Au Concert

Les concerts un peu partout en Europe. De grands solistes et d’autres moins connus, des découvertes.

Résultats de la Finale de la Troisième édition du Concours International de direction d’Orchestre d’Opéra à Liège

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Le Concours International de Direction d’Orchestre d’Opéra s’est clôturé ce samedi 15 février 2025.

Lors de cette dernière journée, les trois finalistes se sont illustrés dans un extrait d’opéra choisi par le jury. Johann-Sebastian Guzman a dirigé un extrait de Carmen (Bizet), Matteo Dal Maso a dirigé un extrait de la Cenerentola (Rossini) et Sieva Borzak a dirigé un extrait de Rigoletto (Verdi).

Après cette dernière journée musicale riche en émotions pour les artistes et le public, venu en nombre pour assister au dénouement de cette compétition, le jury s’est retiré pour délibérer.

Avant d’annoncer les résultats, Stefano Pace et Giampaolo Bisanti, ont une nouvelle fois remercié et félicité chaleureusement l’Orchestre, les Chœurs et les solistes pour leur professionnalisme et le talent dont ils ont fait preuve lors de l’ensemble des épreuves du Concours. En outre, ils ont permis au jury de se faire une idée concrète de l'interprétation voulue par les différents candidats. Les équipes techniques ont également été remerciées pour tout le travail fourni mais que l’on ne. voit pas forcément. Pourtant, sans eux, un pareil évènement ne pourrait pas avoir lieu.

Voici le palmarès de la Troisième édition du Concours International de Chefs d’Orchestre d’Opéra :

Flagey Piano Days 2025 : András Schiff sublime, Angela Hewitt remarquable

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Chaque année se tiennent au mois de février les Flagey Piano Days, cinq journées passionnantes pour les pianophiles qui se se réjouissent tout autant de retrouver dans le cadre du paquebot des Étangs d’Ixelles aussi bien des grands noms à la réputation établie que de découvrir des talents prometteurs.

Pour cette édition, notre choix s’était porté sur deux pianistes de premier ordre qui, curieusement, ne s’étaient encore jamais produits dans l’acoustique parfaite du Studio 4 de ce qui fut la Maison de la radio. 

Pour ouvrir ces Piano Days, les organisateurs avaient fait appel à András Schiff, un pianiste dont la longue carrière a été l’illustration non seulement de dons musicaux et pianistiques hors du commun, mais aussi d’une volonté d’aborder les oeuvres dans un remarquable mélange de modestie, d’érudition et de volonté d’interroger les textes au plus près sans jamais vouloir briller aux dépens de l’intégrité musicale. (Ceux qui aimeraient en savoir plus sur les conceptions de ce grand artiste pourront liront avec  intérêt le livre La Musique naît du silence publié chez Alma Nuvis en 2018, regroupant des entretiens de Schiff avec le critique Martin Meyer et des textes dûs au pianiste lui-même.) 

Pour ce récital donné devant une salle comble au point que des chaises avaient été rajoutées sur la scène et auquel assistaient également le Roi Philippe et la princesse Eléonore, András Schiff n’avait pas prévu de programme à l’avance et prit chaque fois la parole dans un très bel anglais -on n’est pas Sir András Schiff pour rien- pour annoncer les morceaux interprétés. Le récital s’ouvrit par le Caprice sur le départ de son frère bien-aimé BWV 992 de Bach, compositeur que Schiff a toujours superbement défendu, combinant son impeccable formation pianistique à l’Académie de Budapest avec un apprentissage ultérieur auprès du claveciniste britannique George Malcolm. Dès l’abord, on ne peut qu’admirer la sonorité pleine et riche, l’articulation soignée, le parfait équilibre des voix et la souplesse féline du pianiste. Suit alors la Sonate N° 17 en si bémol majeur K. 570 de Mozart. Dans l’Allegro introductif,  Schiff fait entendre un Mozart sobre et précis, sans joliesse indue. Les traits de virtuosité sont invariablement limpides et d’une irréprochable égalité. Après un Adagio d’une belle et digne simplicité, l'œuvre se conclut sur un Allegretto, abordé avec gaieté mais sans exubérance, montrant à quel point Schiff prend le compositeur au sérieux. 

