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A Lausanne, un Docteur Miracle haut en couleur

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Tous les deux ans, l’Opéra de Lausanne part en tournée pour constituer sa Route Lyrique qui, cette année, entre le 20 juin et le 10 juillet, fait halte dans douze localités des cantons de Vaud, du Jura, du Valais. Chaque spectacle est offert gratuitement, ce qui attire un public qui n’a pas les moyens ou l’habitude de fréquenter un théâtre lyrique. 

En cette année 2025 où est commémoré le 150e anniversaire de la création de Carmen, Claude Cortese, le nouveau directeur, reprend Le Docteur Miracle coproduit par les Opéras de Tours, de Rouen, du Théâtre du Châtelet et de la Fondation Bru Zane France. Écrite par un Bizet de 18 ans pour prendre part à un concours d’opéras-comiques organisé par Jacques Offenbach, cette opérette en un acte obtint le premier prix ex-aequo avec celle de Charles Lecocq et fut créée aux Bouffes-Parisiens le 9 avril 1857. Puis elle fut jouée onze fois avant de tomber dans l’oubli jusqu’à 1951 quand l’exhuma le Conservatoire de Paris. Sporadiquement elle refait surface de nos jours.

Le public se délecte de cette intrigue, grosse ficelle conçue par Léon Battu et Ludovic Halévy, nous montrant un soldat, Silvio, épris de Laurette, la fille du Podestat de Padoue, qui réussit à se faire engager dans sa maison comme cuisinier. Mais l’omelette qu’il sert est si indigeste que le maître de ces lieux se croit empoisonné. L’on fait venir un docteur (qui n’est autre que Silvio déguisé) qui accepte de le soigner à condition qu’il puisse épouser sa fille… Pierre Lebon qui conçoit la mise en scène, les décors et costumes en collaborant avec Bertrand Killy pour les lumières, s’en donne à cœur joie, car il joue lui-même l’assistant de ce Docteur Miracle qui prend à  parti le public pour expliquer la trame  s’inscrivant dans un décor qui n’est qu’un enchevêtrement  de passages coulissants, de trappes, de tiroirs s’amoncelant jusqu’à une plateforme en équilibre instable surmontée d’une large baie vitrée à rideaux tirés.  Les trois personnages auxquels s’ajoute Véronique, la seconde épouse du Podestat, revêtent le rouge criard de la pantomime dont l’assistant tire les ficelles avec une énergie qui ne connaît pas le moindre répit. 

La Route Lyrique de l’Opéra de Lausanne

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Depuis 2010, l’Opéra de Lausanne part en tournée tous les deux ans pour un périple intitulé La Route Lyrique qui touche une quinzaine de localités dans le Pays de Vaud et deux ou trois dans les cantons avoisinants, tout en réservant deux soirées à l’Opéra de Lausanne. Chaque représentation est gratuite et attire ainsi un public extrêmement diversifié incluant nombre de gens qui ne sont jamais allés à l’opéra. 

Généralement, la direction choisit un ouvrage d’une durée d’un peu plus d’une heure qui requiert cinq ou six chanteurs, un petit orchestre d’une douzaine de musiciens, et une mise en scène simple qui soit facile à monter un peu partout.

Pour l’édition 2023, Eric Vigié a jeté son dévolu sur L’Ile de Tulipatan, petit bijou burlesque que Jacques Offenbach présenta sur la scène des Bouffes-Parisiens le 30 septembre 1868, alors que le Théâtre des Variétés était sur le point d’afficher La Périchole. Comment ne pas sourire à la lecture du générique nous annonçant que l’îlot est gouverné par le roi Cacatois XXII, flanqué du Sénéchal Octogène Romboïdal ? La Reine n’a donné naissance qu’à des filles jusqu’au jour où, profitant de l’absence de son époux occupé à guerroyer, elle a comploté avec le ministre pour faire croire qu’elle a eu enfin un fils qu’elle a nommé Alexis. Mais ce pseudo-garçon ô combien efféminé irrite son père, d’autant plus qu’il suscite une passion frénétique en Hermosa, pseudo-fille de Romboïdal que Théodorine, sa femme, a travestie afin d’éviter à son ‘fils’ de mourir sur le champ de bataille. Après moult péripéties, ce quiproquo sexuel se résoudra par l’union des deux tourtereaux si épris l’un de l’autre.