchestration qui fait la part belle aux vents et aux cuivres, tend à rendre toutes les facettes de ce paysage merveilleux.

La troisième partie, introduite par Les ressuscités et le chant de l'étoile Aldébaran, est un mouvement lent aux teintes translucides qui cite le chant de quatre oiseaux. Le moqueur polyglotte est un oiseau américain au chant particulièrement véloce, bien rendu ici par la partie de piano. Un ton lumineux et ensoleillé caractérise la grive des bois, s'ouvre sur Omao, Leiothrix, Elepaio, Sham, quatre oiseaux de tous les continents. Dans ces deux parties, les cuivres, et surtout les cors, sont particulièrement sollicités. La partition se clôt par Zion Park et la Cité céleste où ce site géographique est comparé à la Jérusalem céleste. Des chorals de cuivres, des chants d'oiseaux et un carillon ouvrent ainsi la partition sur le paradis.

Ce grand succès valut au compositeur un hommage inédit : une montagne de l'Utah est baptisée, en 1977, Mont Messiaen.

 

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