Witold Rowicki dirige Tchaïkovski 

par

Piotr Ilyich Tchaïkovski  (1840-1893) : Symphonie n°5 en mi mineur, Op.64 ;  Symphonie n°6 en ré mineur “Pathétique”, Op.71 ;  Casse-Noisette, Suite Op.71a. SWR Sinfonieorchester Baden-Baden und Freiburg et Radio Sinfonieorchester Stuttgart des SWR, Witold Rowicki. 1962-1979. Livret en allemand et anglais. 48’35’’ & 67’16’’. 2 CD SWR19112CD. 

Figure bien oubliée de l’histoire de l’interprétation, le Polonais Witold Rowicki fut pourtant un chef majeur et un véritable bâtisseur d’orchestres. Il contribua ainsi à la recréation de deux phalanges polonaises d’importance au sortir de la Seconde guerre mondiale : l'Orchestre de la Radio de Katowice et l'Orchestre philharmonique (national) de Varsovie. Au début des années 1980, il passe à l’ouest et devient le directeur musical de l’Orchestre symphonique de Bamberg. Sa discographie officielle est modeste en quantité mais elle s’avère de haut vol avec une excellente intégrale  des symphonies de Dvořák avec le LSO (Decca) ou une superlative Symphonie n°5 de Chostakovitch avec le Philharmonique de Varsovie (DGG). On  peut  également apprécier ce chef à travers d'intéressantes bandes de concerts  éditées, hélas avec parcimonie et faible disponibilité régulière, par de valeureux labels polonais. 

On le retrouve ici avec les deux orchestres radio-symphoniques de la SWR pour quelques bandes consacrées à des tubes de Tchaïkovski. Dans la Symphonie n°5, captée en 1962, Witold Rowicki dirige sans fioritures et effets de manche dans une optique plutôt carrée. Pas de pathos et de dramatisme avec une direction très sensible à l’avancée narrative.  Le SWR Sinfonieorchester Baden-Baden und Freiburg a du mal à entrer dans cette vision avec un premier mouvement expérimental, surtout dans les transitions thématiques assez instables.  

En 1969, le chef polonais est à nouveau au pupitre du même orchestre pour une “Pathétique” bien mieux fignolée mais fidèle à cet esprit un peu brutaliste qui refuse le sentimentalisme et la dramatisation. La direction tranchante et vive gomme même les contrastes au profit d’une fluidité narrative. Ceux qui aiment les  Tchaïkovski  de chefs qui soulèvent les pupitres comme des lames de fonds seront ici déçus avec cette version allégée du chef d'œuvre symphonique. Cette lecture très personnelle s’appuie sur un orchestre fort habitué aux répertoires du XXe siècle et aux créations contemporaines dont les instruments sont  tranchants de timbres et mats de sonorités.    

Changement de ton avec la suite du Casse Noisette plus orchestrale que chorégraphique avec une direction très rythmique et burinée qui considère ces épisodes comme des petits mouvements de symphonies. Le Radio Sinfonieorchester Stuttgart des SWR est impliqué et appliqué dans cette interprétation encore un peu expérimentale et conceptuelle.  

Certes, ce double album n’est en rien indispensable et il existe des dizaines d’interprétations plus idiomatiques. Cependant les amateurs de direction d’orchestre et les explorateurs forcenés des marges interprétatives pourront y trouver matière à débats. 

Son : 5/8 - Livret : 9 - Répertoire : 10 - Interprétation : 7

Pierre-Jean Tribot

 

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