Un Schubert sans charme

par

Franz SCHUBERT
(1797 - 1828)
Symphonies n°1, en Ré Majeur D. 82, n°3 en Ré Majeur D. 200 et n°4 en do mineur K. 417
Royal Flemish Philharmonic, dir.: Philippe Herreweghe
2015-DDD-1h32' (2 CD)-Textes de présentation en anglais, français, allemand, néerlandais-Phi LPH 019Ce n'est pas la première fois que Philippe Herreweghe se penche sur les symphonies de Schubert. En 2011, la 9e Symphonie et, l'année suivante, les 6e et 7e paraissaient chez Pentatone. Cette fois, il s'intéresse à trois "Symphonies de jeunesse", les n°1, 3 et 4, cette dernière que lui-même dénommait "Tragique" -la seule en mineur avec la si mineur inachevéeformant la transition vers les corpus ultérieurs. Si la 4e Symphonie fait partie du répertoire usuel -et encore, on l'entend peu souvent-, les trois premières sont fort oubliées de celui-ci. Dans son intéressant texte de présentation du CD, Xavier Hascher recherche les diverses causes de cette désaffection, alors qu'en germes, les quatre premières symphonies, oeuvres d'un jeune homme âgé de 16 à 21 ans, détiennent déjà les clés de la maturité. Une de ses propositions me semble intéressante: les 1ère et 3e Symphonies furent créées seulement un an avant Parsifal. Le genre symphonique est alors depuis longtemps devenu obsolète aux yeux du public. Beethoven en était-il conscient lorsqu'on sait que sa 8e Symphonie date de 1814 et la suivante, la novatrice 9e, de 1824. Dix années de silence dans le domaine symphonique?
Mais revenons à Schubert et ses premières symphonies composées dans la lignée de Haydn avec leurs introductions lentes suivies d'allegros "vivace" ou "con brio" conquérants, pétillants de jeunesse, jouant des cordes et des bois sur des assises rythmiques très organiques, des andante ou des menuets dits avec élégance, charme et raffinement, des mouvements truffés de subtiles modulations que le compositeur manie de main de maître. Alors, pourquoi ces premières symphonies sont-elles si peu jouées? Elles sont délicates, comme le sont les symphonies de Mozart dont elles sont également les héritières, du cristal le plus pur. C'est cette pureté que l'on recherche en vain dans les Schubert de Herreweghe et le Flemish Philharmonic Orchestra : l'articulation des cordes est pâteuse, troublant ainsi la transparence de l'orchestre; la balance est mal équilibrée et on cherche à entendre les bois, les cors si présents dans la 4e Symphonie. Une vision plus beethovenienne que schubertienne, âpreté plutôt que charme, masse sonore plus que légèreté. Dommage. En guise de consolation, on écoutera très vite le Hanover Band et Roy Goodman (Nimbus).
Bernadette Beyne

Son 9 - Livret 9 - Répertoire 10 - Interprétation 6

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