Hommages à Pierre Monteux

Maurice Ravel (1875-1937) : Le Tombeau de Couperin, Rapsodie espagnole Daphnis et Chloé Suites 1 & 2 ; Hector Berlioz (1803-1869) : Rêverie et caprice. Joseph Szigeti, violin
New York Philharmonic Orchestra, direction : Pierre Monteux. 1959. Livret en anglais. 73’’’. Pristine Pasc 738
Maurice Ravel (1875-1937) : Pavane pour une infante défunte, Rapsodie espagnole Daphnis et Chloé, ballet complet. Royal Opera House Chorus, London Symphony Orchestra, direction : Pierre Monteux. 1959 et 1961. 73’58’’ Livret en anglais. Pristine Pasc 744
Pierre Monteux: A 150th Anniversary Tribute. Claude Debussy (1862-1918) : Images pour orchestre ; Igor Stravinsky (1882-1971) : Symphonie de Psaumes. BBC Symphony Orchestra, direction Pierre Monteux. 1961. Livret en anglais. 63’29’’. Somm Recordings. Ariadne 5042
Le silence dans lequel sont tenus les 150 ans de la naissance de Pierre Monteux (1875-1964) est sans aucun doute une honte, en particulier en France, son pays natal et au regard de ses états de service pour faire rayonner la musique et la culture française de part le monde !
Pierre Monteux est un pan de l’histoire de la musique. Il fut au pupitre de nombre de créations majeures du XXe siècle dont : Petrouchka, le Sacre du Printemps, le Rossignol de Stravinsky, Daphnis et Chloé de Ravel, Jeux de Debussy, la Symphonie n°3 de Prokofiev….sans perdre de vue que comme violoniste, il était dans la fosse de la première de Pelléas et Mélisande de Debussy et de la création mondiale de l’Oiseau de Feu de Stravinsky. Monteux, c’est une carrière internationale de la fosse des ballets russes, jusqu’aux Metropolitan, Opera, Boston Symphony Orchestra, San Francisco Symphony Orchestra, London Symphony Orchestra tout en étant un invité régulier des grands orchestres comme le Concertgebouw d’Amsterdam ou les Wiener Philharmoniker. Le chef d'orchestre se caractérisait par la rigueur de son approche; un respect absolu pour les indications du compositeur et une haute exigence de méticulosité lors des répétitions et une gestion économe d’effets. Sur ce dernier point, Monteux apparaissait comme un modèle au point que Toscanini le considérait comme le plus grand technicien du bâton. A une époque de narcissique égotique comme la nôtre, Pierre Monteux ne peut être qu’un modèle et une source d’inspiration.
Dans ce contexte anniversaire atone, on se délecte de trois parutions Pristine et Somm. On commence avec le label Pristine qui nous offre un concert Ravel capté avec le New York Philharmonic et la réédition d’un album Decca londonien proposant la Pavane pour une infante défunte, la Rapsodie espagnole et le ballet intégral de Daphnis et Chloé avec le London Symphony Orchestra et le choeur du Covent Garden. Enregistrées en 1959 et 1961, ces bandes n’ont jamais quitté les sommets de la discographie. Il faut dire que la direction aérée et colorée du chef compose des toiles magnifiques qui éblouissent. La fluidité et le sens de la narration sont les grands atouts de ces gravures portées par un orchestre magistral.
On traverse l'Atlantique pour un concert Ravel, donné en 1959, avec le New York Philharmonic. Au programme: le Tombeau de Couperin, la Rapsodie espagnole, les Suites n°1 et n°2 de Daphnis et Chloé avec en bonus la Rêverie et caprice de Berlioz avec rien moins que Joseph Szigeti en soliste ! Le Tombeau de Couperin, avait déjà été édité par le New York Philharmonic dans le cadre d’un coffret anniversaire de l’orchestre et se trouve sur le net en streaming. C’est une lecture fabuleuse de fluidité, avec parfois des choix de tempi qui peuvent étonner par leur rapidité dès le “Prélude” mais qui composent une interprétation vive et translucide comme l’eau d’un ruisseau. La puissance brute du New York Philharmonic et l’engagement des musiciens alliés à la lisibilité de la baguette du chef débouchent une lecture impériale et virtuose de la Rapsodie espagnole. Cette interprétation dégage une énergie communicative avec des gradations et des dynamiques exemplaires. La lecture de la Rêverie et Caprice de Berlioz est sobre et narrative par un maître du violon. En conclusion, un dessert de roi avec les deux suites de Daphnis et Chloé. La comparaison avec l’enregistrement londonien est passionnante. A Londres, le chef vise plus la linéarité et la fluidité qu'à New York, il se fait plus rythmicien porté par le bloc compact et virtuose des pupitres de l’orchestre. Bien évidemment, la “Danse générale” conclusive est un rouleau compresseur instrumental qui emporte tout au panache !


On revient à Londres avec une parution Somm qui documente Pierre Monteux avec le BBC Symphony Orchestra, capté au Royal Festival Hall, lors d'un concert d’octobre 1961. Si l’on retrouve les Images de Debussy, dont Monteux était l'un des grands interprètes comme en témoigne ses enregistrements avec le San Francisco Symphony (RCA) et le London Symphony Orchestra (Decca, on se réjouit d’une version de la Symphonie de Psaumes de Stravinsky (avec le BBC Chorus), une partition qui ne figurait pas dans la discographie officielle du chef. Dans ces deux partitions, l’effet Monteux est à l'œuvre : précision du rythme, lisibilité de la masse orchestrale et fluidité des tempi ! Du grand art de chef ! En complément, on retrouve une une interview du musicien Alex Nifosi qui se rappelle Pierre Monteux, narrant la grande flexibilité de ce chef.
Dans les cas de ces trois parutions, le travail sur les bandes sonores est de haute qualité. Andrew Rose, pour Pristine, a remasterisé les bandes selon le procédé XR dont il est l’inventeur. De son côté, l’édition de l’album Somm a été réalisée par Lani Spahr. Du travail d’orfèvre dans les deux cas
Note globale : 10
Chronique réalisée sur base des fichiers digitaux