Elsa Dreisig à La Monnaie : l’art de la bonne chanson

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Il est des jours où Cupidon ne manque jamais sa cible… En cette veille de Saint-Valentin, il fit aimer la musique même à ceux qui, peut-être, n’en voulaient rien savoir.

Il faut dire que le programme concocté ce 13 février par Elsa Dreisig et Romain Louveau était irrésistible. Fort bien construit, il prenait – qui l’eût cru ? – l’amour comme fil conducteur : Dichterliebe (Les Amours du poètes) de Robert Schumann et La Bonne Chanson de Gabriel Fauré, agrémentés de quelques extraits de Bilitis, poème en douze chants, de Rita Strohl et de deux pièces pour piano du compositeur contemporain Othman Louati.

Outre son charme naturel (qui ne la quitte jamais) et sa voix des grands jours (qui lui fait rarement défaut), la soprano franco-danoise s’était parée pour l’occasion d’une tenue de circonstance : une robe rouge-orangée aux grands cœurs. De quoi faire tomber en pâmoison le public de La Monnaie, que l’on sait pourtant exigeant.  

En première partie, les seize lieder du cycle schumannien défilèrent en l’espace d’un instant qui parut bien trop court. Les vers de Heinrich Heine, on le sait, content les amours déçues du poète avec sa cousine Amalie. Les quatre premiers poèmes relatent la naissance de l’amour, les cinquième et sixième l’éloignement de l’aimée, les trois suivants sa trahison, et les derniers le désespoir du poète. Le compositeur se les approprie pour clamer sa passion à celle qu’il convoite depuis toujours, Clara Wieck. “Je n’ai pas cessé d’être dans la crainte de ne pas arriver à temps auprès de toi”, soupire-t-il ; “une fois, j’ai cru que j’aillais trouver dans les journaux l’annonce de tes fiançailles. J’ai senti alors ma nuque comme tordue vers le sol, au point que j’ai crié tout haut.” Âgé de 30 ans, il peut enfin espérer l’épouser, au terme d’un procès engagé à l’encontre de son futur beau-père et qu’il vient de remporter. 1840 sera l’année la plus productive de sa carrière : outre Dichterliebe op. 48, qui constitue probablement le plus célèbre et le plus accompli des cycles romantiques, citons, parmi d’autres, Myrthen op. 25, les Liederkreise op. 24 et op. 39, et Frauenliebe und- leben (L’Amour et la vie d’une femme) op. 42. 

Voyage enchanté et enchanteur à la Philharmonie du Luxembourg

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Ce jeudi 13 février, le Luxembourg Philharmonic, dirigé par Sir John Eliot Gardiner, nous a proposé un programme envoûtant. Des chaudes nuits arabes aux froides aurores boréales finlandaises, ils nous ont emmenés dans un voyage palpitant et hors du temps. 

Pour débuter ce programme, nous avons pu entendre Le Corsaire, ouverture op.21 H 101B d’Hector Berlioz. Dans la lignée de l’ouverture du Carnaval Romain ou celle du Roi Lear, Le Corsaire est un chef-d’œuvre basé sur une des nombreuses inspirations littéraires du compositeur français. Œuvre bouillonnante d’activité, elle fut l’occasion d’observer l’unité présente dans les cordes de l’orchestre. Les nombreux traits virtuoses tutti furent interprétés avec une précision et une clarté sans faille. Dans le fond de l’orchestre, les cuivres ont également joué leur rôle à merveille, insufflant une puissance et une amplitude majestueuse à l’orchestre entier. C’est un public d’ores et déjà conquis qui a accueilli chaleureusement cette débauche d’énergie à couper le souffle. 

D’un compositeur français à un autre, changement radical d’atmosphère pour la deuxième pièce de la soirée, Shéhérazade de Maurice Ravel. Cette pièce est d’une douceur extrême et en complète opposition avec l’ouverture du concert, ce qui installe une atmosphère tout à fait particulière, le calme plat après la tempête. Pour interpréter cette œuvre, l’orchestre luxembourgeois fut rejoint par la soprane égyptienne Fatma Said. Dans une tenue brillante aux reflets d’or et d’argent, Fatma Said nous a envoûtés dès sa première intervention. Avec une diction très claire et un jeu théâtral très à propos, elle a rendu l’œuvre très lisible. Cette lisibilité fut également apportée par Sir John Eliot Gardiner qui maintint une balance parfaite entre l’orchestre et la chanteuse, mais aussi dans l’orchestre en lui-même. Chaque minuscule intervention perlée des harpes, chaque effet délicat à la percussion, chaque apparition timide d’un bois enchanteur fut parfaitement audible et dans une nuance réfléchie et maîtrisée. 

