La musique aux accents optimistes de l’Américain Joel Puckett

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Short Stories in London. Joel Puckett (°1977) : There Was a Child Went Forth, pour ténor et orchestre de chambre ; Concerto pour trompette ; Short Stories, concerto grosso pour quatuor à cordes et orchestre. Nicholas Phan, ténor ; Sean Jones, trompette ; London Symphony Orchestra, direction Joseph Young. 2024. Notice en anglais, en allemand et en français. 60’ 09’’. Avie AV2751.

Né à Atlanta, le compositeur américain Joel Puckett a étudié la composition à Shenandoah et à l’Université de Michigan, avec William Bolcom (°1938) et Michael Daugherty (°1954). Son catalogue se diversifie en musique orchestrale, de chambre et chorale, ainsi que dans le domaine opératique (le base-ball lui a inspiré The Fix en 2019). Sa musique est souvent définie par la presse musicale de son pays comme accessible, nourrie d’émotion sensible et de souffle sobrement lyrique, animée aussi par un message global de consolation, de joie et d’espoir. The Shadow of Sirius (Naxos, 2015), destiné à une flûte que l’on peut qualifier de nomade et à des vents, en est un exemple emblématique. On peut découvrir son répertoire sous des labels comme Albany, Neuma, Cédille, Summit… 

Le présent album Avie propose trois compositions de Puckett, deux d’entre elles étant très récentes. Dans la notice, qui propose une conversation entre le musicien et l’écrivain Richard Bratby, qui est notamment critique pour la revue Gramophone, Puckett confie : Quand je rencontre quelqu’un de stimulant, j’ai tout de suite envie de lui écrire de la musique. Ce sont en effet des collaborations créatives qui sont ici présentées.  En 2013, les Short Stories ont vu le jour sous la forme d’un concerto grosso destiné, à l’origine, à un quatuor à cordes et à un ensemble de vents ou à un orchestre d’harmonie. Le quatuor est ici en partenariat avec un grand orchestre, celui du London Symphony. Puckett a conçu, pour ces Histoires brèves, trois parties qui regroupent en tout huit morceaux de courte durée, dont il explique la forme, en spécifiant qu’à l’opposition du quatuor à l’orchestre, il a préféré un jeu par paires dans un enchevêtrement subtil qui met en avant les différents intervenants. À la fois méditative et virtuose, la partition offre au quatuor, rôle confié à quatre chefs de pupitres du LSO, de beaux moments de lyrisme.

Avant ces Short Stories, on découvre le cycle de chansons orchestrales There Was a Child Went Forth (Un enfant s’avança) de 2023, une commande pour le 225e anniversaire du Marine Band américain « The President’s Own ». Les quatre poèmes choisis (textes reproduits) proviennent des Leaves of Grass (Feuilles d’herbe) de Walt Whitman (1819-1892), recueil paru dans une édition dite « du lit de mort », l’année même du décès de l’écrivain, qui avait en son temps rédigé des articles autour des prestations du Marine Band. Le cycle est destiné au ténor Nicholas Phan (°1979), un ami de Puckett, qui interprète ces moments sensuels (superbe The early lilacs) avec sensibilité. Le ténor et le compositeur sont tous deux férus de Whitman, haute figure poétique ; la synergie est établie à travers un message raffiné et délicat, que Puckett revendique pour aspirer à l’optimisme.

Le programme est complété par le Concerto pour trompette de 2024, le second destiné à l’instrument après 15th Night of the Moon, dix ans auparavant. Cette partition en quatre mouvements est destinée au trompettiste de jazz Sean Jones (°1978) ; Puckett la considère comme un hommage à Aaron Copland qui composa un Concerto pour clarinette pour Benny Goodman, que ce dernier créa à New York en 1950, sous la direction de Fritz Reiner. Le compositeur est le présentateur idéal de son concerto : Je voulais offrir à Sean une occasion de déployer son éblouissante virtuosité, mais également l’articulation et les inflexions qui selon moi lui sont propres. […] Ce n’est pas vraiment un « concerto de jazz », de la même façon que celui de Copland n’en est pas un non plus. J’ai juste essayé de mettre Sean dans des situations où il peut briller. L’exercice est des plus réussis, tant au niveau de la pulsation que du rythme ou de la tension expressive et rêveuse qui traverse, like remembering an old song, le magnifique second mouvement. Sean Jones est porté par cette musique inspirée, comme le London Symphony Orchestra qui, tout au long de cet album plaisant, se révèle en phase avec les partitions de Puckett, sous la baguette précise du jeune chef afro-américain Joseph Young. 

Son : 9    Notice : 10    Répertoire : 9    Interprétation : 10

Jean Lacroix

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