Claudio Vandelli, chef d’orchestre 

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Le chef d’orchestre Claudio Vandelli est directeur musical de l’Orchestre Philharmonique de Würth en Allemagne avec lequel il fait paraître un enregistrement consacré à des partitions démonstratives de Brahms, mais orchestrées par Arnold Schoenberg. Claudio Vandelli revient sur cette gravure, première étape discographique d’un travail avec ce jeune orchestre.  

Votre premier album avec votre orchestre de Würth est consacré au Quatuor avec Piano de Brahms dans l’orchestration d’Arnold Schoenberg. Pourquoi avez-vous choisi cette oeuvre très démonstrative ?

Nous cherchions un répertoire qui soit intéressant pour le public et qui puisse trouver une place dans une discographie où la plupart des oeuvres connues sont déjà présentes avec un grand nombre d’enregistrements. Nous recherchions un morceau qui soit également stimulant pour les musiciens, avec beaucoup de parties solistes et qui puisse montrer les grandes qualités musicales et techniques de ce merveilleux orchestre. Enfin, pour terminer ce cahier des charges, il fallait que soit une oeuvre symphonique majeure. Le Quatuor de Brahms orchestré par Schoenberg possède toutes ces caractéristiques. C’est un peu comme une “5e symphonie de Brahms”, comme Schoenberg aimait le dire.

 

Vous avez dirigé à travers le monde, mais est-ce qu’enregistrer Brahms avec un orchestre allemand a un sens particulier ?

Un orchestre allemand qui est non seulement “nouveau”, mais moderne dans le sens où il intègre des Allemands, mais aussi beaucoup de musiciens de toutes nationalités, qui ont un lien de coeur avec l’Allemagne, où ils ont été formés, adoptés et parfois naturalisés. Personnellement je suis fier d’être le chef principal d’un orchestre allemand et de cet orchestre en particulier. Et pour un chef d’orchestre, diriger le répertoire symphonique allemand est de la plus haute importance, on grandit avec ces oeuvres, indépendamment du lieu de naissance. À vrai dire, je trouve cela naturel !

Est-ce que l’orchestre a un son particulier dans cette musique ?

Il s’agit d’un ensemble qui possède un son riche, mélange de tradition allemande et d’écoles des pays de l’Est européen. Ceci lui donne une identité particulière que j’aime beaucoup. Et ce mélange est présent dans la musique de Brahms également, à travers les différents mouvements du quatuor, et culminant dans le « Rondò alla zingarese », qui est à mon avis rendu par ces musiciens dans le juste caractère et âme. De plus, la présence d’un premier violon solo d’exception, Catalin Desaga, permet de rendre spécialement homogène et raffiné le son des cordes. C’est vraiment un grand plaisir musical que de travailler avec cette phalange.

L’Orchestre Philharmonique de Würth fait partie de ce réseau très solide des orchestres allemands de villes de taille moyenne. Pouvez-vous parler un peu de cet orchestre que l’on ne connaît pas tellement en dehors des frontières allemandes ?

L’orchestre existe depuis deux ans et demi seulement, il est normal qu’il ne soit pas encore connu. Je pense qu’il se différencie du réseau d’orchestres dont vous parlez dans le sens qu’au-delà de l’importance territoriale, l’orchestre a des objectifs d’excellence et de reconnaissance au niveau international. Déjà depuis ses débuts, les solistes et chefs invités sont choisis parmi les plus grands noms, comme vous pouvez le voir dans l’historique des concerts sur le site de l’orchestre. Ce premier enregistrement est distribué à l’échelle mondiale et d’autres suivront. 

Aujourd’hui il y a beaucoup de formations locales dans le monde qui peuvent accéder à une reconnaissance internationale lorsqu’elles sont de haute qualité, grâce aux médias. Mais cela prend naturellement un certain temps. Pour l’instant, nous pouvons déjà nous réjouir du fait que tous les artistes qui ont joué avec l’orchestre en ont reconnu les qualités et souhaitent tous retourner à Künzelsau.

 Vous avez une grande expérience dans le recrutement et le travail d’orchestre de jeunes, en particulier au Verbier Festival. Qu’est-ce que ce travail vous apporte ?

J’ai eu la grande chance de pouvoir sélectionner et de participer à la formation d’une nouvelle génération de musiciens de tous les instruments et de tous les pays. Cela a été un échange et enrichissement de chaque instant. Je continue à m’occuper d’orchestres de jeunes internationaux, en alternance avec le travail auprès d’orchestres professionnels. Les deux aspects de ma carrière me passionnent. L’expérience à Verbier en particulier m’a permis de travailler pendant beaucoup d’années à côté des plus grands chefs, ça a été pour moi la plus incroyable école possible. J’ai eu la chance de connaitre, discuter, travailler avec tellement de grands chefs, dont certains sont malheureusement décédés entre-temps. J’ai un souvenir très précis de chacun, d’enseignements que j’en ai reçu, d’échanges, d’expériences, de sensations musicales et humaines. Je serais certainement une autre personne et un autre musicien sans toutes ses rencontres.

On lit que le niveau technique des musiciens n’a jamais été aussi élevé mais que les personnalités sont de plus en plus lisses. Est-ce que c’est un aspect que ressentez lors des auditions et des répétitions ?

Non, je ne ressens pas cela et je ne suis pas d’accord avec cette analyse. Le fait de pouvoir accéder à des enseignements de plus haut niveau, mieux organisés et mieux fournis aux élèves ne peut qu’être positif ! Un musicien talentueux et passionné ne peut que mieux s’exprimer s’il possède une meilleure technique instrumentale ! Si risque il y a, il est plutôt à rechercher dans le fait que la musique qu’on joue est de plus en plus lointaine historiquement de nos jours. Et une partie de la richesse musicale et culturelle des grands maîtres du passé se perd, inexorablement et inévitablement. Aux plus âgés d’entre nous la tâche d’essayer de perpétrer cette culture, de la transmettre aux jeunes de la manière la plus complète et riche possible.

Le site de Claudio Vandelli : www.claudiovandelli.com

A écouter : Johannes Brahms (Orchestration d'Arnold Schönberg) : Quatuor avec piano Nr.1 ; Ouverture pour une fête académique. Würth Philharmoniker, Claudio Vandelli. 1 CD Challenge CS72831.

 

 

Crédits photographiques : Claudio Vandelli 

Propos recueillis par Pierre-Jean Tribot 

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