Pour le grand bonheur du public présent en nombre, la soprane nous a offert en bis l’œuvre Aatini Al Naya Wa Ghanni, en français Donne moi la flûte et chante. Composée par Najib Hankash, l’œuvre fut interprétée dans un arrangement orchestral très épuré, dans la lignée de Shéhérazade. Les passages les plus calmes, dans lesquels Fatma Said n’était plus accompagnée que par la harpe, furent d’une beauté à couper le souffle et des applaudissements nourris du public ponctuèrent ce bis très émouvant. 

En deuxième partie, nous avons pu entendre la Symphonie No. 5 en mi bémol majeur de Jean Sibelius. Fruit d’un long labeur et de plusieurs révisions parfois drastiques, c’est l’une des œuvres les plus abouties du maître finlandais, reconnaissable par ses 6 accords finaux tout aussi stupéfiants qu’énigmatiques. Naviguant avec aisance d’une atmosphère à l’autre, d’un paysage ouvert à un recoin plus reculé du pays, l’orchestre luxembourgeois nous a emmené en voyage à travers la Finlande grandiose et attirante que dépeint Sibelius. Les passages nous ayant procuré des frissons sont innombrables tant les musiciens furent brillamment guidés par Sir John Eliot Gardiner et ce sont de très longs applaudissements fournis qui ont ponctué cette belle soirée de voyage au pays des contes et légendes.

Philharmonie du Luxembourg, 13 février 2025.

Alex Quitin, Reporter de l’IMEP

Crédits photographiques :  Inês Rebelo de Andrade.

Orgue et danse à la Philharmonie de Paris, pour une hybridation réussie ?

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Spectacle Plenum / Anima à la Philharmonie de Paris le 8 février 2025

La Passacaille et fugue pour orgue en do mineur de Bach, interprétée par Olivier Latry et chorégraphiée par Benjamin Millepied. Les Danses polovtsiennes de Borodine, interprétées à l’orgue par Shin-Young Lee et chorégraphiées par Jobel Merdina. Et enfin, Le Sacre du printemps de Stravinsky, interprété par nos deux organistes et chorégraphié par Idio Chichava.

Voilà un programme inédit, bigarré et intriguant. Pour n’en rien rater, Claire l’organiste et Maïa la danseuse ont assisté de concert à cette soirée, dans le décor majestueux de la Philharmonie de Paris. Voici leur compte-rendu, rédigé à quatre mains.

Quand une rédactrice “Danse” et une rédactrice “Musique” décident d’écrire ensemble un compte-rendu de spectacle, force est de constater qu’elles ne prennent pas leurs notes au même moment ni sur les mêmes choses ! Si l’une est focalisée sur ce qui se passe devant, à l’intérieur d’un carré délimité par de grands néons blancs, l’autre a souvent la tête tournée vers la droite, pour observer comment Olivier Latry et/ou Shin-Young Lee domestiquent la large console blanche du grand-orgue Rieger de la Philharmonie de Paris, avec ses 4 claviers, son pédalier et ses 91 jeux. Quand l’une note “ trémolo au pédalier en double octave” l’autre relève “de très beaux fouettés sautés en ligne qui se croisent”. Et elles se demandent si, d’une part, l’orgue va réussir le test de sortir d’un édifice religieux (et d’un répertoire sacré) et si, d’autre part, les chorégraphies proposeront quelque chose de nouveau.

Première équipe à s’avancer sur scène : 8 danseurs de la compagnie LA Dance Project, du chorégraphe Benjamin Millepied, habillés en noir et blanc, dans des matières fluides. À leur droite, vêtu d’un strict costume de ville et chaussé de souliers en cuir, Olivier Latry, qui s’installe à la console de l’orgue de la Philharmonie. 

