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« Libre ! » par l’Orchestre national d’Ile-de-France : un programme sous le signe de l’émancipation

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Du 10 au 18 mai, l’Orchestre national d’Île-de-France a présenté dans sept villes franciliennes un programme placé sous le thème « Libre ! », comprenant la cantate Hiob (Job) pour solistes, chœur et orchestre de Fanny Mendelssohn. Ce programme était complété par Leonore III de Beethoven et la Messe n° 5 de Schubert.

Au XIXe siècle, époque où l’on aimait classer les formes artistiques comme la peinture ou la musique, les œuvres pour orchestre et chœur étaient considérées comme un genre majeur, souvent réservé aux hommes. Les femmes, déjà peu autorisées à composer, y accédaient encore plus difficilement. Le titre de ce concert, « Libre ! » souligne ainsi l’audace de Fanny Mendelssohn, compositrice remarquable et musicienne aux multiples talents. Certains avancent même qu’elle surpassait son frère Félix, et qu’il aurait apposé sa signature sur certaines de ses œuvres. Si ce débat reste à trancher par les spécialistes, sa cantate Hiob témoigne d’un talent d’écriture indéniable.

Avant de faire entendre cette œuvre, le chef d’orchestre Case Scaglione prend la parole pour rappeler les conditions difficiles que connaissait Fanny. Il cite une lettre de son père, Abraham Mendelssohn, écrite en 1820 : « La musique deviendra peut-être sa profession [de Félix], tandis que pour toi, elle ne doit être qu’un ornement, jamais la racine de ton être ni de ton action. » Le chef en profite aussi pour rappeler les grandes lignes de l’histoire de Job.

ELIAS de Félix Mendelssohn au TCE : d’une bouleversante vérité

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Le nom du chef d’orchestre et claveciniste Masaaki Suzuki à la tête de l’Orchestra of the Age of Enlightenment constitue, en soi, la promesse d’un moment exceptionnel ; à plus forte raison lorsque c’est l’un des chef d’œuvres de l’Oratorio romantique qui est au programme. Elias concilie en effet l’équilibre architectural, la stylisation des affects de Bach, l’ardeur radieuse de Haendel et l’esthétique d’un monde nouveau, exubérant, coloré, puissant. Mais il y a plus, ces pages créés en 1846 à Birmingham, font « entendre » à travers les siècles la voix même du jeune compositeur. L’étonnant livret (respectant scrupuleusement le texte biblique), rédigé de sa main, ne craint ni les répétitions ni une rythmique assez peu variée, ce qui suscite un climat hypnotique et laisse l’esprit s’évader loin des diversions quotidiennes. Avec le personnage du prophète Elie, l’auditeur est confronté aux tragédies fondamentales de l’existence : la mort, la haine, le désespoir, l’amour parfait. Il est alors introduit dans la contemplation à travers le regard ardent du musicien. Suzuki dirige avec une ampleur d’une précision extrême offrant une vision aussi puissante que cohérente. L’orchestre, aux cuivres parfois très sonores, s’engage sans réserve tout comme le chœur. D’une pure beauté, le Trio des Anges « Lift thine eyes » -si proche des trois génies de La Flûte enchantée- sauve (à juste titre !) Elie du désespoir.