Début de saison à Metz avec David Reiland

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Pour initier sa saison 2025-2026, l'Orchestre national de Metz Grand Est se place sous le signe de la modernité, et même de la contemporanéité. Modernité du début du XXème siècle, avec le Concerto pour violon de Sibelius et les deux suites que Ravel sortit de son ballet Daphnis et Chloé, et contemporanéité avec la commande de la Cité musicale de Metz, le Bestiarum Musical V, de la compositrice japonaise invitée à résidence, Noriko Baba.

Si la présentation par la compositrice de son œuvre, inspirée des mondes aquatiques, avec un premier mouvement venant du monde de l'hippocampe et un second de celui du martin pêcheur, permettait aux spectateurs de se sentir plus à l'aise avec cette musique moderne, leur perplexité n'en resta pas moins grande. Sans doute faut-il à cette œuvre utilisant les ressources de Boulez et de la deuxième école viennoise plus de temps que deux concerts - le premier ayant été celui de la fin de saison 2024-2025- afin qu'elle soit appréciée à sa juste valeur.

Le concert continua avec la violoniste coréenne Anna Im pour le Concerto pour violon de Sibelius, ce qui permettait à l'orchestre de se développer véritablement. Nonobstant, il semblait que, malgré ses qualités, comme l'harmonie des pupitres, pour lesquelles le public lorrain le suit avec plaisir, l'orchestre manquait d'entrain et de vigueur durant le premier mouvement. Ses qualités révélaient cependant un orchestre proche de celui de Mahler, avec des accords et des harmonies hardies et recherchées, comme celles entre les cordes et les vents. Le deuxième mouvement du concerto, plus nostalgique, lui permet de gagner en assurance, pour prendre sa pleine dimension durant le troisième mouvement.
La modernité fut surtout révélée par la soliste aux aigus acérés, et aux arêtes tranchantes durant le premier mouvement. Elle mène le second mouvement à la force contenue jusqu'au dernier mouvement synthétisant les deux premiers. Pour un premier concert en France, la violoniste n'a pas manqué de faire ici une forte et très bonne impression.

Et c'est surtout avec les deux suites tirées du Daphnis et Chloé, que l'orchestre révéla le mieux son charme. Ainsi que durant la Shéhérazade, avec laquelle il s'était heureusement illustré la saison dernière, l'orchestre de Daphnis et Chloé est riche, coloré et exigeant. Outre les qualités requises par l'orchestre imaginé par Rimski-Korsakov, celui de Ravel tient de celui du jazz ou des marching band avec des instruments à vents bouchés, et de celui de Satie, et tient aussi également de celui de Debussy, avec un pupitre des flûtes très inspiré de celui du Prélude à l'après-midi d'un faune. Et le chef David Reiland, comme chacun de ses pupitres, notamment celui des flûtes, relève bien tous ces défis. Avec la Symphonie n°3 de Mahler, il avait su tendre son orchestre vers la religiosité, ici il sut étendre ses atouts chromatiques aux dimensions de la vie. S'il n'y a pas de religiosité chez Ravel, il y a une sensualité et un amour de la vie. David Reiland module son orchestre sans faute, jusqu'à présent. Encore une soirée réussie à l'Arsenal.

Metz, Cité de la musique, 12 septembre 2025

Crédits photographiques : William Beaucarde

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