Présences 2025 : ode à Olga Neuwirth

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Même si la nuit a été courte (de plaisantes rencontres à la médiathèque de Mâcon se sont prolongées malgré l’heure matinale du train, le lendemain vers Paris), je profite de la proximité de la Gare de Lyon avec la Maison Européenne de la Photographie pour y voir l’exposition de Dennis Brown, qui, dès les années 1970, fait de Bob Marley ou John Lydon des icônes argentiques – au The Cure du soir précédent, j’accole ainsi reggae et punk (même capsule temporelle, autres revendications musicales) – avant de rejoindre, en soirée, la salle Pierre Boulez (je vous reparlerai bientôt du centenaire de sa naissance) pour une esthétique à des années-lumière des précédentes – la plaisir de l’éclectisme, l’incessante porosité des frontières ; même les murs Trump-peurs échouent à contenir la diversité (créative) humaine.

Luciano le jeune, Berio le restaurateur

Luciano Berio, compositeur italien pionnier de l’électroacoustique (il fut responsable du département dédié à l’Ircam), est deux fois au programme du concert du vendredi à la Grande Salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris : son beau Magnificat de 1949 témoigne à la fois de l’influence de son professeur au Conservatoire de Milan, Giorgio Federico Ghedini, et du choc ressenti à la fin de la seconde guerre mondiale, quand vient la libération, que saute le verrou culturel du fascisme et, avec lui, le mur derrière lequel les nouvelles musiques restaient jusqu’alors cachées. Si, pour Sinfonia, Luciano Berio donnait aux voix (amplifiées) des textes de James Joyce, Samuel Beckett ou Claude Levi-Strauss et aux interprètes un matériau musical emprunté au passé, sous forme de citations d’Alban Berg, Igor Stravinsky, Hector Berlioz, Paul Hindemith ou Karlheinz Stockhausen, amalgamées sur la deuxième symphonie de Gustav Mahler, pour Rendering, ce sont les esquisses écrites par Franz Schubert au crépuscule de sa vie (à 31 ans) et destinées à une dixième symphonie, que Berio entreprend de restaurer, partant de son propre point de vue musical pour sauvegarder, parfois et parfois pas, la couleur schubertienne, complétant les vides d’un « tissu connectif » changeant et réservé, annoncé par le célesta.

Olga Neuwirth naît en Styrie en 1968 de parents entourés d’artistes influencés par la contre-culture, baignés de cinéma, de littérature, de musique, deux sauvageonnes (avec sa sœur) dans un pays « gris, conservateur […], pétri de conventions » ; elle prend de son père, destiné à la magistrature et détourné vers le piano (de jazz), le goût qui la conduit vers la trompette (celle de Miles Davis), qu’elle doit pourtant abandonner après un grave accident de voiture – occasion, après la rencontre avec Hans Werner Henze, de s’ouvrir à la composition, en même temps qu’au lien entre musique et politique. Elle est la compositrice à l’honneur de cette édition 2025 du festival de Radio France, même si, retenue à Vienne pour des raisons familiales, elle n’assiste pas à cette consécration française qui lui offre au moins une pièce dans chaque programme. On la connaît pour ses inspirations larges, sa musique sauvage aux babines retroussées, son penchant pour la métamorphose : Locus ... doublure ... solus (au titre pris à celui du roman fantasmagorique de Raymond Roussel, avec qui elle partage l’obsession des chiffres), pour piano et orchestre (Tamara Stefanovich et le Philharmonique de Radio France), pervertit la personnalité sonore de cet instrument bourgeois par excellence en jouant sur l’interaction avec ceux qui l’entourent : altos, célesta, piano électrique (échantillonneur) fabriquent à l’instrument soliste une ombre, une doublure…

Emmanuelle Bertrand fait revivre les voix de Maurice Maréchal et de son "violoncelle de guerre"

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Ce n’est pas nouveau : il y a, en France, une formidable école de violoncelle. Elle a commencé avec Martin Berteau (1691-1771), et de nos jours Emmanuelle Bertrand (née en 1973) en est une des plus dignes représentantes. Elle raconte que son amour du violoncelle vient d’un concert auquel elle a assisté quand elle était toute petite. Sur scène, le célèbre pédagogue Jean Deplace (1944-2015), qui deviendra son professeur. Il avait lui-même étudié avec Maurice Maréchal (1892-1964), que l’on peut considérer comme le premier représentant moderne de cette fameuse école, auquel succéderont ces grands noms que sont Pierre Fournier (1906-1986), André Navarra (1911-1988), Paul Tortelier (1914-1990) et Maurice Gendron (1920-1990).

