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À Bayreuth, un Rheingold sauvé par sa musicalité

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Si l’on sait à quel point le thème de la rédemption par l’amour est inhérent à la globalité de l’œuvre wagnérienne, l’édition 2025 de la Tétralogie ne devra son salut qu’à la qualité de la direction de Simone Young, dont le travail sur les couleurs orchestrales impressionne, ainsi qu’à quelques chanteurs particulièrement méritants.

Alors que se profile son dernier tour de piste, le Ring de Valentin Schwarz ne séduit pas pour autant davantage. Force est toutefois de constater que, malgré l’esquisse des différents partis pris de sa vision – personnification de l’anneau sous la forme d’un enfant, divinités du Walhalla au comportement kardashianesque –, ainsi que l’esthétique froide et impersonnelle en découlant, son traitement du matériau originel ne donne encore que peu d’urticaire durant ce simple prologue.

Sur scène, trois interprétations sont particulièrement remarquées. En Alberich, Olafur Sigurdarson, désormais bien familier du rôle in situ, marque d’entrée avec son timbre large et sa tessiture lyrique que vient sertir une prononciation impeccable, encore accentuée par l’excellente mise en place rythmique. La justesse dans les exclamations aiguës ainsi que la projection particulièrement bien dosée sont au surplus des plus appréciées. Difficile également de ne pas ovationner l’Erda d’Anna Kissjudit, dont les longues phrases sont une démonstration, tant de constance que de musicalité et de compréhension, tout en lui conférant une présence scénique indéniable. Finalement, l’on avait sur le plateau en les personnes de Nicholas Brownlee et Tomasz Konieczny deux profils antagonistes du baryton wotanesque. « Je chante le rôle, Birgit Nilsson le hurle », déclarait un jour Germaine Lubin en parlant  d’Isolde. Un comparatif peut nonobstant être fait entre le Donner de Brownlee, au vibrato singulièrement dense, toujours parfait dans ses tempi, dont le clair du timbre n’a d’égal que celui des voyelles et dosant savamment sa projection, et le Wotan de Konieczny, dont la grande clarté de timbre et de voyelles n’est obtenue qu’au prix d’une tendance à la surprojection, si ce n’est au hurlement avec les déséquilibres acoustiques en découlant.