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De l’opéra baroque à la musique populaire : Styriarte célèbre 40 ans de passions musicales

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Jusqu’au 1er juillet, la ville autrichienne de Graz vibre au rythme de Styriarte, le festival qui, à ses débuts, était intimement lié au travail de Nikolaus Harnoncourt qui y résidait. Cette année, la manifestation célèbre ses 40 ans. L’opéra Das verwunschene Glück (Le Bonheur enchanté) a marqué avec éclat l’ouverture du festival.

Le Bonheur enchanté, opéra pour le mariage de Leopold Ier 

La première représentation de cet opéra a eu lieu le 21 juin au château d’Eggenberg, situé en périphérie de la ville. Ce lieu historique, jadis théâtre des intrigues familiales des Habsbourg-Eggenberg, accueille actuellement l’exposition Ambitions et Illusions, qui retrace l’histoire de ces lignées partagées entre ambitions politiques, manipulations et conspirations. Das verwunschene Glück d’Antonio Draghi et de l’empereur Leopold Ier a été proposée en trois représentations, dans une salle ornée de somptueuses peintures.

L’opéra, dont le titre original est Gl’Incantesimi disciolti (Sorcellerie dissoute), sur un livret italien de Nicolò Minato, fut composé pour célébrer le mariage de Leopold Ier avec Claudia Felicitas du Tyrol. Ce mariage, survenu à l’automne 1673 après le décès de sa première épouse, fut finalement célébré à Graz plutôt qu’à Vienne, où le deuil officiel interdisait la tenue des festivités. La construction du château d’Eggenberg fut alors achevée en toute hâte pour accueillir la mariée. Cet événement est considéré comme l’un des plus importants de l’histoire de Graz, comme en témoigne l’inscription « AVE CLAVDIA IMPERATRIX » gravée au-dessus du portail du château.

Mise en espace claire et expressive 

L’opéra met en scène des figures allégoriques représentant des personnages très probablement réels : Le Bonheur (chanté par Johanna Rosa Falkinger), Le Mensonge (Sophie Daneman), L’Affection (Julian Habermann), L’Égoïsme (Markus Schäfer), Le Bon Conseil (Dietrich Henschel), L’Envie et La Raison (Anna Manske). Ces allégories sont présentées sous forme de poupées grandeur nature en tissus colorés de Lilli Hartmann, manipulées selon les scènes tantôt par les quatre danseuses, tantôt par les chanteurs. Les danseuses assurent des parties de ballet modernisé, mêlé à une pantomime à la fois expressive et aisément compréhensible. Malgré ce double dédoublement — poupées, chanteurs et danseuses —, le récit demeure parfaitement lisible, grâce à une mise en espace claire et efficace. Quant à la partition originale, seules les parties vocales et la basse continue ont été conservées. Les ballets composés par Johann Heinrich Schmelzer (1623-1680) pour la première représentation dans le parc du château de Karlau ne nous sont pas parvenus.