Les nombreux enregistrements que nous a laissés Maurice Maréchal laissent entendre un jeu altier, à la fois spontané et rigoureux, très nuancé, avec une main gauche qui n'est pas toujours d'une justesse irréprochable, mais extrêmement expressive, et un archet d'une vitalité sans cesse renouvelée. Il était, assurément, un grand musicien.

En 1914, au moment de la mobilisation, il allait sur ses vingt-deux ans. En raison de son âge, il était déjà incorporé dans l’armée depuis près d’un an. Il avait eu le Premier Prix de violoncelle du Conservatoire de Paris trois ans plus tôt, et était déjà considéré comme l’un des espoirs les plus prometteurs de cette école française de violoncelle déjà tricentenaire. Ce statut lui a permis de traverser la guerre dans des conditions relativement privilégiées.

Mais sans violoncelle à lui. Quand il le pouvait, il en empruntait un. Jusqu'au jour où deux menuisiers, Antoine Neyen et Albert Plicque (morts au front, tous deux, quelques semaines plus tard) lui en ont fabriqué un, avec du bois assez grossier, pris dans une caisse de munition allemande. Ils disposaient d’un outillage assez rudimentaire, auquel manquait probablement un fer chauffant qui aurait permis de courber le bois. De sorte que ce violoncelle de guerre, dit le « Poilu » car né dans les tranchées, a un aspect beaucoup plus anguleux qu’un violoncelle classique, même si ses proportions en sont très proches (ses auteurs ayant bénéficié des conseils du destinataire).

A Genève , un récital de l’étourdissant  Rafał Blechacz

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Pour sa série ‘Les Grands Interprètes’, l’Agence de concerts Caecilia invite le pianiste polonais    Rafał Blechacz que l’on n’entend que sporadiquement en Suisse. Premier Prix du 15e Concours Chopin de Varsovie en 2005, lauréat du Gilmore Artist Award en 2014, ce quadragénaire accomplit une grande carrière internationale et passe pour l’un des grands interprètes de Chopin  à notre époque. 

Au Victoria Hall de Genève, il commence son programme du 11 février par l’une des plus célèbres sonates de Beethoven, la Quatorzième en ut dièse mineur op.27 n.2 dite Clair de lune.  Dans l’Adagio sostenuto initial tellement galvaudé, il tire de la profondeur des basses un cantabile sobre qui se développe dans un son feutré pour diluer finalement ses croches en triolets dans le halo de la pédale de droite.  L’Allegretto médian a une légèreté bucolique dont le Trio soulignera le caractère agreste, alors que le Presto agitato final greffe une véhémence anguleuse au double accord  concluant chaque arpège de doubles croches ascendantes, véhémence  qu’il tempère par un contre-sujet au lyrisme fiévreux. Cette opposition de coloris marquera le développement jusqu’au déferlement de traits en dents de scie parcourant l’ensemble de la tessiture jusqu’aux claironnants accords conclusifs.

Résultats du Quart de Finale de la Troisième édition du Concours International de Direction d’Orchestre d’Opéra à Liège

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Le Concours International de Direction d’Orchestre d’Opéra s’est poursuivi ce mercredi 12 février avec le Quart de Finale. Lors de cette troisième journée, 12 candidat.e.s se sont illustrés dans des extraits d’opéras choisis par le jury. Ils devaient faire une répétition musicale avec solistes au piano afin de travailler l’extrait choisi avec les chanteurs.

Au programme de ce Quart de Finale, des extraits des œuvres suivantes : 

I Capuleti e i Montecchi (Bellini), Norma (Bellini), Anna Bolena (Donizetti), Die Entführung aus dem Serail (Mozart), Les Contes d’Hoffmann (Offenbach), Nabucco (Verdi). Ces extraits d’œuvres constitueront également le programme de la demi-finale. 

Après cette journée intense pour les artistes et le public, le jury s’est retiré pour délibérer. Ils doivent sélectionner six candidats pour la Demi-Finale ayant lieu ce jeudi 13 février.

