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Ensevelie dans un bric à brac lugubre, La Vestale sauvée par le chant à l’Opéra de Paris

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« Je suis venue parce que j’aime le morbide » confie une adolescente à l’entrée. Elle a dû être déçue. D’abord, parce que la musique altière où se love un chant large et spianato dégage une insolente énergie vitale. Ensuite, parce que sur le lieu même où fut emprisonné le marquis de Sade en 1785, la mise en scène manque paradoxalement d’ imagination.

Sans doute désemparée devant cet opéra romain-napoléonien, la metteur en scène Lydia Steier négligeant l’histoire de France au profit de la sienne - anglo-saxonne- , explique  avoir cherché des idées du côté de l’Iran puis des Mormons pour, finalement, se tourner vers une dystopie  américaine « La servante écarlate » qu’elle a épicée de  nazis, fascistes franquistes, pénitents cagoulés, soldats à kalachnikov.

Lorsque La Vestale, Tragédie lyrique en 3 actes de Gaspare Spontini sur un livret  d'Étienne de Jouy, parut sur la scène de l’Académie Impériale de Musique, le 15 décembre 1807, elle fut accueillie avec des transports d’enthousiasmes. Wagner l’admirait, Berlioz également. Elle resta en faveur tout le siècle. Maria Callas s’empara du rôle en 1954. Récemment, une version orchestrale rutilante dirigée par Christophe Rousset au Théâtre des Champs-Élysées a permis d’apprécier « sur pièce » une partition-charnière qui hésite entre Gluck et Chérubini, entre l’épure, l’émotion et le grandiose.

Elektra à Baden-Baden

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Après Die Frau ohne Schatten (La Femme sans ombre) de Lydie Steier l’année dernière, le Festival lyrique de Baden-Baden joue cette année Elektra avec une mise en scène de Philipp M. Krenn et de Philipp Stölzl. Qu’il en soit remercié. Tout le monde n’est pas parti, de la production dernière. Elza van den Heever et la Philharmonie de Berlin sous la baguette de Kirill Petrenko sont encore là. Qu’ils en soient remerciés également.

Sur une scène enclose sur elle-même telle un crâne, des blocs amovibles sculptent le décor à l’envi, montrant ainsi leurs lignes faisant songer à des lignes de textes, surtout avec celui du libretto projeté sur eux, ou des portées. Ils séparent, encaquent ou libèrent les personnages, tout en soulignant leurs enfermements psychologiques. Ils peuvent aussi transformer le plateau en escalier géant, illustrant la montée dans la psychose comme la descente dans la psyché. Le crime comme la vertu a ses degrés, disait Racine dans "Phèdre". Ces cubes rappellent ainsi que, comme dans Salomé, Elektra fut composé à l’époque de la naissance de la psychologie. Et comme Salomé, Elektra présentent des caractères au bord de la folie, se heurtant à celle du personnage féminin central.

Ces blocs constituent certes la plus grande force de cette mise en scène, avec leur plasticité scénique mais aussi une faiblesse, à cause des contraintes physique qu’ils imposent aux acteurs. Ainsi quand ils les enferment, ne leur permettent-ils que peu de mouvements et les forcent-ils à se plier en contraignant leur plexus. Cela se voit notamment dans la scène finale, durant laquelle Electre, à côté des cadavres de ses parents, et sous un de ces cubes, veut danser mais peut à peine bouger.