Mention spéciale aux solistes qui ont brillamment exécuté la moindre requête des candidats avec beaucoup de brio afin de donner vie à l’interprétation de chacun des candidats.

La Folle Journée 2025 : une édition triomphale 

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Une mobilisation sans faille pour un festival incontournable

La 31e édition de La Folle Journée de Nantes s’est achevée le 2 février avec un succès retentissant. Sur 140 000 billets mis en vente, 135 000 ont trouvé preneur, confirmant l’attachement du public à cet événement annuel. L’annonce brutale, quelques semaines auparavant, d’une baisse de 70 % des subventions culturelles dans la région Pays de la Loire n’a fait que renforcer cette mobilisation.

Avec plus de 300 concerts répartis sur cinq jours, près de 2 000 artistes issus des cinq continents et un répertoire de plus de 1 800 œuvres, l’organisation de l'événement force le respect. Malgré les difficultés que traverse le milieu culturel, cette fête bien ancrée dans le paysage nantais a su maintenir son élan. Comme l’a affirmé son fondateur et directeur artistique, René Martin, lors de la conférence de presse du dimanche 2 février : « La Cité (des Congrès de Nantes) est un vaisseau qui sait s’adapter. De la Covid, on s’en est sorti, on s’en sortira donc cette fois-ci. » Une conviction qui, sans doute, fait la force et la résilience de l'événement.

Sophia Liu, jeune prodige du clavier

La Folle Journée s’est imposée comme un tremplin pour les jeunes artistes, notamment les pianistes. Il y a plus de dix ans, Alexandre Kantorow faisait ses débuts avec orchestre sur la grande scène de la Cité des Congrès. Cette année, c’est Sophia Liu, une Canadienne de 16 ans elle aussi, qui a marqué les esprits par ses interprétations magistrales. Récemment produite à la Fondation Louis Vuitton, cette élève de Dang Thai Son est un véritable phénomène. Son programme – les Troisième et Quatrième Impromptus de Schubert, Andante Spianato et Grande Polonaise Brillante et les Variations sur "Là ci darem la mano" de Chopin – ne semblait pas, de prime abord, révéler une singularité particulière. Pourtant, dès qu’elle pose les mains sur le clavier, elle captive par une musicalité fluide et naturelle. Son talent réside aussi dans les subtiles surprises qu’elle introduit, jouant en forte là où personne ne l’attend, et ce, sans la moindre extravagance. Dans Chopin, sa personnalité musicale s’affirme pleinement. L'équilibre qu’elle confère à Andante Spianato et Grande Polonaise Brillante – une œuvre où les motifs répétitifs peuvent parfois nuire à la structure – est remarquable. La pièce, souvent plate sous des doigts moins inspirés, se révèle pleine de nuances et de relief. Dans les Variations sur « Là ci darem la mano », elle offre un véritable bel canto pianistique, avec une vocalité si prégnante qu’on croirait entendre les respirations d’un chanteur. L’atmosphère théâtrale de l’opéra se dessine naturellement, avec des jeux d’ombre et de lumière presque visuels. Au fil des variations, elle fait surgir les différents personnages de Don Giovanni avec une éloquence saisissante. Une telle maîtrise sans une virtuosité gratuite est rare, surtout à son âge. Son avenir s’annonce des plus prometteurs.

Beaux claviers

La Folle Journée, toujours fidèle à son engagement envers l'excellence, a mis en lumière cette année encore des talents exceptionnels au clavier. Adam Laloum, dont le nom est synonyme de profondeur et de sensibilité, a fasciné son public avec deux œuvres majeures de Schumann, dans le cadre de la thématique « Leipzig 1838" » : Kreisleriana et la Novellette op. 21 n° 8. Si Kreisleriana est un terrain familier pour de nombreux pianistes, peu s’attaquent aux Novellettes. De cette œuvre qui s’étale sur une cinquantaine de minutes, pleine de contrastes et d'émotions, il a choisi la huitième et dernière, la plus ample, qui partage avec Kreisleriana une certaine similitude d’esprit. L’exécution de Laloum, le samedi 1er février à 11h15, a transcendé l’heure matinale, et son interprétation immersive du répertoire romantique allemand a transporté les spectateurs dans un autre monde, riche en nuances et en poésie.